Accueil Actu

Même dans les sous-sols de la Ghouta en Syrie, la mort rattrape les civils

Dans la Ghouta orientale, Abou Mohamed observe des secouristes syriens retirer des décombres un corps, puis un deuxième, craignant de reconnaître sa fille parmi les victimes. Les frappes du régime sur l'enclave rebelle ont baissé en intensité, mais chaque jour de nouveaux cadavres sont retrouvés.

"Elle était avec son mari dans le sous-sol. Jusqu'à maintenant, on n'a pas retrouvé ma fille", raconte le sexagénaire, observant les secouristes perchés sur les ruines d'un immeuble de la petite localité de Hazeh située dans l'enclave contrôlée par les rebelles dans la vaste région de la Ghouta orientale.

Dans ce fief proche de Damas, le régime a lancé le 18 février une campagne aérienne d'une rare intensité dans laquelle plus de 600 civils ont été tués, dont 147 enfants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Et pour échapper au déluge de feu, qui fait tomber comme des châteaux de cartes des immeubles résidentiels de plusieurs étages, les habitants vivent terrés dans des caves et abris souterrains de fortune.

Mais même là, la mort les rattrape.

Dans Hazeh, une frappe aérienne a touché le 20 février un bâtiment, dont une partie s'est entièrement effondrée sur les sous-sols, où 21 personnes s'étaient réfugiées.

"J'étais venu pour prendre des nouvelles de ma fille (...) Et j'ai trouvé l'immeuble écroulé", lâche Abou Mohamed, qui craint le pire.

- Pas de refuge -

Depuis le raid destructeur du 20 février, les Casques blancs, ces secouristes en secteur rebelle, s'activent chaque jour pour retirer des corps, une partie du visage souvent couverte par une écharpe pour échapper à l'odeur des cadavres, coincés sous les gravats depuis plus d'une semaine.

Le bruit d'un avion se fait entendre, d'abord lointain, puis se rapprochant progressivement. Les secouristes ne cachent pas leur anxiété. "C'est un avion syrien", lance l'un d'eux.

Ces deux derniers jours les bombardements sur l'enclave rebelle ont baissé d'intensité après l'annonce par la Russie, alliée du régime de Bachar al-Assad, de la mise en place à partir de mardi d'une trêve humanitaire quotidienne de cinq heures dans cette région.

Profitant de cette pause, les secouristes continuent de fouiller dans les décombres de l'immeuble quasi-détruit à Hazeh.

"Selon les habitants, il y avait dans cet abri 21 personnes", dit à l'AFP l'un d'eux, Mohamed, 27 ans. "On a réussi ces derniers jours à sortir six personnes. Les opérations se poursuivent pour retrouver le reste des corps".

Il dégage à l'aide d'un sceau les débris, espérant ainsi élargir le passage pour parvenir au reste des victimes.

"Il y a eu de nombreux massacres dans les sous-sols", dit Ali Bakr, 29 ans, un habitant de Hazeh qui se tient non loin de là. "Les gens s'y réfugient pour se protéger des frappes, mais même là, ils ne trouvent pas la sécurité".

- 'Folie' destructrice -

Dans la pièce d'un immeuble voisin ravagé par les raids, le corps d'un enfant gît enveloppé dans un tissu beige. Les secouristes le couvrent d'un linceul.

Le corps d'un deuxième enfant est retrouvé sous les décombres, transporté dans une couverture verte, et disposé au côté du premier. Les mains croisées sur le ventre, Abou Mahmoud et deux autres hommes prient pour l'âme des deux victimes, qui seront ensuite enterrées.

L'enclave d'une centaine de kilomètres carrés tenue par les insurgés dans la région de la Ghouta orientale constitue le dernier bastion rebelle aux portes de Damas.

Le régime, qui cherche à reprendre coûte que coûte cette enclave d'où des obus sont tirés sur Damas, contrôle les deux-tiers de la région agricole.

"A Hazeh, plusieurs immeubles se sont écroulés, et des familles entières se sont retrouvées sous les décombres, sans que les secouristes ne réussissent à sortir les corps, en raison de la violence des bombardements", admet un porte-parole des Casques blancs, Siraj Mahmoud.

"C'est de la folie, tout est détruit", lâche-t-il.

À lire aussi

Sélectionné pour vous