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Le gel des biens vénézuéliens aux Etats-Unis précipitera-t-il la chute de Maduro?

Les Etats-Unis ont renforcé la pression sur Nicolas Maduro en gelant totalement les biens du gouvernement vénézuélien aux Etats-Unis et en limitant sa marge de manoeuvre commerciale. Voici quelques clés pour comprendre l'impact d'une telle décision.

- Qu'est-ce que cela implique économiquement? -

Toute entreprise commerçant avec le gouvernement vénézuélien pourra être sanctionnée, bien que soient exclues les transactions qui concernent des aliments, du matériel agricole, des médicaments, du matériel hospitalier et les vêtements.

Citgo, filiale de l'entreprise pétrolière publique PDVSA et principal actif de Caracas aux Etats-Unis, a déjà fait l'objet d'un embargo pétrolier en avril. Les comptes bancaires et les représentations diplomatiques ont déjà été saisis.

Les précédentes sanctions visaient donc déjà le pétrole vénézuélien, quasiment la seule source de revenus pour l'Etat, et avait écarté ce pays du système financier américain.

Ces nouvelles mesures "essayer de fermer les dernières soupapes d'oxygène que le gouvernement avait mis en place pour survivre", déclare à l'AFP Asdrubal Oliveros, directeur du cabinet Ecoanalitica.

Selon les experts, Maduro est en train de passer par la Russie pour vendre le pétrole en contournant les précédentes sanctions.

Au Venezuela, tous les voyants économiques sont au rouge vif: la production de pétrole s'est effondrée, passant en dix ans de 3,2 millions à 1 million de barils par jour, tandis que le FMI prévoit une contraction du PIB de 35% cette année et une inflation à 7 chiffres (1.000.000%).

"Le secteur privé non associé au gouvernement pourrait également voir ses opération affectées, dans la mesure où les banques n'auront pas la capacité de savoir qui soutient ou non Maduro", ajoute Oliveros.

- Et pour les citoyens? -

Sont également épargnées par les sanctions les "remesas" ou sommes d'argent expédiées au Venezuela par les migrants (3,3 millions de Vénézuéliens ont fui la crise depuis le début 2016), qui devraient s'élever à 3 milliards de dollars en 2019, selon Ecoanalitica.

Mais l'accès aux biens et services devrait rester limité dans ce pays où le salaire minimum est d'à peine 5 dollars, les allocations publiques réduites à néant par l'inflation et la production nationale ne parvient qu'à fournir 25% de la demande.

Les importations de l'Etat, qui s'élevaient en 2013 à 57 milliards de dollars, ont chuté cette années à 8 milliards, selon Ecoanalitica, affectant aussi les entreprises privées.

- Est-ce un embargo à la cubaine? -

Non, répond à l'AFP l'expert en relations internationales Mariano de Alba. "A Cuba, tout type d'exportation américaine a été interdit", explique-t-il à propos de l'embargo en vigueur depuis 1962 sur l'île communiste.

A la différence de Cuba, ajoute l'expert, les particuliers vénézuéliens vont pouvoir continuer à négocier avec des entreprises américaines, même si beaucoup préféreront s'abstenir pour ne pas être sanctionnées.

Le chef de la diplomatie vénézuélienne Jorge Arreaza prévoit des conséquences sur l'importation d'aliments et de matériel destiné au secteur électrique, contrôlé par l'Etat et victime ces dernières semaines de pannes fréquentes. "On ne pourrait pas payer" les prestataires de services, a-t-il admis.

- Les pourparlers sont-ils impactés?

Non, selon les porte-parole du gouvernement et le propre chef de l'opposition Juan Guaido, reconnu comme président par intérim par plus d'une cinquantaine de pays.

Vendredi, les deux camps se sont engagés à trouver une solution "constitutionnelle" à la crise vénézuélienne.

- Maduro chutera-t-il?

Malgré la nouvelle offensive de l'administration Trump, Nicolas Maduro semble bien accroché au pouvoir, avec le soutien des militaires, de la Russie, la Chine, l'Iran et Cuba.

"Il est improbable que les sanctions aboutissent à un changement de gouvernement mais elles doivent permettre de réduire sensiblement ses capacités", juge Diego Moya-Ocampos, de l'Institut IHS Markit à Londres.

L'option militaire américaine reste "sur la table" mais la proximité des élections aux Etats-Unis, prévues dans 14 mois, ne va pas dans ce sens.

Pour Trump, la "stratégie est de miser sur un retournement de l'armée", estime Mariano de Alba, soulignant que les sanctions prévoient un traitement de faveur pour ceux qui tourneront le dos à Maduro.

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