Accueil Actu

Journaliste et militante contre l'exclusion, Claire Hédon bientôt Défenseure des droits

"Pugnace", "indocile", mais aussi "à l'écoute": pressentie pour le poste de Défenseure des droits, la présidente de l'association de lutte contre l'exclusion ATD-Quart Monde, Claire Hédon, est décrite par le monde associatif comme une militante "déterminée", convaincue que la grande pauvreté est une violation des droits fondamentaux.

Cette journaliste de radio, âgée de 57 ans, est une "forte personnalité", dont "le grand sujet est la discrimination dont sont victimes les personnes pauvres", souligne Florent Guéguen, de la Fédération des acteurs de la solidarité (FNARS) - qui regroupe 870 associations et organismes de lutte contre l'exclusion.

Également membre du Conseil consultatif national d'éthique, Mme Hédon est "sincèrement révoltée contre les injustices et elle ne laisse rien passer", ajoute le responsable associatif, qui loue son combat contre la "pauvrophobie".

Sa nomination par l'Élysée, à la tête d'une institution qui s'est récemment muée en vigie des libertés publiques, doit encore être entérinée par le Parlement.

Claire Hédon est membre depuis 27 ans d'ATD-Quart monde, et préside à titre bénévole depuis cinq ans cette association qu'elle a découverte en 1992, à travers son métier de journaliste à Radio France Internationale (RFI), lors d'un reportage sur une bibliothèque de rue, dans un bidonville de Bangkok.

La radio publique - où elle travaille encore aujourd'hui, comme responsable des magazines - l'a amenée également à beaucoup voyager en Afrique francophone, pour l'émission "Priorité santé", dont elle a eu la charge de 2003 à 2017.

"Quand on fait des reportages pour RFI, on est amené à côtoyer la grande pauvreté, en Afrique et ailleurs. C'est une radio humaniste, où l'empathie pour la pluralité et la diversité fait partie de l'ADN maison", explique la journaliste Anne-Cécile Bras, qui loue par ailleurs la "rigueur" de sa collègue.

Pour Christophe Robert, de la Fondation Abbé-Pierre, la nomination de Mme Hédon "adresse un signal: la question des plus pauvres doit aussi trouver sa place dans la lutte contre les discriminations". "Car on peut être mis à l'écart parce qu'on est pauvre, ou qu'on habite à telle adresse", souligne-t-il.

- Pont entre deux mondes -

A la tête d'ATD-Quart Monde, Mme Hédon s'est d'ailleurs battue, en 2016, pour faire de la pauvreté - plus exactement de la "vulnérabilité économique" - un nouveau critère de discrimination, désormais sanctionné par la loi.

Pour le délégué national de l'association, Paul Maréchal, "elle a l'accès aux droits chevillé au corps. Elle refuse l'injustice et les préjugés". Sa nomination, poursuit-il, va contribuer à "faire admettre que la grande pauvreté, c'est une violation des droits fondamentaux".

Pour M. Maréchal, une des grandes qualités de la probable future Défenseure des droits est qu'elle "laisse les gens s'exprimer en profondeur" - "c'est sans doute son ancien travail de journaliste qui lui a appris ça", suppose-t-il - et "qu'elle sait être un pont, permettre la rencontre entre des mondes qui s'ignorent".

En septembre 2018, elle avait ainsi accueilli Emmanuel Macron dans un centre d'ATD-Quart Monde en Seine-Saint-Denis, où il s'était entretenu avec des personnes victimes de précarité.

"Elle a cette attention aux plus petits, aux plus pauvres", témoigne Vincent Espejo, qui a lui-même connu l'exclusion et siège aujourd'hui au conseil d'administration de l'association. "Elle est très à l'écoute des gens", renchérit son épouse Élodie. "Avec cette nomination, le mouvement perd une belle personne", sourit-elle.

Pour Paul Maréchal, Claire Hédon, au-delà de la situation des plus démunis, "va désormais devoir s'engager pour les droits de tous". "C'est tout le combat de notre association: si notre société réussit à faire que les plus exclus soient pris en compte, c'est toute la société qui grandit".

Si la nomination de Mme Hédon est confirmée, les travaux pratiques pourraient commencer rapidement. Celle qui succédera à Jacques Toubon devra être "très active sur les futures lois sur la dépendance", a souligné mercredi ce dernier, rappelant que l'institution s'apprêtait à rendre à l'automne une décision cadre sur les droits des personnes âgées en maisons de retraite.

À lire aussi

Sélectionné pour vous