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Feu vert à l'expulsion de l'imam salafiste algérien d'une mosquée de Marseille

Une commission de magistrats a ouvert jeudi la voie à l'expulsion, à la demande du ministre de l'Intérieur, d'un influent imam salafiste algérien, El Hadi Doudi, soupçonné d'avoir mené dans sa mosquée marseillaise des prêches radicaux et haineux à l'encontre des femmes, des juifs et des chiites.

Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb avait engagé une procédure d'expulsion à l'encontre de l'imam de 63 ans, arrivé en France en 1981, et très suivi sur internet. Des "actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence", lui sont reprochés.

Dans son avis motivé favorable à la demande d'expulsion, rendu jeudi, la commission départementale d'expulsion des étrangers relève qu'une "forme d'impunité a longtemps prévalu" face à "l'idéologie" de M. Doudi, qui nie l'autre "dans sa singularité et son humanité", de façon "attentatoire aux principes fondamentaux de la République". Vingt-cinq prêches prononcés entre 2013 et septembre 2017 ont été épinglés par une note blanche des services de renseignement.

La préfecture de police des Bouches-du-Rhône avait déjà ordonné le 11 décembre la fermeture pour six mois de la mosquée As-Sounna, où officiait cette "référence du salafisme", en plein coeur de Marseille.

En cause, des discours qui "appellent à la défaite et à la destruction des mécréants", "incitent à l’application de la loi du talion à l’encontre de ceux qui combattent Dieu et son prophète et à l’égard desquels la sentence de Dieu est la mort ou la crucifixion". Ou encore des propos qui "présentent les Juifs comme des +impurs+, +les frères des singes et des porcs+ et incitent à prononcer la formule +Allah akbar+ dans les lieux publics pour +effrayer les mécréants+".

Questionné sur des propos très violents tenus en 2013 à l'encontre des caricaturistes de Mahomet et maintenus en ligne sur son site "assalafia.com" même après les attentats perpétrés en France, M. Doudi s'est défendu : "J'ai dit qu'on n'était pas d'accord mais je n'ai pas incité les gens à les tuer, ni à manifester".

-"Lapidation"-

Ses positions sur la mise à mort des auteurs d'adultère lui sont également reprochés. "Il m'est insupportable d'entendre des musulmans critiquer la lapidation, la qualifiant de barbarie, alors que la loi de Dieu y fait référence pour les personnes coupables d'adultère", avait-il déclaré publiquement. "Oui, j'ai parlé de cela", a précisé l'imam à l'audience mercredi, "car c'est la charia islamique mais je n'ai pas dit qu'il fallait pratiquer cette loi".

Son avocat, Me Nabil Boudi, avait accusé les autorités d'avoir "extirpé quelques citations parmi des dizaines de milliers de prêches". "Il peut s'agir de versets du Coran, de propos tronqués par la traduction ou de bouts de phrases", avait-il souligné. M. Doudi représente "un islam rigoriste, orthodoxe" que les autorités peuvent parfois considérer comme "borderline", mais "il n'y a pas d'appel au djihad, pas d'appel au terrorisme", selon lui.

La mosquée de l'imam El Hadi Doudi, l'une des cinq plus vastes de la cité phocéenne, a accueilli ces dernières années plusieurs fidèles se réclamant d'Al Qaïda ou qui ont rejoint l'Irak et la Syrie, soulignait le préfet de police en décembre. La note blanche des services de renseignement estime que ses prêches, diffusés sur internet, contribuent à la "salafisation de l'islam" dans les Bouches-du-Rhône.

"Malgré ses propos destinés à donner le change aux pouvoirs publics, l'ensemble des activités d'El Hadi Doudi est constitutif de troubles à l'ordre public particulièrement graves, de nature à favoriser la constitution d'entreprises terroristes individuelles ou collectives", concluait la note.

Pour éviter l'expulsion, M. Doudi, père de sept enfants dont les trois derniers sont mineurs, a proposé à l'audience, par la voix de son avocat, de cesser ses prêches et de "renoncer à son poste d'imam". La commission a de son côté relevé sa "situation familiale ambiguë" : divorcé, il conteste deux mariages religieux avec des femmes étrangères de 43 et 21 ans, évoqués par les services de renseignement.

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