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Mondial de rugby: après la victoire de l'Uruguay, l'émotion des survivants des Andes

L'exploit de l'équipe d'Uruguay qui a battu les Fidji au Mondial de rugby est le résultat d'un mélange de passion et d'esprit de rébellion, estiment deux anciens joueurs du petit pays sud-américain, survivants il y a un demi-siècle de la tragédie des Andes, incroyable épopée de survie humaine.

"Personne, vraiment personne, ne croyait que l'Uruguay pourrait gagner, et pourtant ils ont gagné. Dans la Cordillère des Andes, c'était pareil", se remémore avec émotion Roy Harley. Cet ancien membre de l'équipe universitaire des Old Christians de Montevideo se trouvait avec ses équipiers à bord de l'avion qui, le 13 octobre 1972, s'écrasait dans les Andes, aux confins de l'Argentine et du Chili.

"Le rugby est très prévisible" quand il y a des différences de niveau entre les équipes, c'est pour cela que "ce qu'a réalisé l'Uruguay a été impressionnant", raconte à l'AFP l'ancien joueur, aujourd'hui âgé de 67 ans.

"Les Uruguayens y ont mis de la passion et ont abordé le jeu d'une manière qui a surpris le monde entier", ajoute-t-il.

Il suffit de voir "comment les Uruguayens chantent l'hymne national. Ils ont l'amour du maillot, avec l'envie de gagner", estime de son côté Carlos Paez, un autre des 16 survivants du vol fatidique qui s'était abîmé avec 45 personnes à bord.

Los Teros, équipe composée pour moitié d'amateurs et semi-professionnels, ont terrassé les Fidji (30-27) mercredi au Japon. C'était seulement leur troisième victoire en Coupe du monde et la première depuis 2003.

Jamais ils n'avaient battu un adversaire d'un tel calibre capable de rivaliser dans un bon jour avec les meilleures nations du jeu.

L'histoire des "survivants des Andes", qui ont passé 72 jours dans la neige et ont eu recours à l'anthropophagie pour rester en vie, a été racontée des milliers de fois, donnant lieu à des livres, documentaires et un long métrage.

- "Sortir victorieux" -

Quand ils évoquent la victoire de l'équipe uruguayenne, les deux survivants n'hésitent pas à tracer des parallèles avec leur propre histoire, faite de ténacité et de sacrifices: quand les recherches pour retrouver l'avion ont cessé, les survivants ont refusé de s'avouer vaincus.

"Nous étions des jeunes de 20 ans qui se retrouvaient à 4.000 mètres d'altitude. Et tout ce qui a été organisé, mis en place, la façon dont les règles édictées ont été respectées, l'ordre, tout ça, c'était le rugby", "un jeu d'attaque" dans lequel "il faut avancer", résume Roy Harley.

Dans la Cordillère des Andes "les premiers jours, nous attendions l'aide de l'extérieur". "Puis un jour, en écoutant la petite radio de l'avion que j'avais réparée, nous avons entendu une information que je n'oublierai jamais. Elle disait: +Aujourd'hui, 23 octobre, sont suspendues toutes les recherches lancées pour retrouver l'avion uruguayen disparu dans la Cordillère des Andes+".

"Nous étions considérés comme morts. Nous avons d'abord ressenti de la colère, puis un sentiment de rébellion. Nous allions leur montrer qui nous étions et nous allions sortir victorieux" de cette épreuve, se souvient le sexagénaire, en évoquant l'état d'esprit du groupe de survivants.

Avant le match de mercredi, Los Teros étaient "considérés par tous comme déjà morts", mais ils se sont dits "on va montrer au monde qui nous sommes", souligne-t-il.

Dans un pays de 3,4 millions d'habitants où le football est roi, pourvoyeur d'innombrables stars mondiales, le rugby est pratiqué de façon plus modeste. Selon la fédération uruguayenne, 10.000 joueurs sont inscrits, dont 6.000, de toutes catégories, participent à des compétitions les week-ends.

"Personne ne savait ce qu'était le rugby" à la fin des années 60, se souvient Carlos Paez. "Après ce qui nous est arrivé, le rugby est devenu notre histoire et a grandi encore plus". Maintenant, les bons résultats des Teros "vont aider le rugby en Uruguay", veut-il croire.

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