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L'Inde prévoit de déchoir quatre millions de personnes de leur nationalité en Assam

L'Inde envisage de déchoir quatre millions de personnes de leur nationalité dans l'Etat d'Assam (nord-est), selon un projet controversé présenté lundi et qui est accusé de viser la minorité musulmane.

Les autorités, qui disent vouloir lutter contre l'immigration illégale depuis le Bangladesh voisin, ont présenté un projet de Registre national des citoyens (NRC).

Il recense les habitants de l'Etat d'Assam qui ont été capables de prouver que leur présence remontait à avant 1971, année où des millions de personnes s'y étaient réfugiées en provenance du Bangladesh en pleine guerre d'indépendance.

Des craintes se sont toutefois manifestées de voir les nationalistes hindous --l'Assam est gouverné depuis 2016 par le Bharatiya Janata Party (BJP) du Premier ministre Narendra Modi-- profiter de ce recensement pour s'en prendre à la minorité musulmane dans cet Etat.

Plus de 30 millions de personnes avaient demandé à figurer sur la liste. Mais un peu plus de quatre millions n'ont pas été retenues dans le projet de NRC, a déclaré lors d'une conférence de presse Shailesh, le chef de l'état-civil indien qui n'utilise qu'un seul nom.

"Aucun vrai Indien ne doit s'inquiéter parce que toutes les opportunités seront données d'inscrire son nom sur le NRC définitif", a-t-il dit à Guwahati, la plus grande ville de l'Etat.

Il a précisé que ceux qui ne figuraient pas sur la liste pouvaient faire appel selon "une procédure dûment établie" à partir du 30 août. La liste d'état-civil définitive doit être bouclée en décembre.

"Nous allons fournir une aide à quiconque ne figure pas dans la liste et souhaite formuler une réclamation à ce sujet", a-t-il ajouté.

- "Compliqué et injuste" -

L'Assam, dont le tiers de la population est musulman, est le seul Etat indien à établir un registre de citoyens.

Le gouvernement de l'Etat avait appelé en renfort 25.000 membres des forces de sécurité pour faire face à tout débordement. L'annonce de la liste a entraîné des incidents à la chambre haute du Parlement indien qui a ajourné ses travaux.

Des organisations de défense des droits de l'homme ont fustigé ce processus, estimant qu'il rappelait le sort tragique des Rohingyas, devenus la plus grande population apatride du monde après avoir été privés de leur nationalité birmane en 1982.

L'organisation Avaaz, un collectif basé aux Etats-Unis, a affirmé que les procédures d'appel étaient inefficaces et que les personnes déchues n'auraient pas le temps de former un recours.

"Ce ne sont que les musulmans qui vont devoir se lancer dans un appel compliqué et injuste, sans droit à un conseil, avec aucun espoir de rester s'ils perdent", a déclaré dans un communiqué Ricken Patel, le directeur général d'Avaaz.

A New Delhi, le ministre de l'Intérieur Rajnath Singh a tenté d'apaiser les craintes.

"Aucune action contrainte ne sera exercée contre quiconque", a-t-il dit au Parlement. "Il n'y a donc aucune raison de paniquer."

Satyen Garg, un responsable de son ministère présent à la conférence de presse a assuré qu'il n'était "pas question d'envoyer quiconque dans des camps de détention sur la base de la liste provisoire".

Les habitants de l'Assam doivent prouver que leurs ancêtres figuraient soit dans le précédent registre d'état-civil de l'Etat établi en 1951, soit sur une des listes électorales publiées avant le 24 mars 1971 --date de l'indépendance du Bangladesh.

Dans un projet initial publié en janvier, environ 13 millions de personnes vivant dans l'Assam avaient été exclues du registre de citoyenneté.

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