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La Papouasie appelée aux urnes, sous haute protection

Les élections législatives en Papouasie-Nouvelle-Guinée ont débuté lundi sous très haute protection, dans un pays où des millions de personnes vivent dans la pauvreté malgré de vastes ressources naturelles.

Quelques 10.000 membres des forces de l'ordre ont été mobilisés pour assurer la sécurité du scrutin sur cette île du Pacifique minée de longue date par la corruption et les homicides liés aux élections.

"Nous voulons la transparence, nous voulons la responsabilité et surtout nous voulons une période de scrutin sûre, juste et sécurisée", a déclaré le Premier ministre James Marape après avoir voté au premier jour du scrutin.

Annonçant peu après l'arrestation de son fils aîné, liée à la découverte d'une valise renfermant une importante somme d'argent, il a démenti que celui-ci ait joué un rôle dans le transport des fonds et a également récusé des rumeurs de financement politique illégal.

"Je n'ai jamais utilisé d'argent pour gagner des élections", a assuré James Marape aux journalistes. "Je veux simplement informer le pays: cela n'a rien à voir avec moi".

L'Australie, ancienne puissance coloniale du pays indépendant depuis près de cinquante ans, a envoyé plus de 130 militaires avec des moyens aériens pour participer à la sécurisation du processus électoral aux multiples défis.

En Papouasie, les rivalités électorales peuvent rapidement dégénérer en véritables bains de sang, en particulier dans les régions reculées et montagneuses. L'Université nationale d'Australie a répertorié plus de 200 morts liées aux élections lors du dernier scrutin en 2017 et de "graves irrégularités" à grande échelle.

Cette année, la police papoue a déjà recensé 15 morts en lien avec les élections.

M. Marape a reconnu dans son ultime message de campagne la persistance d'une "corruption latente dans toutes les strates du service public" et le manque de développement malgré les grandes richesses naturelles de l'île.

"Je reconnais qu'il y a encore beaucoup de choses à faire pour notre pays", a déclaré le Premier ministre et chef du parti Pangu.

Il affronte un adversaire de taille en la personne de son prédécesseur Peter O'Neill, contraint à la démission il y a trois ans, sous la pression de la rue dénonçant la corruption endémique et l'accusant d'avoir échoué à faire bénéficier la population des retombées des lucratives ressources minières du pays.

"Il y a des signes inquiétants autour de notre nation qui montrent que l'élection a été très mal préparée et que l'ingérence semble répandue", a dénoncé M. O'Neill.

M. O'Neill, du Parti du congrès national populaire, a été au pouvoir de 2011 à 2019. Il s'est engagé à attirer des investissements privés et à raviver l'exploitation industrielle des ressources du pays.

La Papouasie-Nouvelle-Guinée regorge de réserves de gaz, de pétrole, d'or et de cuivre et dispose également de productions forestières et agricoles.

- Résultats en août -

Le scrutin ouvert lundi peut durer jusqu'à dix-huit jours et les résultats ne devraient pas être arrêtés clairement avant le mois d'août.

Les analystes s'attendent à ce que le vainqueur doive s'atteler à bâtir un gouvernement de coalition, à partir d'un Parlement de 118 députés dans lequel les femmes espèrent regagner une place. Aucune d'elle n'y siégeait depuis 2017. Cette année, il y a 142 femmes parmi les quelque 3.500 candidats.

"Les élections sont toujours désordonnées et chaotiques. Elles peuvent devenir très violentes", a noté Jessica Collins, spécialiste du Pacifique au sein de l'Institut Lowy, un groupe de réflexion australien.

Les analystes relèvent également que les électeurs, dans un pays aux multiples ethnies parlant plus de 800 dialectes, sont moins intéressés par les sujets nationaux que par les avantages matériels que les candidats peuvent obtenir pour leurs communautés locales.

Pour compliquer un peu plus le processus, les listes électorales ne sont pas actualisées, selon Henry Ivarature, expert Pacifique de l'Université nationale d'Australie. "Par conséquent, toute l'intégrité même de cette élection est d'ores et déjà remise en question".

Le prochain gouvernement papou devra affronter des défis importants.

Près de 40% de la population vit en-dessous du seuil international de pauvreté, d'après le rapport 2020 de la Banque mondiale. Le pays n'a connu qu'une "faible reprise" en 2021 après avoir été durement frappé par la pandémie de Covid-19, selon la Banque asiatique de développement.

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