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Iran: le gouvernement "déterminé" à défendre les intérêts des entreprises françaises

Le gouvernement français a assuré mardi les entreprises tricolores entretenant des liens avec l'Iran de sa "détermination" à défendre leurs intérêts face aux menaces de sanctions américaines extraterritoriales.

Les ministres des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et de l'Économie Bruno Le Maire ont rencontré à Bercy les représentants d'une soixantaine d'entreprises françaises travaillant de loin ou de près avec la République islamique.

L'objectif? Faire le point avec elles sur la situation depuis l'annonce par Washington de son retrait de l'accord nucléaire iranien et le rétablissement de sanctions contre ce pays et des entreprises y œuvrant.

"Nous leur avons dit notre détermination à nous battre pour que les décisions prises par les États-Unis n'aient pas de répercussions sur les entreprises françaises qui investissent ou ont investi en Iran", a déclaré M. Le Drian lors d'un point presse, à l'issue de cette réunion.

"L'enjeu économique (...) n'est pas négligeable, car beaucoup d'entreprises dans le secteur aéronautique, dans le secteur pharmaceutique, dans le secteur énergétique, de l'automobile, ont investi de manière significative en Iran", a souligné pour sa part M. Le Maire. "Certains ont conclu de bonne foi des accords qui doivent être respectés", a-t-il estimé.

Depuis la signature de l'accord en 2015, les exportations tricolores vers l'Iran ont triplé, pour atteindre 1,5 milliard d'euros en 2017, de source diplomatique. Plusieurs grands groupes se sont lancés dans le pays, à l'image de Total qui s'est associé au groupe chinois CNPC pour investir 5 milliards de dollars dans l'exploitation du gisement South Pars, ou de PSA qui a signé de nouvelles co-entreprises pour ses marques Peugeot et Citroën.

Or, le rétablissement des sanctions américaines menace ces projets. Selon une source proche du gouvernement, le premier train de rétablissement de sanctions, fixé au 6 août, concernera l'automobile et l'aéronautique civile. Le 4 novembre suivront les sanctions sur le secteur de l'énergie et le secteur financier.

- "Au milieu du gué" -

Alors que les aiguilles tournent, M. Le Maire espère mener avec ses homologues allemand et britannique "des démarches conjointes auprès des autorités américaines pour demander des exemptions, des délais supplémentaires ou le respect des contrats qui ont été conclus de bonne foi par nos entreprises en Iran".

"On va défendre nos intérêts avec vigueur", a confirmé un représentant de l'Elysée devant l'association des journalistes économiques et financiers (Ajef).

"En tout cas, on doit permettre a minima une sortie ordonnée des entreprises qui le souhaitent du marché iranien" et créer "les conditions pour ceux qui souhaitent rester de pouvoir le faire", a-t-il ajouté.

Pour l'heure, les entreprises font preuve d'attentisme et restent discrètes. "Aujourd'hui, nous sommes un peu au milieu du gué, on attend de voir", a déclaré le président du Medef, Pierre Gattaz, lors de sa conférence de presse mensuelle.

"On a l'habitude de certains coups de poker, de certaines déclarations intempestives qui déstabilisent tout le monde et puis parfois ça rentre dans le rang", a-t-il observé.

Mais une chose est sûre: pour le patron des patrons, la solution doit être "politique et européenne". "C'est fondamental, l'Europe doit traiter ce sujet-là, je pense que la France toute seule ne pourra pas le traiter", a-t-il estimé.

Un point de vue que défend M. Le Maire, qui a répété mardi attendre de la Commission européenne des "décisions concrètes" pour faire respecter la souveraineté économique de l'UE.

Outre le renforcement du règlement de 1996 qui permet de contourner les sanctions extraterritoriales américaines pour l'étendre à l'Iran et "la création d'un Ofac européen" (Office de contrôle des actifs étrangers américains), "il faut que l'Europe se dote enfin d'un outil financier indépendant qui permette à nos entreprises de commercer librement là où l'Europe a décidé qu'il était nécessaire ou utile de commercer", a-t-il jugé.

Selon M. Le Maire, plusieurs possibilités se présentent: "Utiliser la Banque européenne d'investissement" dans laquelle il y aurait "un canal spécifique d'autonomie complète de financement" des entreprises européennes; "créer un instrument financier ad hoc"; et enfin "le recours aux Banques centrales".

"Ces trois possibilités doivent désormais être étudiées par la Commission européenne dans les jours qui viennent, de façon à garantir cette indépendance", a-t-il affirmé.

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