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Universitaire guinéen tué près de Rouen: un suspect interpellé puis hospitalisé

Moins de soixante-douze heures après l'agression mortelle d'un jeune universitaire guinéen près de Rouen, qui a suscité un fort émoi pour son caractère présumé raciste, un homme de nationalité française et d'ascendance turque, avec des antécédents psychiatriques, a été interpellé lundi matin mais sa garde à vue a été levée pour raison médicale.

Dans la soirée, le procureur de Rouen Pascal Prache a annoncé l'ouverture d'une information judiciaire pour "violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner avec la circonstance que les faits ont été commis à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée de la victime à une ethnie ou une nation, une prétendue race ou religion déterminée".

Cette infraction de nature criminelle "fait encourir une peine de 20 ans de réclusion".

Né en 1990, le suspect, interpellé "ce (lundi) matin à Rouen à 9H30", présente des "antécédents psychiatriques" et est "sous curatelle renforcée", avait indiqué une source policière. Le procureur a confirmé que le suspect avait "déjà été condamné et faisait l'objet d'une mesure décidée par le juge des tutelles".

C'est le signalement d'un proche qui a permis de localiser l'homme "dans un hôtel de Sotteville-lès-Rouen où les policiers se sont rendus", a-t-on ajouté de source policière.

Son état n'étant "pas compatible avec la garde à vue, il va être hospitalisé au Rouvray", l'hôpital psychiatrique du secteur de Rouen, a-t-on encore indiqué.

"Du fait de l'état psychologique de la personne interpellée, incompatible avec la garde à vue, celle-ci a été levée après examen médical, le mis en cause étant alors hospitalisé sous contrainte", a précisé le procureur.

Selon une source policière, le suspect portait "un maillot du club turc de Galatasaray", un club de football d'Istanbul, au moment des faits qui ont eu lieu vendredi vers 20h20, peu avant la finale de la Coupe d'Afrique des Nations (CAN) entre l'Algérie et le Sénégal.

- Marche blanche vendredi -

Vendredi soir, Mamoudou Barry, 31 ans, enseignant-chercheur à l'Université de Rouen-Normandie, a été invectivé par son agresseur, à Canteleu, alors qu'il rentrait chez lui en voiture avec son épouse, selon des proches de la victime et l'avocat de la famille, Me Jonas Haddad.

"L'agresseur les a pointés du doigt et a dit: +Vous les sales noirs, on va vous niquer ce soir+", a expliqué Kalil Aissata Kéita, enseignant chercheur à l'Université de Rouen, lui aussi Guinéen et "ami proche" de la victime.

M. Barry serait descendu de sa voiture pour demander des explications. L'agresseur "l'a frappé à coups de poings et de bouteilles", puis "la victime est mal tombée, il a perdu beaucoup de sang. Quelqu'un a tenté de lui faire un massage cardiaque", a expliqué Me Haddad. Transporté au CHU de Rouen, Mamoudou Barry, père d'une petite fille, est décédé samedi.

La victime avait soutenu une thèse de droit le 27 juin à Rouen sur les "Politiques fiscales et douanières en matière d'investissements étrangers en Afrique francophone", selon le site de l'Université.

Une marche blanche doit être organisée vendredi à Rouen, a précisé Me Haddad.

Cette agression avait suscité dimanche une cascade de réactions politiques. Eric Ciotti (LR) avait dénoncé un "crime barbare", Olivier Faure (PS) voyant dans l'agression "le racisme à en pleurer".

Lundi, le président guinéen, Alpha Condé, a indiqué que son gouvernement suivait "de très près l'évolution des enquêtes diligentées par les autorités françaises", selon un communiqué de la présidence.

L'ex-Premier ministre guinéen et opposant Sidya Touré s'est lui aussi dit "très peiné" par la mort du jeune enseignant "dans des conditions aussi tragiques". A Dakar, le président sénégalais Macky Sall a condamné sur Twitter un "crime odieux".

Dans un communiqué, SOS Racisme a demandé que "toute la lumière" soit faite, estimant qu'"il flotte sur cet acte criminel un parfum de racisme sur lequel les services enquêteurs doivent rapidement se prononcer".

bur-mas-alh-db/sp

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