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La Cour suprême, remaniée par Trump, entame une session potentiellement explosive

Droits des minorités sexuelles, des migrants, des femmes à avorter, des propriétaires d'armes à feu... La Cour suprême des Etats-Unis fait sa rentrée lundi avec une série de dossiers brûlants à traiter, qui auront valeur de test pour les juges nommés par Donald Trump.

L'an dernier, après la confirmation houleuse du magistrat Brett Kavanaugh, la Cour "a semblé faire tout ce qui était en son pouvoir pour s'élever au-dessus des rancœurs partisanes", a relevé David Cole, le directeur juridique de la puissante organisation de défense des droits civiques ACLU.

Pour la session 2019-2020, "ça va être plus dur: elle a beaucoup de sujets très clivants" à son calendrier, a-t-il noté.

La tâche sera d'autant plus délicate que ses décisions tomberont en plein débat pour la présidentielle de 2020. Si la haute cour, où les juges progressistes sont désormais minoritaires, semble favoriser les thèses conservatrices, elle pourrait devenir un enjeu de la campagne.

Plusieurs prétendants à la primaire démocrate ont déjà suggéré de la réformer, sans en faire une priorité pour l'instant.

Lors de la campagne de 2016, Donald Trump avait emporté l'adhésion des électeurs conservateurs, notamment évangéliques, en leur promettant de nommer à la Cour des juges opposés à l'avortement et partisans du droit au port d'armes.

Depuis son élection, il y a fait entrer Neil Gorsuch et Brett Kavanaugh. Si le premier a succédé à un juge tout aussi conservateur, le second a pris le siège d'un magistrat aux positions plus centristes, qui avait fait beaucoup pour les droits des homosexuels.

- "Viré le lundi" -

Le juge Kavanaugh a rejoint la haute juridiction il y a tout juste un an, après un processus de confirmation tumultueux, entaché par des accusations d'abus sexuels remontant à sa jeunesse. Dans les mois suivants, les neuf sages de la Cour se sont attachés à redorer le blason de leur institution.

Soucieux de paraître impartiaux, ils ont accordé des victoires à Donald Trump, notamment en matière migratoire, mais ils lui ont aussi infligé des revers, par exemple à propos du recensement de la population.

Alors que les dossiers explosifs s'empilaient, le temple du droit américain a repoussé au maximum le moment de s'en emparer. Il a finalement dû s'y résoudre fin juin et ils arrivent désormais pour discussions en audience publique.

Dès mardi, la cour se penchera sur les droits des employés homosexuels et transgenres. Elle devra répondre à la question suivante: le dispositif fédéral qui interdit les discriminations "sur la base du sexe" les protège-t-il?

Le gouvernement républicain soutient que non. Pour lui, les législateurs ne pensaient qu'aux discriminations homme/femme quand ils ont conçu ce dispositif et c'est à eux de le compléter, pas à la justice.

Les gays et les lesbiennes appellent la haute cour, qui a garanti leur droit au mariage en 2015, à franchir ce pas supplémentaire. A quoi sert de "se marier le samedi si on est viré le lundi?", interroge Jay Kaplan, un avocat de l'ACLU.

- "La Cour ne va pas bien" -

Le 12 novembre, la Cour suprême entendra les arguments dans un autre dossier très politique, celui des "dreamers", ces jeunes immigrés entrés illégalement sur le sol américain quand ils étaient enfants.

Elle devra dire si la décision de Donald Trump d'annuler un programme lancé en 2012 par son prédécesseur démocrate Barack Obama pour les protéger de l'expulsion était légal. Le sort d'1,8 million de jeunes est en jeu.

Aucune date n'a encore été fixée, mais la Cour reviendra en 2020 sur le droit à l'avortement, en se penchant sur une loi restrictive de Louisiane, quasi similaire à un texte texan qu'elle avait bloqué il y a trois ans.

Sa décision permettra donc de mesurer son évolution sur ce dossier qui divise profondément les Américains.

Le 2 décembre, la haute juridiction a aussi prévu de consacrer une audience au droit au port d'armes. Le dossier pourrait toutefois être déclaré caduc, la ville de New York ayant modifié cet été les réglementations au cœur du litige.

Dans cette affaire, des sénateurs démocrates ont demandé à la Cour de refermer le dossier pour éviter de rendre une décision potentiellement controversée. "La Cour ne va pas bien et les gens le savent. Peut-être devrait-elle se soigner elle-même plutôt que d'attendre que le public demande de la restructurer", ont-ils écrit dans une menace à peine voilée.

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