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New York joue la pédagogie et garde ses hommages contestés à Colomb et Pétain

La statue de Christophe Colomb au sommet d'une colonne à l'entrée de Central Park pourra finalement rester en place, ainsi qu'une plaque célébrant le maréchal Pétain vainqueur de Verdun: c'est ce qu'a décidé une commission formée par le maire de New York pour décider du sort d'une série de monuments controversés.

Après les violences néo-nazies de Charlottesville, et le débat électrique autour des symboles de racisme qui avait suivi, le maire démocrate Bill de Blasio avait nommé en août cette commission pour passer en revue tous les "signes de haine" présents dans la première ville américaine.

Son verdict est tombé vendredi, et laisse la plupart des monuments de la première ville américaine en place. A commencer par la statue de Christophe Colomb érigée en 1892 pour le 400e anniversaire de la "découverte" de l'Amérique, au sommet d'une colonne de 23 mètres de haut sur Columbus Circle, la place au sud-ouest de Central Park.

L'explorateur gênois est de plus en plus dénoncé comme l'incarnation du génocide des Amérindiens et des indigènes en général. Au point que de nombreuses villes américaines --mais pas New York-- ont remplacé ces dernières années la célébration traditionnelle de "Columbus Day" par un hommage aux peuples indigènes.

Mais après que "des milliers de gens se soient impliqués", selon la mairie, la commission new-yorkaise a préféré la pédagogie au déboulonnage: la statue restera, mais Columbus Circle sera entouré de plaques expliquant l'histoire de Christophe Colomb et de sa statue.

La ville a indiqué qu'elle allait par ailleurs travailler à la création d'un nouveau monument honorant les peuples indigènes, qui sera érigé dans un lieu encore à définir.

Pas de retrait radical non plus pour la petite plaque honorant Pétain, posée en 1931 dans le "Canyon des héros", une section de Broadway au sud de Manhattan où sont gravées dans le trottoir des plaques honorant une centaine de personnalités américaines et étrangères.

De Blasio avait indiqué en août que cette plaque devait être "l'une des premières à être enlevées".

Mais la commission a estimé qu'il valait mieux ne pas toucher aux plaques, et explorer plutôt "les possibilités d'ajouter du contexte et des informations historiques" sur les personnalités célébrées.

- 'Pas de solution facile' -

De Blasio a justifié ces solutions de compromis en soulignant qu'il n'y avait "pas de solution facile" pour "assumer nos histoires collectives".

"Notre approche est d'ajouter des détails et des nuances, au lieu d'enlever complètement les représentations de ces histoires", a-t-il indiqué. "Et nous allons regarder de près qui a été oublié et où nous pouvons ajouter des oeuvres pour que nos lieux publics reflètent la diversité et les valeurs de notre formidable ville".

La seule statue qui va être déboulonnée est celle du chirurgien James Marion Sims (1813-1883), considéré comme le "père de la gynécologie moderne", qui utilisa des esclaves noires pour ses expériences.

Aujourd'hui à la pointe nord-est de Central Park, ce monument, cible de manifestations et de vandalisme en août dernier, va être réinstallé dans un des plus vieux cimetières de la ville à Brooklyn.

Des plaques explicatives seront posées au cimetière comme sur le piédestal abandonné, et un projet de nouvelle oeuvre d'art lancé "pour refléter les problèmes soulevés par l'héritage du chirurgien", selon la mairie.

Dernière statue à problème: celle représentant le président Théodore Roosevelt (1901-1909), naturaliste réputé, à cheval et entouré d'un Amérindien et d'un Africain, qui trône depuis 1940 devant le musée d'histoire naturelle en face de Central Park.

Elle avait été vandalisée en octobre en tant que symbole de suprématie blanche et de colonialisme. Là encore pas de déboulonnage, mais des explications et un projet de nouvelle oeuvre d'art pour "renforcer le dialogue".

Coût de cette relecture nuancée de l'histoire: les services culturels de la ville prévoient un budget de 10 millions de dollars sur quatre ans.

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