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Kouriles: Poutine prédit encore un "travail de fourmi" avant un traité de paix avec Tokyo

Le président russe Vladimir Poutine a indiqué mardi après une rencontre avec le Premier ministre japonais Shinzo Abe qu'un "travail de fourmi" restait nécessaire avant la signature d'un traité de paix entre Moscou et Tokyo, bloqué depuis 1945 par un différend territorial dans les îles Kouriles.

Quatre îles volcaniques, appelées Kouriles du Sud par la Russie et Territoires du Nord par le Japon, ont été annexées par l'URSS à l'issue de la Seconde guerre mondiale, mais sont revendiquées par Tokyo depuis.

"Un travail de fourmi nous attend avant la signature de ce document (ce traité de paix) avec des conditions mutuellement acceptables", a estimé M. Poutine, saluant néanmoins un échange "utile" et se félicitant du développement des relations économiques entre Tokyo et Moscou.

"Nous avons donné des instructions pour que nos ministères des Affaires étrangères organisent en février un second round de négociations" sur les Kouriles, a pour sa part affirmé M. Abe, dans des propos traduits après sa rencontre avec le président russe.

Ce différend territorial a empêché jusqu'ici la conclusion d'un traité de paix entre les deux pays, même s'ils ont rétabli leurs relations diplomatiques en 1956.

"La résolution d'un problème qui dure depuis plus de 70 ans ne sera pas simple, mais nous devons le faire", a poursuivi Shinzo Abe.

"Il faut construire une confiance mutuelle (...] et pour cela il est nécessaire de développer des liens commerciaux et économiques, cela permettra de résoudre d'autres questions", a insisté devant la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Le conseiller du Kremlin, Iouri Ouchakov, avait déclaré s'attendre à des "négociations pas faciles" entre MM. Abe et Poutine.

Les tensions entre Moscou et Tokyo ont été alimentées notamment par une déclaration de Shinzo Abe lors de son allocution du Nouvel An. Il a évoqué la nécessité d'aider, selon lui, les résidents russes des Kouriles du Sud "à comprendre et accepter le fait que la souveraineté de leurs territoires allait changer".

- "Loin d'être partenaires" -

Cette déclaration a provoqué la colère de Moscou, qui a convoqué l'ambassadeur du Japon. La Russie accuse son voisin de "déformer" la teneur des accords entre Vladimir Poutine et Shinzo Abe et de vouloir "imposer son propre scénario".

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a pour sa part déclaré, lors de sa conférence de presse annuelle, que Moscou et Tokyo étaient "loin d'être partenaires, non seulement dans les relations internationales, mais également dans le fait de trouver des voies constructives pour améliorer nos relations".

L'opposant de gauche Sergueï Oudaltsov a affirmé sur Facebook qu'onze manifestants avaient été arrêtés mardi matin par la police lors d'un rassemblement près de l'ambassade du Japon à Moscou contre toute cession des îles disputées. Dimanche, plusieurs centaines de Russes avaient également manifesté contre cette possibilité.

Selon un sondage du centre indépendant Levada, 74% des Russes s'opposaient en décembre à la cession des îles. Pour l'analyste Dmitri Trenine, interrogé par le quotidien Vedomosti, la signature d'un traité de paix ne pourrait être soutenue que par "une large majorité de l'opinion en Russie et au Japon". Selon lui, le Kremlin doit réussir à montrer l'intérêt général d'un tel accord, ou perdre une opportunité de renforcer ses liens avec Tokyo.

En novembre, M. Poutine et M. Abe étaient convenus à Singapour d'accélérer les pourparlers sur la base d'une déclaration de 1956.

Cette déclaration prévoyait notamment que l'URSS s'engage à restituer les deux plus petites îles (Shikotan et Habomai) en échange de la conclusion d'un traité de paix. Or les négociations, fortement ralenties après la signature en 1960 d'un traité de coopération entre Tokyo et Washington, n'ont jamais abouti.

Stratégiques pour leurs minerais, leur poisson, et l'accès de la flotte russe au Pacifique, les quatre îles en question sont les plus méridionales de l'archipel des Kouriles, donc les plus proches du Japon.

Aujourd'hui, la position des autorités russes reste ferme: le Japon doit avant tout accepter les conséquences de la Seconde Guerre mondiale et il est hors de question qu'un changement de souveraineté sur ces îles soit à l'ordre du jour.

"C'est notre terre et personne n'a l'intention de la céder à qui que ce soit", a assuré la semaine dernière M. Ouchakov.

La signature d'un traité de paix est "un travail très méticuleux, très compliqué", a rappelé lundi Dmitri Peskov, soulignant que "personne ne va renoncer à ses intérêts nationaux".

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