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JO-2018: "Le sport ne peut pas créer la paix" estime Bach dans un entretien à l'AFP

"Le sport ne peut pas créer la paix, c'est aux responsables politiques d'agir", a souligné Thomas Bach, président du Comité international olympique (CIO) dans un entretien accordé lundi à l'AFP à Pyeongchang, théâtre des JO-2018 d'hiver et d'un rapprochement spectaculaire entre les deux Corées.

Q: Qu'avez-vous ressenti lors du défilé commun des deux Corées ?

R: "C'était un moment chargé d'émotion. Certes, nous avions la déclaration de Lausanne du 20 janvier, sur la participation coréenne aux Jeux olympiques. Mais il y avait encore beaucoup de travail après ça. On s'est dit que l'on y croirait lorsqu'on verrait ce moment arriver, lorsqu'ils arriveront ensemble et entreront dans le stade. Il y avait beaucoup d'émotion lorsque nous avons vu ce moment se dérouler. Il y avait aussi beaucoup de joie de pouvoir envoyer ce message de compréhension, de paix. Ce message olympique de la Corée au monde. C'était particulièrement important que cela vienne de la péninsule coréenne, où on a connu cette forte tension politique".

Q: Mais il ne s'agit probablement que d'une trêve, d'une image...

R: "Le sport ne peut pas créer la paix, mais le sport peut bâtir des ponts, ouvrir des portes. Nous pouvons montrer qu'un dialogue peut nous amener à un résultat positif, comme nous l'avons montré ici via nos discussions et négociations pendant plusieurs années. C'est cela que l'on peut faire. Nous serons toujours très restreints aux aspects sportifs. Pour ce qui est du reste, c'est aux responsables politiques d'agir, c'est de leur ressort, d'utiliser cet élan pour mener leurs discussions. Du point de vue du CIO, ce dialogue se poursuivra, même après l'extinction de la flamme olympique. Nous avons 206 comités nationaux olympiques, nous sommes neutres politiquement, et nous essayons de traiter l'ensemble de ces 206 comités nationaux de la même façon, équitable".

Q: Etes-vous à l'aise avec la présence très visible des pom-pom girls nord-coréennes lors des épreuves ?

R: "Je n'ai pas de problèmes avec ça, parce que cela fait partie intégrante de l'accord inter-coréen, et le CIO n'était pas concerné par cet accord. Selon moi, chez les Coréens, ça a été bien accueilli, comme un signe de leur équipe unie. Le président sud-coréen m'a raconté qu'au short track, la situation s'est présentée où les pom-pom girls ont soutenu les sportifs sud-coréens. C'est un signe positif".

Q: La Russie a-t-elle vraiment une chance d'être réintégrée avant la fin de ces JO et de pouvoir défiler en clôture sous ses propres couleurs ?

R: "Ces questions ont été données à notre groupe de mise en application des décisions du 5 décembre. Il surveille cela et va présenter un rapport à la fin des Jeux olympiques devant le CIO, qui prendra je pense une décision à ce sujet".

Q: Le lanceur d'alerte Grigory Rodchenkov est apparu grimé lors une interview télévisée afin de ne pas être reconnu. Qu'en pensez-vous ?

R: "Nous avons auditionné M. Rodchenkov avec nos différentes commissions, via une affidavit (déclaration écrite sous serment). Devant le TAS, il a également témoigné. Ses témoignages ont joué un rôle important dans toutes nos décisions, et le CIO s'est réjoui à plusieurs reprises du fait qu'il ait ouvert le chemin pour révéler les faits. Il y avait aussi des preuves au-delà de ses déclarations, qui ont confirmé ce qu'il disait. Je ne connais pas sa situation personnelle. Ce que je sais c'est qu'il est dans le programme des témoins protégés du FBI, et je pense que c'est dans l'intérêt de tous qu'une personne ne reste pas trop longtemps dans un programme de protection des témoins".

Q: Avec le recul, avez-vous le sentiment d'avoir pris les bonnes décisions concernant la Russie?

R: "Nous avons vu que l'on avait besoin de preuves en plus à propos du rapport McLaren, puisque M. McLaren a toujours dit que ce n'était pas son mandat d'établir des infractions aux règles antidopage d'athlètes. Même avec les preuves en plus apportées par les commissions Oswald et Schmid, ou M. Rodchenkov, on n'a pas réussi dans 28 cas devant le TAS. Imaginons que l'on ait pris une décision à Rio, ou après le rapport final de M. McLaren en novembre 2016, on serait assis ici les mains vides. Une fois que l'on avait ces preuves, on a strictement suivi nos principes: on a sanctionné le système, avec la suspension du Comité olympique russe et nous avons protégé les sportifs propres."

Q: Les sauteurs à ski qui tremblent de froid, des horaires de nuit... Le CIO est-il allé trop loin avec les détenteurs de droits TV ?

R: "Ce n'est pas une décision du CIO, mais des fédérations internationales. Nous avons totalement confiance dans les responsables techniques, pour prendre les bonnes décisions dans l'intérêt des athlètes et d'une compétition équitable."

Q: L'assistance n'est pas très fournie, en dehors des sites couverts...

R: "J'étais dimanche au slopestyle, l'ambiance était grandiose et très décontractée, +cool+ comme ils disaient sur place. Il y avait une belle interaction entre les sportifs et le public. J'étais lundi au patinage artistique et là aussi, il y avait une bonne ambiance".

Q: La météo bouleverse le calendrier des JO. Etes-vous inquiets quant aux délais ?

R: "C'est trop tôt. On est en contact avec la Fédération internationale de ski et ils sont très à l'aise. C'est le début des Jeux, nous sommes un sport de plein air, ça se passe au début des Jeux, notre Coupe du monde (de ski) se passe de la même manière alors ne vous inquiétez pas, ça va bien se passer".

Propos recueillis par Thomas BACH (journaliste AFP au patronyme très exactement similaire à celui du président du CIO)

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