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Il avait égorgé son ex-femme en public et devant leur fille de 10 ans: la vidéo des derniers instants de vie de la victime a suscité une onde de choc en Turquie

Le procès d'un homme accusé d'avoir tué son ex-femme sous les yeux de leur fille, un meurtre dont les images ont suscité une onde de choc dans le pays, s'est ouvert mercredi dans une ambiance tendue.

Emine Bulut, 38 ans, a été poignardée à mort en public dans un café à Kirikkale (centre) en août par Fedai Varan, 43 ans, dont elle avait divorcé quatre ans auparavant. La vidéo des derniers instants de la victime, criant "Je ne veux pas mourir" en tenant son cou ensanglanté, est devenue virale et a ravivé le débat sur les violences contre les femmes en Turquie.

A l'ouverture du procès à Kirikkale dans une salle d'audience archicomble, M. Varan a choisi de garder le silence, selon une correspondante de l'AFP. Il risque une peine d'emprisonnement à vie pour "meurtre prémédité avec circonstances aggravantes".

Après avoir été arrêté, il avait tenté de justifier son geste en affirmant à la police que Bulut l'avait "insulté".

La fille de Bulut, âgée de 10 ans, a témoigné par vidéo au procès, indiquant qu'elle et sa mère s'étaient rendues dans un poste de police pour porter plainte contre M. Varan, avant d'être retrouvées par celui-ci.

Présente au moment du meurtre, la fillette apparaît elle aussi dans la vidéo devenue virale. On l'y voit supplier sa mère grièvement blessée de tenir bon, répétant "S'il te plaît, ne meurs pas".


"Cet individu, cet homme n'est pas mon père", a dit la petite fille

Lorsque le juge lui a demandé si elle avait tenté d'arrêter son père, elle a répondu avoir "jeté son sac, sa tablette" sur l'homme sans parvenir à le stopper. L'enfant a ajouté : "Cet individu, cet homme n'est pas mon père" devant une salle où beaucoup ne sont pas parvenus à retenir leurs larmes.

En pleurs, la mère de Bulut, Fadime, a exigé que Varan écope de "la peine la plus lourde". "Comment peut-il dire qu'il est père après avoir fait ça ?", a-t-elle ajouté avant de s'effondrer.

L'audience a pris un tour chaotique lorsque la cour a passé la vidéo du meurtre, des proches de Bulut se précipitant sur l'accusé. La police a dû stopper l'audience et évacuer la salle.

Dans la foulée, le procès a été ajourné au 21 octobre.



Certaines se font tuer lorsqu'elles entreprennent de divorcer

Les violences contre les femmes sont un mal endémique en Turquie. Dans une société où de nombreux hommes ne les considèrent pas comme leurs égales, une procédure de divorce ou une plainte peut amener le partenaire violent à attaquer, voire tuer sa compagne. Des associations accusent la justice turque de prononcer des peines insuffisantes, dans certains cas, contre des accusés qui affirmaient avoir été "provoqués".

Un total de 354 femmes ont été tuées en Turquie au cours des neuf premiers mois de 2019, selon le groupe de défense des droits des femmes "Nous ferons cesser le féminicide". En 2018, ce chiffre s'est élevé à 440. En 2017, on en comptait 409, contre 121 en 2011.

La Turquie a ratifié la Convention d'Istanbul de 2011 du Conseil de l'Europe qui vise à faire diminuer les violences domestiques, et le pays s'est doté de lois contraignantes sur le sujet. Mais les associations réclament plus de fermeté de la part du gouvernement dans sa lutte contre le problème, ainsi qu'une plus stricte application des lois.

Elles soulignent notamment le manque de refuges pour les femmes dans le besoin, ainsi que la nécessité de s'attaquer au problème plus large des inégalités entre les sexes dans la société turque.

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