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Etudiants étrangers: une hausse des frais qui ne passe pas

La hausse des frais d'inscription pour les étudiants étrangers extra-communautaires, prévue pour la rentrée prochaine, mobilise plus que jamais ses opposants: plusieurs universités ont fait savoir qu'elles ne l'appliqueraient pas, jugeant avoir été "prises de court" par une annonce précipitée.

Le gouvernement a annoncé en novembre qu'il allait augmenter les frais de scolarité dans les universités pour les jeunes venant de pays hors Union européenne, tout en affirmant vouloir attirer davantage d'étudiants internationaux grâce à une politique de visas améliorée et davantage de bourses.

À partir de la rentrée 2019, ces étudiants devront s'acquitter de 2.770 euros en licence et 3.770 euros en master et doctorat, contre 170 euros pour une année de formation en licence, 243 euros en master et 380 euros en doctorat pour les jeunes Européens.

Mais cette hausse ne passe pas et a relancé la contestation étudiante dans plusieurs facs avant les vacances de Noël.

En décembre, la conférence des présidents d'université (CPU) a aussi demandé au gouvernement de suspendre la mesure et de lancer une "concertation". Une requête entendue: la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal a nommé cinq personnalités qualifiées pour animer cette consultation, qui doit s'achever fin février.

Elle a toutefois réaffirmé que le principe et le calendrier de la hausse des frais ne seraient pas remis en cause et a assuré que la mesure ne s'appliquerait pas aux étudiants déjà présents en France.

En présentant mardi soir ses voeux à la communauté de l’enseignement supérieur et de la recherche, la ministre a indiqué que serait lancée la semaine prochaine une campagne de labellisation, qui rendra "visible" l'engagement français d'améliorer les conditions d’accueil des étudiants étrangers. Elle a aussi laissé entendre que le gouvernement pourrait aller "plus loin" dans sa politique de bourses et d'exonérations: "je suis prête à y travailler avec vous", a-t-elle assuré.

- "Assaillis" -

"Avant de vouloir appliquer une telle mesure, il faudrait pouvoir évaluer son impact", estime Christine Gangloff-Ziegler, vice-présidente de la CPU.

Selon elle, les universités ont été "prises de court" par les annonces du gouvernement. Et l'échéance de la prochaine rentrée est "impossible à tenir". "Il faut avoir le temps d'analyser finement l'origine des étudiants, les besoins en terme d'emplois, les accords de coopération qui existent déjà avec des universités étrangères...", juge-t-elle.

Depuis quelque jours, huit universités (Rennes-2, Lyon-2, Toulouse Jean-Jaurès, Nanterre, Angers, Aix-Marseille, Clermont-Auvergne, Rouen-Normandie) - sur un total de 72 - ont fait savoir qu'elles utiliseraient toutes les possibilités réglementaires existantes pour permettre aux étudiants extra-communautaires de bénéficier du maintien du régime tarifaire actuel.

Un décret paru en 2013 permet en effet à une université d'exonérer de frais ses étudiants dans la limite de 10% des effectifs de l'établissement. Un quota susceptible d'être réévalué dans la concertation en cours, pour permettre aux facultés d'appliquer ou non la hausse des droits d'inscription.

"Le report d'un an de la mesure nous permettrait de ne pas avoir recours à ce bricolage", plaide Mathias Bernard, président de l'université Clermont-Auvergne. Il raconte que les services des relations internationales de son établissement ont été "assaillis" en décembre par des étudiants étrangers inquiets de leur avenir en France.

"Nous ne sommes pas opposés à une réflexion de fond sur l'accueil des étudiants étrangers mais il faut revoir le calendrier pour que la mesure ne s'avère pas contre-productive", juge M. Bernard.

"Prenons un an pour réfléchir", renchérit Olivier David, président de l'université Rennes-2. "Et regardons ce que font les facs en matière d'accueil des étudiants étrangers car de nombreux services d'accompagnement existent déjà".

"Le triplement annoncé des bourses et les exonérations, dont les conditions d’attribution restent à préciser, ne permettront pas de répondre à l’ensemble des sollicitations et de nombreux étudiants vont devoir renoncer à leurs projets de formation en France", écrit pour sa part mardi l'université Rouen-Normandie dans un communiqué. "Cette éviction concernera les régions du monde les plus pauvres et, plus généralement, les étudiants les moins fortunés".

La mesure suscite aussi l'opposition de la plupart des syndicats, notamment la Fage et l'Unef (syndicats étudiants), qui ont chacun appelé à une mobilisation, mardi et jeudi.

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