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Paris redécouvre le peintre japonais Foujita, entre Orient et Occident

Foujita a été une star des années folles, un engouement qui a fait passer au second plan un talent de peintre exceptionnel. Le musée Maillol propose une redécouverte de cet artiste qui a fusionné Orient et Occident dans une oeuvre élaborée à Paris.

- Foufou, le Japonais de Montparnasse -

Sa coupe au bol, ses lunettes rondes, son anneau à l'oreille, ses débardeurs... C'est l'image qui reste du peintre Foujita, arrivé en 1913 dans un Paris en pleine effervescence artistique, tout juste sorti de l'école des beaux-arts de Tokyo. Tsuguharu Foujita a 27 ans et ses amis auront bientôt pour noms Soutine ou Modigliani.

"Foujita a joué de son image et gardé celle d'un dandy. Cela a pris le pas sur son oeuvre", regrette Anne Le Diberder, co-commissaire de l'exposition qui se veut une redécouverte du peintre grâce à des oeuvres issues de collections majoritairement privées, rarement voire jamais montrées, pour le cinquantenaire de sa mort.

- Entre Orient et Occident -

Foujita arrive à Paris avec tout son bagage artistique japonais - technique avec la peinture sur soie, sur papier, pigments végétaux - et se rend régulièrement au Louvre avec sa carte de copiste pour s'imprégner de l'art des primitifs français et des peintres siennois et florentins.

"Il y a un syncrétisme qui s'installe chez Foujita à cette époque", constate l'autre co-commissaire, Sylvie Buisson, devant l'aquarelle de 1918 "Mère et enfant" dont le mouvement qui lie les deux personnages rappelle celui du noeud des kimonos, en "union et cohésion".

Autre exemple, celui du lutteur Tochigiyama, de passage à Paris en 1926, et que Foujita peint sur soie sans ses attributs du sumo (chignon, tablier de combat, ceinture) pour montrer l'homme derrière celui qui est considéré comme un demi-dieu.

A l'époque, le peintre signe de son prénom en japonais et de son nom en écriture latine.

- Le mystère des blancs opalescents -

C'est un secret d'atelier du peintre, des blancs laiteux dont on a longtemps ignoré la composition pour des grands nus de femmes, un genre absent de la peinture japonaise.

"Foujita voulait rendre l'opalescence de la peau humaine, il a réussi à faire vibrer le blanc. Ce mystère a longtemps fasciné ses contemporains", raconte Anne Le Diberder. De ces blancs translucides, qui frisent le monochrome, émergent une chevelure rousse ou la fourrure tigrée d'un chat.

- Les enfants de Foujita -

Cet artiste du portrait et de l'autoportrait a peint une série d'enfants qui attire le regard par leur étrangeté: des yeux de chat dans des visages tristes et nostalgiques qui évoquent les mangas.

Parmi eux, une curiosité, un petit portrait de 1927 du cinéaste Gérard Oury, à l'âge de 8 ans, dont la mère était une grande amie de Foujita. Sans oublier un autoportrait de l'artiste qui s'est peint enfant en 1940 au moment où de retour au Japon, ce fils de général est engagé comme peintre officiel de l'armée, ce qui lui vaudra de vives critiques.

- Le sacré -

Le peintre s'est aussi aventuré du côté du sacré avec des "compositions religieuses" - une crucifixion, la Vierge et trois dames. A la différence de l'art occidental, il pose ses figures, comme autant de vignettes, puis travaille ses fonds d'or à l'encre noire et au galet pour qu'ils deviennent des "fonds salis".

De retour en France en 1950, Foujita, qui a obtenu la nationalité française en 1955, s'est converti au catholicisme avec son épouse Kimiyo, à la cathédrale de Reims. Il prend alors le prénom de Léonard en hommage à Vinci et consacrera ses dernières années à la décoration d'une chapelle "Notre-Dame de la paix" dans cette ville.

"Foujita, peindre dans les années folles" jusqu'au 15 juillet au Musée Maillol. A visiter aussi la Maison-atelier Foujita Villiers-le-Bâcle (Essonne).

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