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Liban: Saad Hariri, Premier ministre devenu rassembleur pragmatique

Le Premier ministre libanais Saad Hariri, reconduit jeudi à son poste et fils du milliardaire et dirigeant Rafic Hariri assassiné en 2005, s'est résolu à afficher une image d'unité après avoir longtemps été un virulent opposant au Hezbollah et à ses alliés syrien et iranien.

Agé de 48 ans, cet homme corpulent et souriant, le visage mangé par une barbe grisonnante, est né en Arabie saoudite, où son père avait fait fortune.

Il était à la tête du géant de la construction Oger --aujourd'hui criblé de dettes-- quand la famille lui demande en avril 2005 de reprendre le flambeau politique et dirigea une première fois le gouvernement de 2009 à 2011. Celui-ci est contraint à la démission après le retrait des ministres du mouvement chiite Hezbollah et de ses alliés du cabinet.

En novembre 2016, il était revenu au pouvoir avec l'objectif de rétablir sa prééminence au sein de la communauté musulmane sunnite et faire contrepoids au Hezbollah, auquel il a été confronté durant toute sa carrière politique.

Mais il n'a pas réussi à dompter le puissant mouvement, seule formation libanaise à avoir gardé ses armes après la fin de la guerre civile (1975-1990).

Le 4 novembre dernier, à la surprise générale, ce protégé de l'Arabie saoudite avait annoncé sa démission depuis Ryad, accusant le Hezbollah et l'Iran de "mainmise" sur le Liban.

"Je sens que ma vie est visée", s'était-il justifié, affirmant que le Liban vivait une situation similaire à celle qui prévalait avant l'assassinat en février 2005 de son père Rafic Hariri, ex-Premier-ministre et opposant à Damas, dans un attentat à Beyrouth.

Près de trois semaines après cette annonce qui avait pris de court le pays et l'ensemble de sa classe politique, M. Hariri était rentré au Liban sous les vivats. Il avait finalement renoncé à démissionner, au terme d'un feuilleton ayant vu une vaste mobilisation populaire et diplomatique --notamment de la France.

Le coup de force de Ryad a paradoxalement poussé M. Hariri à afficher une image d'unité pour éviter un nouveau séisme politique dans ce pays traditionnellement divisé, en passant d'une confrontation ouverte avec la Syrie et le Hezbollah à une position plus pragmatique.

- "Mollesse" -

Saad Hariri accuse le régime syrien d'avoir planifié le meurtre de son père et avait demandé en 2005 le départ des troupes syriennes du Liban. A l'inverse, le Hezbollah, dont cinq membres sont accusés d'implication dans l'assassinat de Rafic Hariri, appuie sans réserve la Syrie.

Les troupes syriennes finissent par se retirer du Liban en avril 2005 après 29 ans de présence, et dans la foulée, le courant hostile à la Syrie, dont M. Hariri prend la tête, gagne les législatives.

En 2008, des affrontements entre les partisans du leader sunnite et ceux du parti chiite ont failli plonger le pays dans une nouvelle guerre civile.

Le Courant du Futur, formé en 2007 et dirigé par Saad Hariri, l'emporte à nouveau aux législatives de 2009.

M. Hariri devient alors Premier ministre et forme un gouvernement d'union qui rend l'âme début 2011 après la démission des ministres du camp du Hezbollah. Saad Hariri avait ensuite quitté le Liban avant d'y revenir en juin 2016.

Pour reprendre la main, il provoque en octobre 2016 un coup de théâtre en annonçant son soutien à son contempteur, Michel Aoun, élu ensuite président de la République. Il est nommé Premier ministre le 3 novembre 2016.

Face au Hezbollah et à l'Iran, autre allié de poids de Damas, Saad Hariri se fait l'avocat inlassable de l'Arabie saoudite, rivale de l'Iran et adversaire de M. Assad.

Outre ses déboires financiers, il fait face à une contestation de sa prééminence dans les rangs sunnites au Liban, certains l'accusant de "mollesse" face au Hezbollah.

Licencié en économie de l'université américaine de Georgetown (Washington), Saad Hariri, qui possède également la nationalité saoudienne, est marié à une Syrienne, Lara Bachir Azm, dont la famille avait exercé le pouvoir en Syrie dans les années 1950.

Le couple a trois enfants, dont deux vivent avec leur mère en Arabie saoudite, tandis que l'aîné étudie en Grande-Bretagne.

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