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Un Chinois pour la première fois à la tête de la FAO

A peine élu, il a ouvert un compte twitter: un Chinois a été choisi dimanche pour la première fois, à la tête de l'Agence des Nations unies qui lutte contre la faim dans le monde, la FAO, concrétisant à la fois l'appétit chinois pour les sujets alimentaires et pour les postes à responsabilité dans des instances internationales.

Qu Dongyu, biologiste et vice-ministre de l'Agriculture en Chine, 55 ans, a remporté dès le premier tour, avec 108 voix, l'élection pour un mandat de quatre ans à la direction de la l'organisation onusienne. La candidate de la France et de l'Union européenne, Catherine Geslain-Lanéelle, longtemps présentée comme favorite, n'a obtenu que 71 votes, et le candidat géorgien, Davit Kirvalidze douze.

"C'est une date historique, un nouveau tremplin" pour l'agriculture et l'alimentation dans le monde, a réagi le nouvel élu, qui a promis de "tout faire pour être impartial et neutre".

Il a aussi promis d'être "dans le concret" pour lutter contre la faim et la pauvreté dans le monde, tout en soulignant qu'il fallait "réformer" l'agence onusienne pour en "faire une FAO nouvelle, plus jeune et plus dynamique".

M. Qu succède au Brésilien José Graziano da Silva, qui a exercé deux mandats.

- Secteur privé -

Dans son discours samedi, M. Qu avait proposé d'attirer plus de moyens financiers venant du privé pour développer les secteurs agro-alimentaires, notamment ceux des pays en développement.

Il a évoqué aussi bien des coordinations possibles avec le géant chinois de la distribution Ali Baba qu'avec la Banque Mondiale basée à Washington, ou la fondation américaine Bill and Melinda Gates, très impliquée dans la recherche agronomique en Afrique notamment, donné au passage des gages aux États-Unis, alors que Pékin et Washington sont engagés dans une guerre commerciale.

La candidate de la France et de l'Union européenne, Catherine Geslain-Lanéelle s'est déclarée auprès de l'AFP "déçue" du résultat, tout en souhaitant le "succès" de la FAO pour "éradiquer la faim et la pauvreté grâce à des systèmes agricoles durables et efficients"

De source diplomatique européenne, on a indiqué que la Chine avait mené "une campagne agressive", sur fond de rumeurs selon lesquelles certains pays membres de la FAO auraient miraculeusement vu leurs arriérés de paiement au budget ou des dettes disparaître juste avant le scrutin. Ni la FAO ni la délégation chinoise n'ont commenté ces rumeurs.

"La Chine attache traditionnellement une grande importance aux questions économiques et sociales et aux affaires de développement à l’ONU. Mais l’alimentation est une de ses priorités. Dans ce contexte, alors que l'autre organisation du secteur – le Programme alimentaire mondial (PAM) – est de facto une chasse gardée américaine, la FAO est attractive pour la Chine", a jugé Manuel Lafont Rapnouil, analyste au Conseil européen des relations internationales (ECFR), dans une déclaration à l'AFP avant le vote.

"La Chine est aussi très soucieuse d'augmenter sa présence dans les rangs des Nations unies, notamment dans les plus hauts postes", a ajouté l'analyste. Elle est notamment très active lors des élections pour la direction des agences, fonds et programmes.

Aujourd’hui, des Chinois se trouvent ainsi à la tête de l'OACI (aviation civile internationale), de l'ONUDI (Organisation des Nations unies pour le développement industriel) et de l'UIT (Organisation internationale des télécommunications). Un Chinois, nommé par le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, dirige par ailleurs le département des Affaires économiques et sociales de l'ONU, a-t-il ajouté.

La question de l’indépendance des hauts fonctionnaires internationaux chinois est revenue au premier plan après l'arrestation surprise du président d'Interpol Meng Hongwei par Pékin lors d'un de ses déplacements en Chine à l’automne 2018, a souligné Richard Gowan, analyste au Crisigroup, un thinktank européen.

Tous les candidats chinois ne sont par ailleurs pas toujours victorieux: En 2017, le candidat chinois à la direction de l’UNESCO, donné favori, s'était retiré après le troisième tour de scrutin.

Dimanche soir, il n'était pas clair si le nouveau directeur-général avait prévu de donner de conférence de presse lundi, comme anticipé par la presse. "Il est en route pour la Chine" a indiqué une source à la FAO dimanche tandis qu'une autre source affirmait "ne pas avoir d'information sur une éventuelle conférence de presse". En tous cas, lui ou son staff ont pris le temps d'ouvrir un compte Twitter @DongyuQu où il avait dimanche soir 79 abonnés, et 15 abonnements, tous des comptes régionaux de la FAO.

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