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Hong Kong: signes codés et boucliers maison, la prise du Parlement par les manifestants

Boucliers de fortune attachés aux poignets par des liens en plastique, chariot métallique converti en bélier pour défoncer les portes et signes codés de la main, les manifestants de Hong Kong ont déployé des trésors d'ingéniosité pour "prendre" le Parlement.

Depuis le début de la crise politique provoquée par un projet de loi autorisant les extraditions vers la Chine, les contestataires, jeunes pour la plupart, font feu de tout bois pour combattre les autorités locales proPékin.

Mais lundi, ils ont monté leur opération la plus coordonnée et audacieuse à ce jour en faisant irruption dans le bâtiment fortifié du Conseil législatif (LegCo, Parlement) après des heures de siège.

Le mouvement est sans leader, stratégie délibérée pour éviter le sort des meneurs jetés en prison ces dernières années. Les manifestants se réfèrent avec fierté à la philosophie de la star hongkongaise des arts martiaux Bruce Lee, selon qui il faut être fluide "comme l'eau" pour s'adapter et se montrer imprévisible.

Les réseaux sociaux ont joué un rôle essentiel dans la coordination des protestataires, qui ont mis au point des guides de signes de la main destinés à communiquer les besoins en équipements de protection.

Des mains jointes en triangle au dessus de la tête signifient que les manifestants en première ligne face aux policiers ont besoin de casques de chantier. D'autres signes appellent à fournir des parapluies et du cellophane pour se protéger du gaz au poivre. Il y a même un signal pour réclamer des médicaments pour l'asthme.

Les équipements rassemblés par les manifestants dans des "stations de ravitaillement" sont ensuite passés de main en main jusqu'à la ligne de front.

La police a annoncé mercredi l'arrestation lundi à l'aube d'un homme de 35 ans qui avait ce type de matériel dans sa camionnette.

- "Ciseaux et cutters" -

"Les officiers ont saisi un lot de ciseaux, de cutters, de clés hexagonales, de casques, de masques, de gants", a-t-elle dit.

D'après le South China Morning Post, la décision de partir à l'assaut du LegCo le jour anniversaire de la restitution de l'ancienne colonie britannique à la Chine, le 1er juillet 1997, a été prise à l'issue d'un vote de 200 contestataires parmi les plus radicaux.

Tosi Kwan, un enseignant de 29 ans, était de ceux qui aidaient à faire remonter les équipements vers les premières lignes avant l'assaut.

"Je ne suis pas trop certain du but ultime de ce soir", avait-il alors expliqué à l'AFP. "Peut-être que ceux qui sont sur la ligne de front en ont discuté, je ne sais pas. Mais en tant que résistants, nous devons nous soutenir les uns les autres".

L'enseignant ne voulait pas personnellement forcer les portes du Parlement mais disait comprendre qu'on puisse s'y résoudre, des années de manifestations pacifiques n'ayant débouché sur aucune réforme politique.

"De tels actes de résistance sont nécessaires. C'est évident, un défilé de deux millions de personnes n'a servi à rien", expliquait-il, en référence à une manifestation historique en juin.

Les contestataires ont réussi une première percée des vitres renforcées du LegCo en se servant comme bélier d'un chariot de vendeur des rues, rempli de débris divers choisis pour leur poids.

De l'autre côté de la vitre, des policiers anti-émeutes montaient la garde avec leurs boucliers, leur gaz au poivre et leurs masques à gaz.

- Aveugler les caméras -

Certains manifestants avaient confectionné des armures à l'aide de magazines et de protections en liège. L'un d'eux brandissait un bouclier orange vif découpé dans une valise en plastique. D'autres encore recouvraient de peinture les caméras de vidéo surveillance pour les aveugler.

Mais ce sont les piquets en acier arrachés sur des chantiers qui se sont révélés être les plus efficaces pour venir à bout du verre trempé du LegCo, permettant aux protestataires de percer des trous qu'ils élargissaient ensuite.

Les policiers se sont réfugiés dans un premier temps derrière un lourd rideau de fer mais quand les contestataires ont réussi à le soulever grâce aux mêmes piquets, les agents ont abandonné les lieux.

Une bonne partie du LegCo fut alors mise à sac par des manifestants qui ont tagué des grafitti et déployé le drapeau de l'ère coloniale britannique, ce qui ne les pas empêchés de laisser des mots demandant à laisser intacts les livres et antiquités.

"Préservez les objets culturels", "ne détruisez pas", disaient des messages déposés près d'une vitrine de présentation.

Un autre texte avait été collé sur un réfrigérateur contenant des boissons: "On est pas des voleurs. On ne prend pas sans demander".

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