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Le nouveau président catalan entre en fonctions, premier choc avec Madrid

Le nouveau président de la région Catalogne, l'indépendantiste Quim Torra, a pris ses fonctions jeudi à Barcelone sans jurer de respecter la Constitution espagnole mais seulement la "volonté du peuple catalan".

Près de sept mois après la vaine proclamation d'une "république catalane" suivie de la destitution par Madrid du dirigeant Carles Puigdemont, les indépendantistes ont ainsi récupéré la présidence régionale.

Mais ils ont organisé une cérémonie expédiée en quelques minutes et quasiment sans invités,, à laquelle aucun représentant du gouvernement central n'a assisté.

Dans la région encore sous tutelle de Madrid, les indépendantistes avaient uniquement accepté la présence d'un représentant "de second rang" du gouvernement espagnol de Mariano Rajoy. Madrid a alors décidé de n'envoyer personne.

Membre de l'aile dure du mouvement indépendantiste, M. Torra ne s'est engagé à respecter ni la Constitution, ni le statut de la Catalogne qui règle les attributions de la région autonome.

Il s'est limité à promettre de "remplir loyalement ses obligations (...) en étant fidèle à la volonté du peuple de Catalogne, représenté par le Parlement de Catalogne", dominé par les séparatistes.

Le ministre des Affaires étrangères, Alfonso Dastis, a critiqué cette cérémonie "en catimini", comme si Torra "était un président de second rang".

Quim Torra -- éditeur de 55 ans, nouveau venu en politique -- se considère comme un "président en exercice" en attendant le retour de celui qu'il désigne comme "le président légitime en exil", Carles Puigdemont.

Après son élection lundi par le parlement régional, où il avait promis de "construire un Etat indépendant", il s'était rendu auprès de M. Puigdemont à Berlin.

M. Torra a par ailleurs été très critiqué pour des écrits passés offensants envers "les Espagnols", qu'il avait sommés de "partir une fois pour toutes".

Il doit désormais former son gouvernement, condition à la levée de la tutelle exercée par Madrid depuis la tentative de sécession du 27 octobre.

Mais il voudrait y inclure d'anciens membres de l'exécutif destitué qui se trouvent actuellement en détention provisoire.

Si le gouvernement espagnol considère cela comme illégal, il pourrait décider de maintenir le contrôle sur la région.

Il y est poussé par le parti libéral Ciudadanos, qui menace la suprématie du parti conservateur de M. Rajoy aux élections régionales et municipales de 2019.

- Rajoy tiraillé -

Reçu jeudi par M. Rajoy, le dirigeant de Ciudadanos, Albert Rivera, lui a demandé non seulement de ne pas lever la tutelle sur la Catalogne mais de l'étendre. Il a par exemple préconisé de prendre le contrôle des médias publics catalans, qu'il a accusés de "propagande séparatiste".

"Ce n'est pas le moment de la contemplation ni des bons sentiments, c'est le moment d'agir", a lancé M. Rivera.

Mais Rajoy a urgemment besoin que la situation en Catalogne se normalise. Il lui faut les voix du Parti nationaliste basque (PNV) pour voter la semaine prochaine le budget 2018, or ce dernier s'oppose à toute tutelle sur les régions autonomes.

Le chef du gouvernement espagnol s'est engagé à maintenir un contrôle étatique étroit sur les finances publiques catalanes, tout en affirmant être disposé à dialoguer avec M. Torra, "dans le cadre de la loi".

Parallèlement, 25 élus et personnalités indépendantistes sont poursuivis en justice pour "rébellion" et d'autres délits présumés.

Neuf sont en prison. Sept se sont installés à l'étranger.

Mercredi, la justice belge a refusé d'extrader trois ex-"ministres" régionaux de M. Puigdemont, en raison d'un vice de forme dans la demande de Madrid.

Les indépendantistes espèrent à présent que la justice allemande refusera aussi de remettre M. Puigdemont à l'Espagne, qui veut le juger pour "rébellion".

Il s'agit d'un délit très grave - pour lequel M. Puigdemont risquerait 25 ans de prison - et qui suppose qu'il y ait eu en Catalogne un "soulèvement violent", ce que de nombreux juristes mettent en question.

Cependant dans une décision rendue jeudi, la Cour suprême n'a pas exclu que l'inculpation de rébellion soit abandonnée au profit de celle de "sédition", passible de peines moins lourdes.

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