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Prison à vie requise contre Nemmouche, pour qui "la vie continue"

Dernier jour de procès, ultime provocation : "la vie continue", a ironisé lundi, sourire en coin, Mehdi Nemmouche, contre qui venait d'être requis la prison à vie pour quatre "assassinats terroristes" commis en mai 2014 au musée juif de Bruxelles.

Après ces mots, les seuls prononcés lundi par le jihadiste français, reconnu coupable jeudi dernier de ces assassinats, les 12 jurés et les trois magistrats professionnels de la cour d'assises se sont retirés pour délibérer sur sa peine.

Le verdict, qui n'est pas susceptible d'appel, est attendu dans la soirée.

"Ce qu'on vous demande, sans la moindre hésitation, c'est de condamner Mehdi Nemmouche à la réclusion à perpétuité", a déclaré dans la matinée l'avocat général Yves Moreau, ne trouvant "aucune circonstance atténuante" à un accusé qualifié de "psychopathe".

"M. Nemmouche, vous n'êtes qu'un lâche, vous tuez des gens en leur tirant dessus par derrière, vous tuez des dames âgées en leur tirant dessus à l'arme de guerre, vous tuez car cela vous fait plaisir de tuer et parce que vous savez que vous ne prenez aucun risque", a-t-il lancé au Français, rasé de près, le regard parfois dans le vide.

Son avocat Me Sébastien Courtoy a, lui, demandé au jury d'éviter "une mort lente" à son client et de le condamner à "35 ans, plus 10 ans". "Et à 75 ans il pourra revenir dans le monde des vivants", a-t-il dit.

- "Fils de pute né" -

L'avocat général a par ailleurs requis une peine de "30 ans minimum" à l'encontre du coaccusé de Nemmouche, Nacer Bendrer, désigné jeudi comme "coauteur" de la tuerie pour lui avoir fourni les armes.

"J'ai vraiment honte d'avoir croisé ce mec (Nemmouche, ndlr)", a déclaré Bendrer, réclamant la clémence. "C'est même pas un mec, c'est un monstre, un fils de pute né."

Jeudi dernier, après deux jours et demi de délibérations, les 12 jurés avaient estimé que Mehdi Nemmouche, 33 ans, et Nacer Bendrer, 30 ans, étaient tous deux auteurs de la tuerie.

Le premier, un délinquant multirécidiviste radicalisé en prison et passé par la Syrie, a été reconnu coupable d'avoir abattu de sang-froid, le 24 mai 2014 au Musée juif, les Israéliens Miriam et Emmanuel Riva, 53 et 54 ans, ainsi qu'un employé belge de 26 ans, Alexandre Strens, et une bénévole française de 66 ans, Dominique Sabrier.

Il a "tué froidement, gratuitement, quatre êtres humains", a rappelé l'avocat général. "Je crois qu'on a touché l’extrême de l’extrême en terme de gravité."

Concernant Bendrer, le jury a souligné l'"aide indispensable" concrétisée par la remise des armes et des munitions, sans laquelle Nemmouche n'aurait pu exécuter son quadruple assassinat.

Au procès, ouvert le 10 janvier, Nacer Bendrer a reconnu que Mehdi Nemmouche lui avait demandé une Kalachnikov début avril 2014. Mais il a affirmé n'avoir pas donné suite. Sans convaincre les jurés.

Il "n'a pas le sang des victimes directement sur les mains, même s'il est éclaboussé de ce sang de la tête au pied", a estimé le procureur.

Me Gilles Vanderbeck, avocat du Marseillais, a réclamé une peine ne dépassant pas 15 ans de réclusion, estimant que le "doux" Bendrer ne pouvait être assimilé à un Nemmouche "froid, cynique, glacial".

- "Carabistouilles" -

Nacer Bendrer purge déjà une peine de cinq ans de prison en France pour une tentative d'extorsion de fonds dans le milieu marseillais du narcobanditisme.

Jeudi, la cour avait dit "écarter" la thèse des avocats de Nemmouche, qui l'avait décrit comme la victime d'un "piège" tendu par de supposés agents des services iraniens ou libanais pour lui faire porter la responsabilité de la tuerie.

"Des carabistouilles !", a répondu lundi l'un des représentants du parquet.

"Si vous nous dites aujourd'hui qu'en Belgique, on peut être un terroriste sans être condamné très sévèrement, alors il ne faudra pas s'étonner de voir des gens débarquer chez nous avec des bombes ou des armes de guerre dans leurs valises", a aussi insisté M. Moreau.

Le verdict de culpabilité retient les preuves de l'enquête accablant Nemmouche, comme son ADN ou ses empreintes sur les armes, ou encore les vidéos de revendication.

Me Michèle Hirsch, représentant une partie civile, a insisté sur l'importance du témoignage au procès des deux journalistes otages en Syrie ayant reconnu en Nemmouche un de leurs geôliers.

Le récit de cette séquestration (qui fait l'objet d'une procédure distincte en France) a permis de montrer, selon l'avocate, que Nemmouche "n'était pas un loup solitaire" mais appartenait à "la même meute" que les auteurs des attentats de 2015-2016 revendiqués par l'EI.

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