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Gordon Sondland, un ambassadeur embarrassant pour Donald Trump

Généreux donateur, diplomate et désormais personnage central dans l'enquête visant Donald Trump: Gordon Sondland a livré mercredi au Congrès un témoignage public embarrassant pour le président américain menacé de destitution, dont il est pourtant un fervent partisan.

C'est un chèque d'un million de dollars pour financer l'investiture de Donald Trump qui a amené en juillet 2018 ce propriétaire d'un groupe hôtelier au poste très convoité d'ambassadeur auprès de l'Union européenne (UE).

Mais il est sur le gril depuis la révélation de l'affaire ukrainienne en septembre, qui pourrait valoir au président une mise en accusation ("impeachment") devant le Sénat.

Dans un appel téléphonique controversé le 25 juillet, le président américain a demandé à son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky de se "pencher" sur le cas de l'ancien vice-président Joe Biden, possible candidat démocrate à la présidentielle de 2020, et de son fils Hunter, alors membre du conseil d'administration du groupe gazier Burisma souçonné de corruption.

Cette conversation, et la décision de la Maison Blanche de geler une aide militaire à l'Ukraine, sont au centre de la procédure d'"impeachment" visant Donald Trump.

Peu après une audition à huis clos mi-octobre, M. Sondland avait admis avoir dit à un conseiller du président ukrainien, que "la reprise de l'aide américaine n'arriverait sans doute pas jusqu'à ce que l'Ukraine fournisse une déclaration publique contre la corruption".

- Les hommes du président -

Mercredi, il a admis un "donnant-donnant" - une enquête en Ukraine contre contre une invitation de M. Zelesky à Washington. Il a toutefois assuré que le président Trump n'avait jamais lié "directement" l'aide militaire et les enquêtes. C'était "ma déduction personnelle", a-t-il souligné.

Les différents témoignages dépeignent un ambassadeur au centre d'une diplomatie parallèle - avec l'envoyé américain pour l'Ukraine, Kurt Volker, et le ministre américain de l'Energie Rick Perry - mise en place par l'avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani, et qui ne répond qu'au milliardaire républicain.

Il s'est défendu mercredi d'avoir mené une "diplomatie irrégulière ou louche", assurant que les dirigeants du département d'Etat et les autres étaient "au courant" de ses agissements.

"Nous ne voulions pas" travailler avec M. Giuliani, mais "nous avons suivi les ordres du président", a-t-il affirmé.

Il avait été plus direct avec Fiona Hill, collaboratrice de l'ex-conseiller à la sécurité nationale John Bolton, en lui annonçant en juin qu'il chapeautait le dossier ukrainien. "Je lui ai demandé sous quelle autorité? Il a répondu +le président+", a-t-elle dit la semaine dernière à la commission d'enquête.

Issu d'une famille juive allemande ayant fui l'Holocauste avant de s'installer à Seattle, Gordon Sondland est à 62 ans le patron du groupe Provenance Hotels, qui compte 19 hôtels majoritairement situés dans le nord-ouest des Etats-Unis.

- "Républicain de toujours" -

Se décrivant comme un "républicain de toujours", il a mis mercredi en avant son expérience politique depuis 2003, ayant travaillé avec les démocrates et les républicains avant d'être nommé à Bruxelles.

L'air goguenard, cet homme au crâne rasé admet lui-même ne pas être "un homme qui prend des notes" et qui peut confondre les dates car il rencontre "tout le temps" des chefs d'Etat en tant qu'ambassadeur.

"Ce n'est pas un diplomate professionnel", a souligné mardi Alexander Vindman, membre de l'influent Conseil de sécurité nationale. M. Sondland avait, selon lui, été brièvement évincé d'une délégation pour sa tendance à "improviser" et à "sortir" du cadre diplomatique.

En 2016, il avait d'abord soutenu l'ex-gouverneur de Floride Jeb Bush pour la primaire républicaine, avant de se rallier à Donald Trump.

M. Sondland a également mis en avant sa proximité avec le milliardaire républicain, qu'il a souvent au téléphone, pour des conversations au ton libéré et parfois sur des lignes non-sécurisées.

"Entre le président Trump et moi, il y a beaucoup de gros mots", a-t-il plaisanté en évoquant avoir dit au locataire de la Maison Blanche que le président Zelensky ferait "tout" pour lui.

Lors de cet échange, dans un restaurant de Kiev en septembre, il aurait aussi dit que Donald Trump "s'intéressait" davantage à l'ouverture d'une enquête sur les Biden en Ukraine qu'à la situation dans ce pays aux prises avec une rébellion séparatiste pro-russe, selon le plus haut diplomate américain à Kiev, William Taylor.

Le président, qui avait récompensé sa loyauté et saluait un "grand Américain" début octobre, a pourtant assuré mercredi qu'il ne le connaissait "pas très bien" et qu'il ne lui avait "pas beaucoup parlé".

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