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En Iran, un musée veut stimuler la "résistance" en souvenir du conflit avec l'Irak

"Simulateur de bombardement", reconstitution de champs de batailles, armes, œuvres d'art... Le Musée de la Défense sacrée à Téhéran, consacré à la guerre Irak-Iran, glorifie la résistance iranienne contre "le monde entier" pendant ce conflit qui s'est terminé il y a 30 ans.

Alors que les Iraniens s'apprêtent à marquer lundi l'anniversaire de la fin de cette guerre de huit ans, ils sont appelés aujourd'hui à faire preuve de la même ténacité face à des sanctions économiques sévères rétablies par les Etats-Unis et que les autres pays ont été sommés de respecter.

"Le message du musée est la persévérance, la résistance et la sauvegarde de l'honneur", explique à l'AFP son directeur adjoint, Seyyed Mohsen Hajbabaïan, à cette occasion.

"On enseigne aux jeunes générations l'état d'esprit combatif", dit-il. "L'Irak était soutenu par tout le monde et l'Iran était seul à se défendre, mais grâce à Dieu nous avons fini par sortir victorieux de cette guerre".

"Guerre imposée" pour les Iraniens, la "première guerre du Golfe" est déclenchée le 22 septembre 1980 par Saddam Hussein et s'achève le 20 août 1988 avec l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.

En déclenchant les hostilités, le dictateur irakien entend effacer les accords d'Alger de 1975 censés mettre fin au conflit frontalier entre les deux pays au sujet du fleuve Chatt al-Arab.

Il se présente aussi comme un rempart contre l'idéologie révolutionnaire de la jeune République islamique d'Iran, née de la révolte qui a chassé le chah du pouvoir en 1979, et dont l'activisme inquiète nombre d’Etats arabes.

Guerre d'usure et ruineuse, guerre entre Etats la plus longue du XXe siècle, elle se soldera par un retour au statu quo ante, sans gain territorial pour l'un ou l'autre des belligérants mais consolidera la République islamique et le pouvoir de Saddam Hussein.

- Murs et sols tremblent -

Pour l'historien français Pierre Razoux, le chiffre généralement repris d'un million de morts dans le conflit est basé sur des "statistiques invérifiables". Le coût humain total "s'élèverait à environ 680.000 morts et disparus (180.000 côté irakien et 500.000 côté iranien)", dit-il.

Construit par la municipalité de Téhéran, le Musée de la Défense Sacrée et de la Révolution islamique a ouvert ses portes en 2012 et reçoit "plus de 300.000 visiteurs" par an, selon M. Hajbabaïan.

On y croise surtout de jeunes garçons ou des étudiants venus en groupes organisés par des institutions islamiques.

Dès les premières salles, le visiteur est plongé dans les ruines de Khorramshahr, ville frontalière du sud-ouest de l'Iran prise par l'armée irakienne le 24 octobre 1980 après des combats acharnés.

Un "simulateur de bombardement" évoque la "guerre des villes". Murs et sols tremblent pendant que le visiteur assiste à une attaque aérienne en milieu urbain.

Des maquettes de raffineries rappellent les attaques réciproques contre les installations pétrolières des belligérants dans le but de saper l'économie de l'adversaire, l'Iran et l'Irak étant tous deux de gros exportateurs d'hydrocarbures.

- Mobilisation -

Le musée évoque aussi la "mobilisation" de la population de tout âge et loue le sacrifice des "martyrs" au front.

Un commentaire en persan, en anglais et en arabe accuse "de nombreux médias occidentaux (d'avoir) non seulement imposé leur programme politique, mais aussi servi de tribune pour le régime irakien" en fermant les yeux sur ses "crimes" comme "l'utilisation d'armes chimiques contre des zones de guerres ou des villes".

Des montages photographiques rappellent l'appui des Occidentaux, de la plupart des pays arabes et de l'Union soviétique à Saddam Hussein.

Le soutien israélien apporté à l'Iran contre un Irak qu'Israël percevait alors, selon Pierre Razoux, comme "son adversaire le plus dangereux", est en revanche passé sous silence, tout comme les ventes d'armes américaines à Téhéran révélées par l'"Irangate" en 1986. L'Iran est aujourd'hui l'ennemi juré d'Israël.

"Maintenant j'ai une compréhension plus marquée et profonde de la guerre", déclare à la sortie Ali Jafarzadeh, "on luttait contre le monde entier qui soutenait l'Irak et on a résisté pendant huit années".

Alors que le ton monte actuellement entre Téhéran et Washington, qui parle de soutenir un "changement de régime" en Iran, cet étudiant en théologie se dit prêt à participer "sans faute" à un nouveau conflit "pour défendre" son pays.

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