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Pérou: quand la pandémie suspend les très populaires corridas

Le coronavirus a réussi là où les défenseurs de la cause animale ont échoué: suspendre les corridas au Pérou, pays où elles sont encore plus populaires que le football.

La Feria del Señor de los Milagros, la principale corrida du pays qui devait se tenir dimanche dans les arènes d'Acho à Lima, a été annulée pour prévenir toute prolifération du Covid-19. Une première depuis 1946.

La célèbre arène, l'une des plus anciennes du monde construite en 1766, et ses 14.000 places sert pour l'heure de refuge pour sans-abris.

"C'est la première fois qu'il n'y aura pas la Feria del Señor de los Milagros. Mais c'est aussi la première fois qu'il n'y aura pas non plus la Feria de San Isidro à Madrid. Ce sont des cas de force majeure", se résigne Juan Manuel Roca Rey, organisateur de corridas à l'Acho de Lima et également éleveur de taureaux de combat.

Les corridas avec mise à mort sont arrivées en Amérique avec les conquistadors espagnols au XVIe siècle et sont excessivement populaires au Pérou qui compte plus d'arènes (199) que de stades de football (80), selon les données officielles.

En revanche, le championnat de football a lui repris en août, à huis clos, une semaine après la fin d'un confinement national de plus de 100 jours dans le pays andin qui déplorait vendredi près de 34.000 décès et 880.000 cas de contamination.

Sur tout le territoire, "il doit y avoir environ 700 corridas par an et quelque 2.500 taureaux sont tués", indique à l'AFP l'éleveur de taureaux et ancien torero Rafael Puga, lui aussi fataliste.

"Le fait qu'il n'y ait pas de corridas cette année est une petite mort pour les éleveurs. Certains ne pourront pas tenir parce que le bétail a besoin de manger tous les jours", soupire-t-il.

Dans son domaine de "Camponuevo" à Sayan, à 140 km au nord-est de Lima, il élève 140 "vaches mères" et environ 400 taureaux de combat. "Nous, éleveurs de bétail, sommes aujourd'hui obligés de vivre d'autres activités et devons même envoyer du bétail à l'abattoir pour diminuer les coûts", explique l'éleveur de 72 ans.

- "Bonne nouvelle" -

L'arrêt de la saison tauromachique "ne nous affecte pas seulement nous, en tant qu'artistes, mais aussi tous les gens qui vivent de la corrida", relève également le torero Fernando Villavicencio, 34 ans, énumérant palefreniers, couturiers ou transporteurs de bétail.

D'autres en revanche se réjouissent pleinement de l'annulation de la saison des corridas: les défenseurs de la cause animale.

"C'est une bonne nouvelle. Il n'y a aucune raison d'organiser des corridas", estime auprès de l'AFP Luis Berrospi, leader du mouvement "Acho sans taureaux", qui compte des milliers de soutiens au Pérou, et qui milite également pour l'interdiction des combats de coqs.

Les défenseurs de la cause animale au Pérou tiennent ainsi leur revanche après avoir perdu en février leur combat sur le terrain judiciaire.

Dans une procédure collective engagée par 5.286 citoyens contre la maltraitance faite aux animaux, la Cour constitutionnelle a refusé d'interdire les corridas et les combats de coqs au motif qu'il n'existe pas de "Déclaration universelle des droits de l'animal", avait justifié la Cour dans son arrêt.

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