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L'égyptomanie, histoire d'une fascination qui traverse les âges

C'est une passion qui éclot souvent en cours d'histoire ou dans les salles du Louvre. Imperméable aux effets de mode, l'Egypte antique ne cesse de fasciner le grand public comme la pop culture, accro aux pyramides, aux pharaons et aux momies.

Samedi démarre à Paris l'exposition événement Toutankhamon, avec 150 objets originaux issus du tombeau du célèbre pharaon.

"On m'a offert un livre, enfant. J'ai vu ces hiéroglyphes. Il fallait que je puisse moi aussi craquer le code. C'est devenu une véritable passion", confie Michel Dessoudeix, chimiste de formation et égyptophile de coeur, dont les travaux sont publiés chez Actes Sud.

Un intérêt partagé un temps au sein d'une association et aujourd'hui sur internet, via un forum réunissant près de 6.000 personnes. On y discute grammaire, cotes de pyramides et l'on s'informe des publications sur le sujet.

La civilisation égyptienne, "c'est fascinant parce que c'est différent mais il y a une base commune dans laquelle on peut se reconnaître", souligne-t-il. Et "le but de l'art égyptien est d'être reconnaissable. Il parle à tout le monde".

Et touche aussi l'enfant en nous, entre dieux à corps d'homme tête d'animal et alphabets à décrypter. "Le rapport à l'enfance est quelque chose de très important", confirme Jean-Marcel Humbert, spécialiste de l'égyptomanie, à laquelle il a consacré sa thèse.

"Les enfants, par exemple, sont passionnés par les momies, c'est entre la représentation du corps et le corps lui-même. Ils se font en quelque sorte leur cinéma", affirme l'expert qui a vu plus de 30 fois la grande exposition Toutankhamon de 1967 - qui avait alors réuni 1,2 millions de visiteurs à Paris - en tant qu'étudiant et conférencier.

Les histoires de trésors cachés et de savants-aventuriers à la Howard Carter (qui découvrit le tombeau de Toutankhamon en 1922) ont conforté un imaginaire déjà puissant.

Résultat: l'Egypte antique irrigue aussi bien la littérature jeunesse que la bande dessinée ("Les cigares du pharaon", "Astérix et Cléopâtre"), le cinéma ("Cléopâtre", "Indiana Jones", "La momie") ou le jeu vidéo ("Assassin's Creed").

- Passion française ? -

Cette fascination n'est pas neuve, elle "remonte déjà à l'Antiquité, avec les Romains qui les premiers ramènent des obélisques, puis ce sera avec la Renaissance qui à son tour s'approprie les formes égyptiennes", souligne M. Humbert.

"A chaque période, les gens trouvent quelque chose dans l'Egypte qui leur parle", que ce soit le rapport à la mort, la dimension ésotérique, l'architecture ou l'art...

Et par rapport à d'autres civilisations, elle a l'avantage d'avoir de nombreux monuments relativement bien préservés (pyramides de Gizeh, tombes de la Vallée des rois...).

Souvent qualifiée de "passion française", en référence à l'ouvrage de Robert Solé (1997), l'égyptophilie s'inscrit également dans une relation particulière entre les deux pays.

"La campagne de Bonaparte (1798-1801) était une mission militaire, avec à son bord des scientifiques et des artistes qui ont participé à une monumentale Description" de l'Egypte (10 volumes de textes et 13 de planches), rappelle Claire Somaglino, maître de conférence en égyptologie à la Sorbonne.

S'en est suivie une mode "égyptisante" qui a inspiré quelques années sculpteurs et architectes. Parmi les réalisations architecturales de ce style baptisé "retour d'Egypte", figurent notamment les sphinx de la place du Châtelet, à Paris.

Recyclées et transformées, les figures de l'Egypte antique vont peu à peu se mêler à d'autres courants artistiques, assurant leur pérennité jusqu'à nos jours.

Il y a aussi une "familiarité car on montre souvent les mêmes images: les dieux à tête humaine, les pyramides, les sphinx et Néfertiti", souligne l'universitaire Claire Somaglino.

Avide d’icônes, la pop culture s'est également emparée de Cléopâtre, femme de pouvoir à la beauté fatale et au sens politique aigu. Personnage fantasmé, la reine d'Egypte a donné naissance à plusieurs films dont celui avec Theda Bara en 1917 et celui avec Elizabeth Taylor en 1963, considéré comme un des films les plus chers de l'histoire.

Un intérêt non démenti puisque Sony prépare un remake aux Etats-Unis. Reste à trouver la reine. Selon les dernières rumeurs, Angelina Jolie et Lady Gaga tiendraient la corde.

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