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USA: la Cour suprême semble prête à réinstaurer la peine de mort pour l'auteur de l'attentat de Boston

La Cour suprême des Etats-Unis a semblé mercredi favorable au rétablissement de la peine de mort pour l'auteur de l'attentat meurtrier du marathon de Boston en 2013, une affaire qui révèle les contradictions du président Joe Biden en matière de peine capitale.

Le gouvernement démocrate "a déclaré un moratoire sur les exécutions fédérales mais vous défendez la peine capitale" pour Djokhar Tsarnaev, a relevé pendant l'audience la magistrate conservatrice Amy Coney Barrett.

"Si vous gagnez, il sera condamné à vivre sous la menace d'une peine de mort que le gouvernement n'a pas l'intention d'appliquer", a-t-elle poursuivi à l'adresse du représentant du ministère de la Justice. "J'ai du mal à comprendre l'objectif".

"Nous demandons que soit respectée la décision raisonnée" des jurés qui ont imposé la peine de mort parce qu'"avec son frère, il a tué et mutilé des centaines d'innocents", s'est contenté de répondre Eric Feigin sans entrer dans le débat politique.

En 2013, Djokhar Tsarnaev, un jeune étudiant d'origine tchétchène, avait posé avec son frère aîné Tamerlan deux bombes artisanales près de la ligne d'arrivée du marathon de Boston, faisant trois morts, dont un enfant de huit ans, et 264 blessés.

Identifiés grâce à des caméras de surveillance, les deux frères avaient pris la fuite, tuant un policier lors de leur cavale. Trois jours après l'attentat, l'aîné avait été abattu lors d'une confrontation avec les forces de l'ordre.

Djokhar Tsarnaev avait été retrouvé blessé, caché dans un bateau. Il avait écrit sur une paroi qu'il voulait venger les musulmans tués en Irak et en Afghanistan.

- "Méritée" -

Lors de son procès en 2015 à Boston, ses avocats avait affirmé que le jeune homme, âgé de 19 ans à l'époque (28 ans aujourd'hui), était sous l'influence de son aîné auto-radicalisé. Sans nier la gravité des faits, ils avaient plaidé pour la réclusion à perpétuité.

Les jurés n'avaient pas été convaincus et avaient opté pour la peine de mort.

En 2020, une cour fédérale d'appel a conservé le verdict de culpabilité mais annulé la peine de mort en citant deux irrégularités.

Pour elle, dans ce dossier très médiatisé, il aurait fallu interroger les jurés potentiels sur ce qu'ils avaient lu ou vu au moment de l'attentat, afin d'écarter ceux ayant déjà forgé leur opinion.

De même, avait-elle jugé, le tribunal a eu tort de rejeter une demande de la défense qui voulait évoquer un triple meurtre remontant à 2011, probablement commis par l'aîné des Tsarnaev, comme preuve de son caractère de meneur.

Même si cette décision permettait de garder Djokhar Tsarnev en prison à vie, elle avait été vivement critiquée par Donald Trump, qui était alors président. Fervent partisan de la peine de mort, il avait demandé à son gouvernement de saisir la Cour suprême.

Une fois à la Maison Blanche, Joe Biden aurait pu retirer cette requête mais il l'a laissé suivre son cours. Pendant sa campagne, le démocrate avait pourtant promis de travailler pour abolir la peine de mort au niveau fédéral.

- "Meurtre sordide" -

Lors de l'audience mercredi, les échanges se sont concentrés sur le triple meurtre de 2011.

"Le tribunal a refusé d'admettre des éléments relatifs à un meurtre sordide dans lequel Tamerlan semble avoir exercé une grande influence sur un complice", ce qui étayait l'argument central de la défense, a relevé Elena Kagan.

Comme elle, les autres juges progressistes ont semblé juger que cela justifiait d'annuler la peine capitale.

Mais leurs collègues conservateurs, qui disposent d'une solide majorité, n'ont pas paru convaincus. Pour eux, il existe des doutes sur l'implication réelle de Tamerlan dans le crime et en parler risquait de créer "un mini-procès dans le procès".

Quant à la sélection des jurés, "il aurait été totalement approprié de leur demander" quelle information les avait marqués, a déclaré la juge progressiste Sonia Sotomayor, en évoquant l'énorme médiatisation du drame.

Mais pour le représentant du gouvernement "le jury a rendu un verdict nuancé pas sur la base de la publicité avant le procès, mais sur les preuves", à commencer par une vidéo où l'on voit Djokhar Tsarnaev "séparé de son frère", placer son sac à dos empli d'une bombe "derrière un groupe d'enfants".

"Si ce n'est pas quelqu'un qui savait exactement où la bombe allait exploser, je ne sais pas ce que c'est", a-t-il lancé en guise de conclusion.

La Cour suprême doit rendre sa décision avant la fin juin 2022.

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