Accueil Actu

JO-2018 et dopage: il y a quatre ans à Sotchi, stéroïdes, flacons et trou de souris

Un cocktail de stéroïdes et des flacons d'urine qui passent par un trou de souris avant d'être échangés: il y a quatre ans, les jeux d'hiver de Sotchi ont été le théâtre de la plus grande triche de l'histoire du sport.

A l'hiver 2014, le système institutionnel de dopage en Russie, qui sera révélé par plusieurs rapports internationaux, est déjà bien installé. Au labo de Moscou, dirigé par le scientifique Grigory Rodchenkov, il s'est déjà traduit par des centaines de résultats positifs falsifiés et enregistrés comme négatifs dans la base de données de l'Agence mondiale antidopage (AMA), selon le rapport du juriste canadien Richard McLaren, mandaté par l'AMA.

Sur les bords de la mer Noire, à Sotchi pour les Jeux, impossible de reproduire un tel système sous les yeux d'observateurs internationaux. Mais "on est des tricheurs de haut vol", prévient Rodchenkov dans le film qui lui est consacré, Icare, de l'Américain Bryan Fogel.

A défaut de truquer les résultats, il a fallu truquer... les contrôles, à savoir le contenu même des échantillons, en se munissant en amont de l'urine "propre" des sportifs concernés par le programme.

Des échantillons vierges du cocktail de stéroïdes anabolisants préparé par le Dr Rodchenkov ont été conservés juste à côté du laboratoire antidopage de Sotchi dans un bâtiment des services secrets russes (FSB), a raconté le scientifique russe, d'abord âme damnée du système avant de se faire lanceur d'alerte depuis les Etats-Unis.

- Le FSB dans la boucle -

Alors que des caméras de video-surveillance étaient installées dans le bâtiment, occupé de surcroît par des experts antidopage du monde entier, les manipulations avaient lieu de nuit. Destinés à être analysés immédiatement, les échantillons A passaient, via un trou de souris, d'une salle à une autre où se trouvaient Rodchenkov et ses tours de passe-passe. Quant aux échantillons B, destinés à être ouverts en cas de contrôle anormal sur le A, ou à être conservés, ils étaient substitués par les officiers du FSB, a raconté Rodchenkov, dont le témoignage a été considéré comme crédible par le rapport McLaren puis par le rapport Schmid demandé par le CIO.

Restait un obstacle: comment ouvrir et refermer les flacons censés être inviolables, avec différents systèmes de sécurité, sans les briser ? Le FSB a mis une méthode au point, sans laisser de traces à l'oeil nu. Dans le 2e tome de son rapport, Richard McLaren indique que les 44 flacons B qu'il a pu faire examiner montrent des rayures et des marques trahissant leur altération.

Moscou a toujours réfuté l'existence d'un système de dopage d'Etat, tout en accusant Rodchenkov d'être le seul responsable des dérives du laboratoire de Moscou.

Le scandale a conduit le CIO à exclure la Russie des Jeux de Pyeongchang, mais a accepté une délégation de 169 compétiteurs sous l'appellation "Athlètes olympiques de Russie", qui seront 168 en Corée du Sud après le refus d'une patineuse de venir.

En revanche, sur 43 sportifs russes de Sotchi bannis à vie des JO par le CIO pour avoir bénéficié de ce système, 28 ont finalement été totalement blanchis par le Tribunal arbitral du sport (TAS) de Lausanne, un lourd désaveu pour le mouvement olympique et la lutte antidopage. Et la Russie a récupéré neuf des treize médailles qui lui avaient été retirées, ainsi que la première place au classement par pays de Sotchi-2014.

À lire aussi

Sélectionné pour vous