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Gel des visas de Trump "décevant" et "contre-productif" pour la tech américaine

Les patrons de Google et d'Apple sont "déçus", celui de Microsoft juge que ce "n'est pas le moment": le gel des principaux visas de travail décidé par le président des Etats-Unis désespère les start-up et géants des technologies, qui craignent pour l'innovation et l'avance américaines.

Donald Trump, dont la campagne présidentielle traverse une mauvaise passe, a annoncé lundi le gel des cartes vertes et de certains visas de travail, dont les H-1B très utilisés dans le secteur des hautes technologies.

"L'immigration a immensément contribué au succès économique des Etats-Unis", a réagi sur Twitter le patron d'Alphabet (Google), Sundar Pichai, né en Inde.

La Silicon Valley, berceau de start-up et licornes devenues des leaders planétaires, dépend lourdement des immigrants qualifiés pour répondre à la forte demande en ingénieurs, spécialistes des données, développeurs informatiques, etc.

Donald Trump assure vouloir aider les travailleurs américains, confrontés à la forte hausse du chômage (13,3% de la population active en mai contre 3,5% en février), liée à la pandémie.

Mais le durcissement de la politique migratoire "va empêcher les entreprises américaines, dans la tech et ailleurs, de recruter les hommes et les femmes dont ils ont besoin pour renforcer leur personnel, relancer l'économie et alimenter l'innovation", s'est indigné Jason Oxman, le président du Information Technology Industry Council, une association professionnelle qui comprend plus de 70 sociétés, dont Apple, Amazon, Google, Facebook et Microsoft.

"A un moment critique pour l'économie des Etats-Unis, cela va avoir un impact sur la reprise et la croissance pendant des années."

- Politique -

Les visas H-1B sont octroyés chaque année à 85.000 personnes. Le décret signé lundi met aussi en pause les visas L, utilisés par les multinationales pour transférer leurs propres employés, la plupart des visas J utilisés pour les étudiants-chercheurs et d'autres visas de travail.

Selon un haut responsable, cette "pause" devrait empêcher l'arrivée d'au moins 525.000 étrangers.

C'est une décision "avant tout politique", remarque Darrell West, directeur du centre pour l'innovation technologique de la Brookings Institution.

Donald Trump est engagé dans un bras de fer avec la tech sur différents sujets, dont la régulation des grandes plateformes, qu'il estime biaisées contre lui, malgré son utilisation frénétique des réseaux sociaux.

"Le décret est contre-productif, parce que les entreprises du secteur de la tech, mais aussi de l'agriculture, de la restauration et du tourisme vont avoir des difficultés à trouver les employés dont elles ont besoin", a détaillé Darrell West.

Le haut responsable a souligné que le gel des visas H-1B était temporaire et que l'administration allait préparer une réforme pour qu'en 2021 ils soient attribués aux étrangers les plus qualifiés et non plus par loterie.

"Cela éliminera la compétition pour les Américains aux postes de débutants et nous aidera à attirer les meilleurs, les plus doués", selon lui.

Mais d'après une étude récente de l'Université de Georgetown, les Etats-Unis peinent déjà à attirer des ingénieurs internationaux qualifiés dans des domaines clés, comme l'intelligence artificielle.

Si le pays n'assouplit pas ses règles sur l'immigration, "des universités et employeurs étrangers pourraient commencer à débaucher des Américains", estiment les chercheurs.

- Personnel -

De nombreux dirigeants et groupes et filiales de la Silicon Valley sont eux-mêmes issus de l'immigration, et n'ont pas hésité à le rappeler sur Twitter.

"L'immigration occupe une place centrale dans l'histoire des Etats-Unis, et dans mon histoire personnelle", a déclaré Susan Wojcicki, patronne de Youtube, filiale de Google, et fille d'un immigré polonais.

Elon Musk a lui écrit qu'il n'était "pas du tout d'accord" avec la décision présidentielle.

"Dans mon expérience, ces compétences (technologiques) permettent de créer des emplois. Réformer le système de visas a du sens, mais ceci va trop loin", ajoute le patron de Tesla, né en Afrique du Sud.

Brad Smith, président de Microsoft, a lui tweeté: "Ce n'est pas le moment de couper notre nation des talents internationaux ou de créer de l'incertitude ou de l'anxiété."

"Comme Apple, cette nation d'immigrants a toujours puisé sa force dans la diversité, et l'espoir dans la persistante promesse du rêve américain", s'est enflammé Tim Cook, le PDG du créateur de l'iPhone. "Il n'y a pas de nouvelle prospérité sans ces deux éléments. (Je suis) profondément déçu par cette décision".

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