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Migrants mineurs: une amende requise contre Eric Zemmour pour ses "propos outrageants"

Des "propos méprisants, outrageants", et "un rejet violent" de la population immigrée. Le parquet a requis mercredi 10.000 euros d'amende, avec possibilité d'emprisonnement en cas de non paiement, à l'encontre du polémiste d'extrême droite Eric Zemmour, jugé en son absence pour ses propos controversés sur les migrants mineurs isolés.

La décision du tribunal a été mise en délibéré et sera rendue le 17 janvier.

"Les limites de la liberté d'expression ont été franchies", et Eric Zemmour s'est rendu coupable de provocation à la haine et injure raciale, a estimé la procureure Manon Adam, demandant "100 jours amende à 100 euros" en condamnation.

Au début de ses réquisitions, elle a relu une grande partie des propos reprochés au candidat putatif à la présidentielle et habitué des procédures judiciaires.

Lors d'un débat sur les mineurs isolés sur CNews le 29 septembre 2020, après un attentat devant les ex-locaux de Charlie Hebdo, Eric Zemmour affirme: "Ils n'ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c'est tout ce qu'ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu'ils viennent".

"Tous les mineurs isolés ne sont pas des violeurs" tempère ensuite, sur demande de la présentatrice, celui qui était alors le chroniqueur star de l'émission "Face à l'info". "Mais la responsabilité de la France et du gouvernement c'est de ne pas prendre le risque (...) Dans le doute il ne faut laisser rentrer personne".

"Pas tous", tente la présentatrice. "Tous, ils n'ont rien à faire ici", vocifère Eric Zemmour. "C'est une invasion permanente", "c'est un problème de politique d'immigration".

"Ce n'est pas un accident de langage, il persiste et signe", constate la procureure dans ses réquisitions. "Sous couvert de parler des mineurs, il vise la population immigrée", contre laquelle il semble avoir "une détestation très forte".

Les expressions utilisées "synthétisent les mécanismes de la haine", il use "du lexique de la guerre", parle "d'invasion, de conquête", avance-t-elle. Il fonctionne par "généralisations, un procédé classique du racisme", ajoute-t-elle, souhaitant "insister" sur le danger de la "banalisation du discours d'un ennemi commun".

- "Tac-au-tac" -

"Ces émissions c'est tac-au-tac" et M. Zemmour "essaie de développer une thèse", a répondu dans sa plaidoirie l'avocat du polémiste. "Sa thèse, c'est qu'il ne faut aucune immigration", c'est une position politique", assure Me Olivier Pardo.

"Il n'y a pas une once de racisme chez Eric Zemmour" qui ne fait que dire "la réalité", parfois de "manière brutale, avec ses mots", soutient-il.

Il a demandé la relaxe, estimant que la citation pour provocation à la haine raciale ne se tenait pas: "Les mineurs isolés ne sont ni une race, ni une nation, ni une ethnie".

Contre le directeur de publication de la chaîne d'information CNews, jugé au côté d'Eric Zemmour comme c'est l'usage dans les procès de presse, la procureure a requis 5.000 euros d'amende.

Dans leurs plaidoiries, plusieurs parties civiles avaient insisté sur la responsabilité de la chaîne d'information, dont le "discours de haine" est "le fond de commerce". "On sait ce que ça va déraper et on y va", résume Me Apolline Cagnat.

"On essaie de faire croire que ces audiences sont liées au statut de candidat putatif de M. Zemmour", dit Dominique Sopo, président de SOS Racisme à la barre, mais les associations anti-racistes ont "assez peu" l'habitude de poursuivre les candidats à la présidentielle, note-t-il.

Au total, une trentaine d'entre elles sont constituées, dont les associations SOS Racisme, la Ligue des droits de l'Homme (LDH) et la Licra, ainsi qu'une vingtaine de conseils départementaux - les mineurs non accompagnés étant pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, gérée par les départements.

"Nous sommes aujourd'hui objectivement dans un moment d'hégémonie de la pensée raciste", lance Me Arié Alimi, avocat de la LDH, qui rappelle la multiplication de projets d'actions violentes de groupes d'extrême droite ces dernières années.

Les prises de position d'Eric Zemmour, 63 ans, lui ont valu depuis une dizaine d'années une quinzaine de poursuites en justice. Plusieurs fois relaxé, il a été condamné à deux reprises pour provocation à la haine.

L'ancien journaliste a été contraint à la mi-septembre de quitter l'émission phare de CNews à cause de ses ambitions présidentielles pour 2022. Il ne s'est encore pas déclaré candidat mais, selon des sources proches, il devrait le faire avant un premier meeting de campagne envisagé début décembre.

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