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La bataille du Premier ministre de l'archipel des Tuvalu, menacé par les flots

Sur le drapeau des Tuvalu, neuf étoiles jaunes, une pour chaque île de l'archipel du Pacifique. Mais deux des atolls sont déjà menacés de submersion, alerte le Premier ministre Kausea Natano qui se bat pour empêcher la disparition de l'identité de son pays.

Comme d'autres Etats insulaires du Pacifique, le petit archipel et ses 11.000 habitants font face à la montée du niveau des océans provoquée par le réchauffement de la planète, qui pourrait rendre leur territoire inhabitable.

Que se passera-t-il quand un Etat entier disparaîtra sous les flots? Quand toute sa population sera forcée à l'exil?

"C'est exactement l'idée derrière l'initiative Rising Nations: convaincre les membres de l'ONU de reconnaître notre nation, même si nous sommes submergés par les eaux, parce que c'est notre identité", explique à l'AFP le chef du gouvernement des Tuvalu en marge de l'Assemblée générale de l'ONU.

De vagues promesses et des messages de sympathie ne suffisent pas pour ces petits Etats du Pacifique qui ont lancé cette semaine à New York un appel à mettre en place un processus légal formel pour conserver leur statut d'Etat, même si le pire advenait.

- Situation terrible -

Ils réclament un engagement de la communauté internationale pour garantir leur souveraineté, la création d'une sorte de lieu de mémoire de leur héritage culturel qu'ils voudraient voir reconnaître comme patrimoine mondial de l'humanité, et la hausse des aides financières pour s'adapter aux impacts du changement climatique.

Parce que la situation est déjà terrible.

Ces "îles flottantes" ne sont pas vraiment accrochées à la terre ferme; les îlots coralliens sont posés au-dessus de "lentilles" d'eau douce, sorte de nappes phréatiques qui sont de plus en plus contaminées par l'eau salée de la mer qui s'élève.

Les populations sont ainsi de plus en plus dépendantes de l'eau de pluie pour boire et pour l'agriculture. Et les Tuvalu subissent une sécheresse qui dure depuis six mois.

"Nous avons mis en place des usines de désalinisation mais elles coûtent très cher et consomment énormément d'électricité", note Kausea Natano.

- "Notre héritage" -

L'archipel culmine à environ quatre mètres au-dessus du niveau de la mer, et d'autres parties du territoire atteignent à peine un peu plus d'un mètre, ouvrant les terres au risque de vagues-submersions qui ravagent les plantations de taro et manioc et rendent le sol salé.

Avec moins de 0,03% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ces îles du Pacifique sont parmi les moins responsables du changement climatique provoqué par les activités humaines, une injustice qu'elles ne cessent de souligner.

Et même si le monde parvenait à limiter le réchauffement à +1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle, objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris, cela pourrait ne pas être suffisant pour sauver certains Etats vulnérables comme les îles Marshall et Tuvalu.

Après le cyclone Pam en 2015, des habitants ont commencé à quitter le pays pour rejoindre la Nouvelle-Zélande, l'Australie et les Etats-Unis, se rappelle-t-il, mais les opportunités de départ sont aujourd'hui limitées par des règles migratoires renforcées.

"Même ceux qui partent n'en ont pas envie. Ils regardent juste leurs enfants et leurs petits-enfants et ils savent qu'ils doivent leur assurer un avenir", assure de toute façon le Premier ministre. "Aux Tuvalu, nous vivons en tant que communauté", poursuit-il, visiblement ému.

Son gouvernement a rejoint la bataille de nombreux pays en développement pour les "pertes et dommages", la compensation des dégâts subis par les plus vulnérables qui ne sont historiquement pas responsables du réchauffement. Mais cette question est l'une des plus brûlantes des négociations internationales sur le climat avant la COP27 en Egypte en novembre.

Kausea Natano espère malgré tout recevoir une aide suffisante pour que ses concitoyens puissent rester sur leurs terres et éviter de perdre leur identité.

"Quand vous êtes en Australie, vous devenez Australiens, pareil en Nouvelle-Zélande (...) Nous voulons rester dans notre pays, pratiquer notre culture et nos traditions, et préserver notre héritage".

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