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Les juifs francophones d'Israël se recueillent à la mémoire de Mireille Knoll

Des dizaines de membres de la communauté francophone d'Israël ont allumé mercredi des bougies à la mémoire de Mireille Knoll, une octogénaire juive assassinée en France, et entonné les hymnes israélien et français sur la place de Paris à Jérusalem.

La mort de Mireille Knoll, la violence du crime et la trajectoire d'une femme ayant fui Paris en 1942 pour échapper à la Shoah et y mourant 76 ans plus tard, a suscité l'émotion en Israël, pays né au lendemain de l'Holocauste, et dans sa communauté juive francophone.

Sabrina Moïse, 44 ans, ceinte d'un drapeau israélien frappé de l'étoile de David, dit avoir été bouleversée par les posts des petites-filles de la victime sur les réseaux sociaux, et avoir spontanément appelé au rassemblement.

"Cette femme qui échappe à ses bourreaux alors qu'elle était une enfant et qui tombe sous les coups d'un autre bourreau", cette grand-mère "aurait pu être la mienne", dit-elle.

Environ 80 personnes, pour bon nombre des juifs d'origine française ayant fait le choix de vivre en Israël, ont répondu à son appel sur la place de Paris, au centre de Jérusalem.

Passant du français à l'hébreu, ils ont exprimé leur chagrin, mais aussi leur inquiétude ou leur révolte à voir une femme mourir "parce qu'elle était juive".

- Engagement français "clair" -

Les policiers français privilégient la piste d'un vol ayant mal tourné. Mais la justice a retenu le caractère antisémite du crime après que l'un des inculpés eut accusé l'autre d'avoir crié "Allah Akbar" lors du meurtre.

Comme les autres, Sabrina Moïse "adore la France". Mais elle s'émeut que "la France ne (soit) plus sûre pour les juifs, du fait de l'antisémitisme galopant", dit-elle.

Peu de rancoeur contre l'Etat français. La mort de Mme Knoll n'a pas suscité le même ressentiment que le meurtre, un an plus tôt à Paris, de Sarah Halimi, quand la juge avait retenu le caractère antisémite environ un an après.

Avant même l'inculpation de deux hommes pour homicide involontaire à caractère antisémite, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian en visite à Jérusalem déclarait lundi "plausible" la qualification antisémite. A ses côtés, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a salué l'engagement "clair" des gouvernements français successifs contre l'antisémitisme.

On est loin des crispations de 2015 quand, après la tuerie de la supérette Hyper Cacher à Paris, M. Netanyahu lançait aux juifs de France: "votre avenir est ici".

Le meurtre de Mme Knoll est de nature à conforter un sentiment répandu en Israël que les juifs sont en danger en Europe.

"Il n'y a pas un antisémitisme d'Etat (en France), mais un ennemi qu'on ne veut pas nommer, et cet ennemi, c'est l'islamisme radical", lance Laly Derai, 42 ans, l'une des participantes au rassemblement.

- Le choix du départ -

"70 ans après le drame de la déportation et de l'assassinat de ses juifs, la France ne s'est toujours pas libérée de son antisémitisme purulent", éditorialisait dans le quotidien Haaretz le journaliste Sefy Hendler.

A lui et à d'autres n'échappait pas cependant la simultanéité avec les attaques dans le sud de la France. L'assassinat du colonel Arnaud Beltrame, tué par un jihadiste, a suscité les expressions de sympathie en Israël.

"Il y a un véritable problème de l'islamisme radical en France qui touche les juifs, mais pas seulement eux", analyse Emmanuel Navon, universitaire connaisseur de la France.

Si par le passé, il y a eu des tentatives israéliennes de récupération, le gouvernement français, à la différence d'autres gouvernements européens, passe pour "irréprochable" sur l'antisémitisme, dit-il.

Paris s'est beaucoup employé à expliquer à Israël le sérieux de son action. L'un des marqueurs attentivement observés est l'aliyah (littéralement la montée) de France, l'émigration vers Israël, dont l'insécurité ne peut être considérée comme seul facteur.

Avec plus de 7.000 personnes, elle a battu des records en 2014 et 2015, la France devenant le premier pays d'émigration vers Israël pour la première fois depuis la création d'Israël en 1948. Le mouvement s'est ralenti depuis.

Place de Paris, Sabrina Moïse "n'encourage rien ni personne" à quitter la France par crainte de l'antisémitisme. L'aliyah doit être une adhésion, dit-elle, "pas un choix par défaut".

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