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Le ministre Bill Barr, bouclier de Trump et fer de lance conservateur

Sous son air patelin, le ministre américain de la Justice Bill Barr s'est imposé en dix mois au gouvernement comme l'un des plus solides défenseurs de Donald Trump et de la droite ultra-conservatrice.

Défense de la peine de mort, des institutions religieuses contre les minorités sexuelles, d'une lecture extensive des pouvoirs présidentiels... le juriste de 69 ans a affiché ces dernières semaines son mépris pour les valeurs des "prétendus progressistes".

A son arrivée à la tête du ministère en février, cet homme calme, au ton bonhomme, jouissait d'une image assez lisse. Sa première expérience à ce poste, au début des années 1990, était perçue comme un gage de sérieux dans une administration qui compte de nombreux novices en politique.

Mais ce relatif consensus a volé en éclat et Bill Barr s'est vite retrouvé affublé du surnom d'"avocat du président" pour sa défense sans faille de Donald Trump.

Cette semaine encore, il n'a pas hésité à contredire sa propre administration pour soutenir une théorie développée par le milliardaire républicain.

Ce dernier répète en boucle que le FBI a ouvert une enquête sur de possibles liens entre Moscou et son équipe de campagne en 2016 pour des raisons politiques.

Lundi, l'inspecteur général du ministère de la Justice a conclu que la police fédérale avait de bonnes raisons d'initier ces investigations, et pas d'arrière-pensée politique.

Balayant son rapport, Bill Barr a jugé que le FBI avait fondé sa décision sur des bases "fragiles". "Avec le recul", elles n'étaient "pas suffisantes", a-t-il martelé mardi, en évoquant une possible "mauvaise foi" de certains agents.

"En tant que leader d'une institution qui est censée être dévouée à la vérité, Barr doit arrêter de se comporter comme le porte-parole de Trump", a commenté l'ancien patron du FBI, James Comey.

- "Ordre moral" -

Pour ses partisans, ce natif de New York, diplômé de la prestigieuse université Columbia, ne défend pas Donald Trump, mais la fonction présidentielle.

En novembre à Washington, il a réconcilié les deux approches: "en lançant une guerre de la terre brûlée, sans aucune retenue, contre cette administration, la gauche s'est engagée dans une attaque systématique des normes et de l'Etat de Droit", a-t-il lancé devant un parterre de juristes conservateurs.

Jamais il n'a cité l'enquête en destitution ouverte par les démocrates contre Donald Trump, mais il a regretté que le président soit soumis à un "harcèlement constant".

En octobre, un autre de ses discours a marqué les esprits.

Devant les étudiants d'une université catholique, Bill Barr a déploré un déclin des valeurs religieuses aux Etats-Unis. "La campagne pour détruire l'ordre moral traditionnel a coïncidé et, je pense, apporté d'immenses souffrances et misères", a assuré ce fervent catholique.

"Parmi les militants laïcs, il y a beaucoup de prétendus progressistes. Mais où est le progrès ?", a poursuivi le ministre, dont les services soutiennent régulièrement des institutions religieuses poursuivies en justice par des homosexuels.

- "Trop vieux" -

Début décembre, le ministre a provoqué un autre tollé en déclarant que les Américains devaient manifester davantage de "soutien et de respect" envers les forces de l'ordre. Sinon "ils risquent de se retrouver sans la protection de la police..."

Cette phrase a été perçue comme une menace voilée aux communautés afro-américaines qui s'élèvent contre les violences policières envers les Noirs. "La police est au service des communautés et pas l'inverse", a souligné la puissante association de défense des droits civiques ACLU.

Vendredi, la Cour suprême des Etats-Unis lui a infligé à son tour un revers, en refusant de le laisser outrepasser les vétos des tribunaux pour reprendre les exécutions fédérales, interrompues depuis 16 ans.

Ses discours et ses politiques en ont fait une bête noire de la gauche, mais Bill Barr semble inébranlable.

Mardi, dans un entretien avec le Wall Street Journal, il a suggéré une explication à son indifférence. Pour lui, il n'y a que deux moments dans la vie pour être ministre de la Justice: "quand on est trop jeune pour connaître le risque, ou quand on est trop vieux pour y prêter attention".

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