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Répression sanglante au Nicaragua: une centaine de morts depuis mi-avril, Ortega s'accroche au pouvoir

La violente vague de contestation au Nicaragua pour exiger le départ du président Daniel Ortega a fait une centaine de morts depuis mi-avril, selon un nouveau bilan dévoilé jeudi, alors que le chef de l'Etat s'accroche au pouvoir.

La Conférence épiscopale du Nicaragua (CEN), qui s'était proposée comme médiatrice entre gouvernement et opposition, a prévenu jeudi que le dialogue ne reprendrait pas tant que la répression ne cesserait pas.

"Nous, les évêques de la CEN, condamnons tous ces actes de répression par des groupes proches du gouvernement et nous voulons dire clairement que le dialogue national ne pourra reprendre tant qu'on continuera de nier au peuple du Nicaragua le droit à manifester librement, et qu'on continuera de le réprimer et de l'assassiner", a-t-elle affirmé dans un communiqué.

L'annonce en début de semaine d'une prochaine reprise du dialogue entre les deux camps n'a donc pas calmé la tension dans les rues. Dès mercredi, les affrontements entre partisans et opposants de Daniel Ortega, un ex-guérillero de 72 ans, ont repris.

Selon le nouveau bilan diffusé par le Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh), les derniers heurts de mercredi soir et jeudi matin ont fait au moins 16 morts par armes à feu et 79 blessés à Managua, Leon (nord-ouest), deuxième ville du pays et Masaya (sud-ouest).

La police nicaraguayenne a elle fait état de 15 morts par armes à feu et quelque 200 blessés lors de ces affrontements.


Hommes de main

Dans son bilan, le Cenidh accuse des hommes de main à la solde du gouvernement d'être les "agresseurs".

"Massacre ! On tire des rafales contre des manifestants pacifiques", avait écrit mercredi soir sur les réseaux sociaux l'évêque auxiliaire de Managua, Mgr Silvio Baez.

De son côté, le président Ortega a dénoncé jeudi dans un communiqué une "conspiration" de l'opposition qui cherche à "terroriser" la population, en références aux violences de mercredi.

"Il n'existe pas de groupes de choc ou paramilitaires proches du gouvernement, nous ne pouvons donc pas accepter qu'on nous accuse de faits tragiques et douloureux que nous n'avons pas provoqués et que nous ne provoquerons jamais", écrit le président Ortega.

Lors de ces incidents, les locaux de la radio pro-gouvernementale Radio Ya ont été détruits et quelques autres bâtiments endommagés.

La chaîne de télévision 100% Noticias, censurée pendant plusieurs jours à la mi-avril par les autorités en raison de sa couverture des manifestations, et les locaux de la radio Dario, à Leon, elle aussi opposée au gouvernement, ont également été ciblés par des attaques, ont dénoncé leurs propriétaires.

Héros de la révolution sandiniste qui avait renversé la dictature en 1979, Daniel Ortega voit le vent tourner contre lui depuis le 18 avril.

Il est confronté à une vague de contestation sans précédent, déclenchée par une réforme des retraites abandonnée depuis, mais qui a vite tourné à un mouvement général de rejet du chef de l'Etat, accusé de confisquer le pouvoir --il dirige le Nicaragua depuis 2007, après un premier passage de 1979 à 1990-- et de brider les libertés.


"Répression brutale"

Au sein du pays, l'un des plus pauvres d'Amérique centrale, le chef de l'Etat perd chaque jour de nouveaux soutiens.

Mercredi, les milieux d'affaires, alliés traditionnels du président, ont publiquement pris leurs distances.

A l'étranger, les critiques se multiplient: jeudi, le Parlement européen a dit "condamner la répression brutale et l'intimidation des manifestants qui s'opposent de manière pacifique à la réforme de la sécurité sociale au Nicaragua".

Les eurodéputés fustigent aussi "les disparitions et les arrestations arbitraires perpétrées par les autorités, forces armées et de police ou encore groupes violents qui soutiennent le gouvernement", comme l'avaient déjà fait auparavant Amnesty international ou la Cour interaméricaine des droits de l'homme (CIDH).

Jeudi, la France a elle aussi dénoncé la situation, appelant "toutes les parties à renoncer à la violence et à soutenir la mise en place d'un mécanisme d'enquête internationale, autonome et indépendant".

"Nous condamnons les assassinats conduits par les forces armées et de répressions, et exprimons notre solidarité avec les familles des victimes. Nous demandons à l'Etat de mettre fin aux violences", a déclaré le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA) Luis Almagro dans un communiqué.

Malgré la réprobation de la communauté internationale, Daniel Ortega martèle qu'il ne partira pas, rejetant ainsi les demandes de l'opposition en faveur d'élections anticipées afin d'abréger son mandat, prévu jusqu'en janvier 2022.

"Le Nicaragua nous appartient à nous tous et nous restons tous ici", a-t-il lancé mercredi soir devant plusieurs milliers de ses partisans.

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