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Moscou accuse Londres et Washington de l'empoisonnement de Skripal

La Russie a accusé mercredi les services spéciaux britanniques et américains de l'empoisonnement de l'ex-agent double russe Sergueï Skripal et sommé les Occidentaux de dialoguer, plutôt que de la punir, pour éviter une nouvelle crise des missiles de Cuba.

Mise en cause par des Occidentaux en rang serré, Moscou a convoqué une réunion de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) à la Haye mercredi pour exiger des réponses sur les accusations la visant.

Le président Vladimir Poutine, qui a dénoncé une "campagne antirusse", a dit espérer que cette rencontre mettra "le point final"à cette affaire qui a porté la confrontation Est-Ouest à son pire niveau depuis la Guerre froide et abouti à une vague historique d'expulsions réciproques de diplomates.

La Russie, qui clame son innocence depuis le début, s'estime renforcée par les déclarations du laboratoire britannique ayant analysé la substance utilisée contre l'ex-espion, empoisonné avec sa fille Ioulia à l'aide d'un agent innervant le 4 mars en Angleterre. Ce dernier a reconnu ne pas avoir de preuve qu'elle provenait de Russie, poussant le Kremlin à sommer Londres de lui "présenter des excuses".

Haussant le ton, le chef du renseignement extérieur russe, Sergueï Narychkine, a affirmé mercredi que l'affaire Skripal avait été "grossièrement fabriquée par les services spéciaux de Grande-Bretagne et des Etats-Unis". Il a appelé à renoncer à recourir à la force dans les relations internationales, afin de ne pas amener la situation jusqu'à une nouvelle crise de Cuba, qui avait placé les États-Unis et l'URSS au bord d'une confrontation nucléaire en 1962.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov avait déjà affirmé lundi que l'empoisonnement "pouvait être dans l'intérêt du gouvernement britannique" pour détourner l'attention du Brexit au sein de la population du pays.

- 'Tactique de diversion' -

Faute d'excuses, Moscou espère des éclaircissements sur les accusations britanniques lors de la réunion des 41 membres de l'OIAC, qui se tient dans un bâtiment sous haute protection.

"Cette initiative russe est une nouvelle tactique de diversion, destinée à saper le travail de l'OIAC" dans son enquête, a réagi le ministère britannique des Affaires étrangères dans un communiqué.

L'OIAC avait été sollicitée par Londres pour "vérifier l'analyse du gouvernement" britannique. Ses experts se sont rendus au Royaume-Uni pour obtenir des échantillons de la substance utilisée lors de l'empoisonnement, qui doivent être analysés dans des laboratoires internationaux indépendants.

L'ambassadeur russe aux Pays-Bas, Alexandre Choulguine, est arrivé peu avant le début de la réunion dans les locaux de l'OIAC.

Une source diplomatique occidentale interrogée par l'AFP a qualifié la réunion de manière pour Moscou de "poser plein de questions pour détourner l'attention", prévoyant "un étalage de mauvaise foi".

A la veille de cette réunion, le laboratoire britannique qui a analysé la substance utilisée contre Sergueï Skripal et sa fille a reconnu mardi ne pas être en mesure de déterminer sa provenance, qu'elle a cependant identifié comme du Novitchok, un agent innervant de type militaire dont l'origine serait un laboratoire soviétique.

Le laboratoire a relevé que la fabrication de la substance nécessitait "des méthodes extrêmement complexes" qui ne pouvait être à disposition que d'un "acteur étatique".

Vladimir Poutine a relevé qu'une substance comme celle utilisée à Salisbury contre Sergueï Skripal pouvait être fabriquée "dans une vingtaine de pays du monde".

Le gouvernement britannique a rapidement réagi en déclarant que les recherches menées à Porton Down ne constituaient "qu'une partie du renseignement" à sa disposition.

Sergueï Skripal, 66 ans, et sa fille Ioulia, 33 ans, étaient toujours hospitalisés mardi. L'état de santé de cette dernière "s'améliore rapidement", elle "n'est plus dans un état critique", contrairement à son père, qui est dans un état "stable", selon l'hôpital.

Ancien colonel du service de renseignement de l'armée russe (GRU), Sergueï Skripal avait été condamné par Moscou pour "haute trahison" en 2006 avant de faire l'objet d'un échange d'espions en 2010. Il s'était alors installé en Angleterre.

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