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Honduras: La noria sans fin des candidats au "rêve américain"

"Je vais rester quelques jours, et je repars", annonce sans ambages Victor Aguilera, un migrant hondurien de 38 ans qui vient d'être renvoyé dans son pays après avoir été intercepté aux Etats-Unis.

A l'image de Victor --lunettes de soleil, chemise blanche, barbe et moustache impeccablement taillées--, qui débarque des Etats-Unis sur le tarmac de l'aéroport de San Pedro Sula, à 180 km au nord de la capitale Tegucigalpa, des milliers de ses compatriotes prennent la route du "rêve américain".

Chaque jour, des avions apportent leur lot de migrants illégaux expulsés des Etats-Unis. Chaque jour, entre 300 et 400 Honduriens passent la frontière du Guatemala en direction du nord.

Durant les trois premiers mois de l'année, un total de 19.605 migrants ont été rapatriés des Etats-Unis, selon la directrice générale pour la protection des migrants honduriens, Liza Medrano.

Pour l'expert en questions migratoires Ricardo Puerta, tout indique que "le système américain (de gestion) des migrations est au bord de la rupture". "Il est arrivé à saturation", assure à l'AFP ce Cubain d'origine, naturalisé américain et hondurien. "Les rafles à la frontière sont au maximum", insiste-t-il.

Les 678 centres américains de détention de migrants illégaux, dont certains sont implantés sur des bases militaires, "sont pleins à craquer" et les tribunaux sont débordés, avec 1,8 million de dossiers en retard, relève Ricardo Puerta.

L'organisation de caravanes n'a rien arrangé en favorisant des afflux massifs de migrants d'Amérique centrale, au lieu du goutte-à-goutte du "système des coyotes", les réseaux mafieux de passeurs qui préfèrent mener de petits groupes.

Victor, parti en septembre, a eu recours aux "coyotes", avec sa femme et sa fille âgée de trois ans. Elles ont obtenu l'asile aux Etats-Unis, mais pas lui...

Les caravanes de milliers de migrants partis du Honduras, du Salvador et du Guatemala ont mis en fureur le président américain Donald Trump qui a envoyé l'armée à la frontière mexicaine pour tenter d'endiguer le flot ininterrompu.

- "On va recommencer" -

Engageant un bras de fer avec l'opposition démocrate, Donald Trump en a profité pour relancer son projet d'un gigantesque mur pour empêcher les "hordes" de migrants de franchir la frontière.

Victor n'en a cure: "Ici on ne peut pas vivre, on reçoit des menaces de tous les côtés. On ne sait même plus qui nous rackette, si c'est la police ou les gangs", dénonce-t-il.

Expulsé lui aussi, Mario Castillo, 48 ans, en est à sa deuxième tentative pour regagner Houston (Texas), où il a vécu une quinzaine d'années.

Après l'arrestation, "ils m'ont gardé 15 jours dans une glacière (une cellule à l'air conditionné poussé à fond, NDLR). On nous traite comme si nous n'étions pas des êtres humains: (nous devons) dormir sur le sol dégoutant", dénonce Mario, originaire du département de Santa Barbara (nord-ouest du Honduras).

Au moment même où Victor et Mario débarquaient de l'avion, Carlos Danilo Carbajal et Roger Quintanilla rejoignaient une caravane d'un millier de migrants au départ de San Pedro Sula.

"Au Honduras, c'est la crise et il y a beaucoup de délinquance. (Les dirigeants politiques) ne s'occupent que d'eux", se plaint Carlos, qui a travaillé de manière occasionnelle comme mécanicien automobile à Trujillo (côte caraïbe). "On ne trouve pas de travail, ou alors seulement pour un temps", déplore-t-il.

Roger, lui, a fui le Honduras pour ne pas être enrôlé par une des "maras" (bandes criminelles) qui font régner la violence et la terreur dans son pays. Il y a un mois, il était arrivé à entrer aux Etats-Unis mais il a été arrêté, et a été renvoyé au Honduras après 31 jours de détention.

"On était huit. On a été attrapés par la patrouille garde-frontière à El Paso, au Texas. On va recommencer", dit-il.

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