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Le gouvernement dévoile ses mesures pour tenir sa "promesse" d'intégration des étrangers

Doublement des heures de français, réforme de la formation civique et meilleur accès à l'emploi: le gouvernement a annoncé mardi des mesures attendues, quoique non chiffrées, en faveur de l'intégration des étrangers, censées contrebalancer une politique ferme contre l'immigration irrégulière.

"Cette politique d'intégration, c'est un sujet essentiel, d'intérêt, de dignité pour l'ensemble de la nation française", a affirmé Edouard Philippe à l'issue d'un comité interministériel à Matignon réunissant entre autres Gérard Collomb (Intérieur), Jean-Michel Blanquer (Education) ou encore Agnès Buzyn (Santé).

Après avoir présenté un visage intraitable lors de l'examen et du vote de la controversée loi asile-immigration, il s'agit donc d'offrir le pendant humaniste alors que la France constate "les retards, l'absence de la promesse octroyée par la République" et le "manque d'ambition" en matière d'intégration, dixit le Premier ministre.

Loin d'y voir une opposition, le chef du gouvernement a souligné combien la qualité de la politique d'intégration "est au cœur de l'équilibre général de notre politique d'immigration et d'asile". Le sujet est sensible dans l'opinion, et au cœur des préoccupations européennes, alors que le nouveau gouvernement italien a usé d'un discours anti-immigration pour accéder au pouvoir.

Reprenant quelques mesures de l'ambitieux rapport confié au député LREM Aurélien Taché et remis en février, Edouard Philippe a sans surprise annoncé le doublement du nombre d'heures de cours de français proposées aux étrangers s'installant légalement en France, pour atteindre 400 voire 600 heures -- ce qui alignerait la France sur l'Allemagne, souvent citée comme modèle.

Si le montant de l'enveloppe globale n'a pas été dévoilé - les lignes budgétaires de chaque ministère sont en cours d'arbitrage, explique-t-on à Matignon - cette seule mesure pourrait coûter 52 millions d'euros, selon un document que l'AFP a pu consulter. Selon différentes sources, l'effort total pourrait se situer entre 100 et 200 millions d'euros par an.

"Nous considérons tous ici qu'il ne peut y avoir d'intégration réussie sans une maîtrise minimale et effective de la langue", a insisté M. Philippe. Sur 103.000 Contrats d'intégration républicaine (CIR) dispensés en 2017, quelque 55.000 personnes étaient en formation linguistique.

- "Lever les freins" à l'emploi -

La formation civique, souvent jugée indigeste, sera réformée et étalée sur 24 heures au lieu de 12 actuellement, a ajouté le Premier ministre, en martelant qu'en matière de valeurs républicaines, "leur respect n'est pas une option mais une obligation".

Garde d'enfants pour les jeunes parents pendant les cours de langue, accès au +Pass culture+ pour les jeunes... Edouard Philippe a rappelé que donner les moyens de l'intégration est un enjeu "de cohésion sociale et nationale".

"Il faut concentrer les moyens au tout début du parcours d'intégration", notamment dans le CIR proposé aux primo-arrivants, qui "inclura désormais une dimension professionnelle", a-t-il ajouté. Il s'agit de "lever les différents freins qui bloquent l'accès à l'emploi", alors que selon l'OCDE le taux d'emploi atteint 35% seulement chez les immigrés arrivés il y a moins de cinq ans.

Cette "refonte" est "indispensable pour réparer ce qui n'a pas marché en termes d'intégration par le passé", a affirmé dans un communiqué M. Collomb, tandis que M. Taché saluait une "impulsion inédite et bienvenue".

"On change de braquet" même si "ça ne va jamais assez loin", a-t-il dit devant des journalistes, "on se donne les moyens de faire de l'intégration une priorité politique".

Mais du côté des associations Jean-Claude Mas, de la Cimade, a regretté "une reprise a minima du rapport" Taché, en déplorant notamment que le plan "n'évoque rien sur le logement alors que c'est un des sujets centraux". Illustration de cette difficulté, la semaine dernière à Paris, 10% du millier de migrants évacués du campement du "Millénaire" étaient des réfugiés.

"On s'étonne un peu de la concordance des calendriers, à la veille de l'examen par le Sénat du projet de loi asile-immigration", a déclaré à l'AFP M. Mas, tandis que Florent Guéguen, de la Fédération des acteurs de la solidarité, estimait que ce catalogue de mesures "ne rééquilibre pas le durcissement des politiques à l'égard des primo-arrivants et de tous ceux qui n'obtiendront pas l'asile".

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