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En Inde, le Congrès joue son avenir dans une élection régionale

Après avoir surplombé la politique indienne depuis l'indépendance en 1947, le parti du Congrès lutte désormais pour son avenir avec l'élection samedi du gouvernement local dans son dernier bastion majeur, convoité par les nationalistes hindous.

Une défaite au Karnataka, grand État du sud de l'Inde aux plus de 65 millions d'habitants, dont la capitale Bangalore est le centre de la high-tech indienne, accentuerait la descente aux enfers de la formation de Nehru et Gandhi. Elle augurerait d'autant plus mal de ses chances aux législatives nationales de l'année prochaine.

"Cette bataille, c'est 'marche ou crève' pour le parti du Congrès", résume Sandeep Shastri, vice-chancelier de l'université jaïne de Bangalore.

Autrefois omniprésent, le Congrès aujourd'hui emmené par Rahul Gandhi, l'héritier de la célèbre dynastie politique, est en effet sur le point d'être oblitéré de la carte électorale.

Depuis qu'il a été évincé du pouvoir central par les nationalistes hindous de Narendra Modi en 2014, il a enregistré défaite sur défaite dans d'importantes élections d'États, des scrutins vitaux dans ce système fédéral.

S'il perd le Karnataka, le Congrès ne détiendra plus que le Pendjab, État moyen du nord du pays, ainsi que les modestes Mizoram (nord-est) et territoire de Pondichéry (sud). Soit à peine 2,5% du 1,25 milliard d'habitants que compte l'Inde.

"Ils ont systématiquement perdu le pouvoir dans chaque État qu'ils dirigeaient depuis 2014 et le Karnataka est pour eux une opportunité d'endiguer la tendance", estime M. Shastri.

Preuve des enjeux de ce vote, les poids lourds de la politique nationale, de Rahul Gandhi au Premier ministre Narendra Modi, labourent la région à coups de grands rassemblements électoraux au rythme effréné.

- Percer au sud -

Pour M. Modi et les nationalistes hindous de son Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien), dont les États sous leur contrôle regroupent 70% de la population, le but est de parvenir à s'implanter dans le sud de l'Inde.

S'appuyant sur un électorat traditionnel basé dans le nord hindiphone du pays, qui concentre le gros du peuplement, les nationalistes hindous peinent à étendre leur emprise sur la partie méridionale du sous-continent - dont les langues et cultures dravidiennes sont sensiblement différentes.

Aux législatives de 2019, le BJP ne devrait vraisemblablement pas renouveler son score phénoménal réalisé dans le nord lors de son accession au pouvoir cinq ans plus tôt. Il espère compenser ces pertes par des gains dans des zones où il n'a pas de présence historique, comme le sud et le nord-est.

"Pour le BJP, qui a déjà culminé électoralement ailleurs dans le pays, c'est important d'avoir de bonnes performances dans le sud de l'Inde qui a 130 sièges au Parlement national", sur 545, analyse Nistula Hebbar, rédactrice en chef politique du quotidien The Hindu.

Là où le Congrès a axé sa campagne au Karnataka sur des questions locales, le BJP a au contraire dégainé sa carte maîtresse: le Premier ministre Narendra Modi, charismatique tribun à l'efficacité redoutable.

"Le Premier ministre Modi trompe délibérément les électeurs du Karnataka avec ses discours à l'emporte-pièce sur des non-sujets. Rien que du vent et pas de substance", a répliqué Siddaramaiah, l'actuel ministre en chef (Congrès) du Karnataka, à l'entrée en campagne du chef de gouvernement.

Au-delà de la compétition pour le contrôle du Karnataka, dont les résultats seront connus mardi, cette élection esquissera également la tendance de la grande bataille à venir des législatives.

Une défaite du Congrès pourrait anéantir ses ambitions de rassembler derrière lui une coalition de partis contre le BJP. Une victoire, à l'inverse, insufflerait un "regain de moral" à l'opposition, estime la journaliste Nistula Hebbar.

"Il y a une certaine dynamique de la politique anti-Modi et si le Congrès triomphe, cela fera date avant les élections nationales."

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