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Pérou: un musée sur le plus grand sacrifice d'enfants de l'Histoire

Ils avaient entre 5 et 14 ans et ont été tués au 15e siècle dans le cadre d'un rituel: au Pérou, les restes d'au moins 251 enfants, preuve du plus grand sacrifice humain de ce genre dans l'Histoire, seront bientôt rassemblés dans un musée.

La découverte, dévoilée en avril par National Geographic, a été réalisée près d'une falaise donnant sur l'océan Pacifique, dans la région de Trujillo (nord), où était présente la civilisation précolombienne des Chimu (900-1450), ensuite renversée par l'empire Inca.

Des architectes et ingénieurs travaillent désormais sur la construction d'un musée "qui accueillera les restes qui sont en bonnes conditions et peuvent être transportés" depuis le lieu où ils ont été trouvés, explique à l'AFP José Ruiz, maire de Huanchaco, petite ville proche de Trujillo, où les squelettes ont été trouvés, sur deux zones distinctes.

"Maintenant (les restes) pourront avoir un lieu sûr, éloigné des pillards, pour pouvoir reposer", ajoute-t-il, précisant que le musée sera aussi équipé d'"un laboratoire pour les recherches".

Les fouilles avaient commencé en 2011 dans cette région et ont permis de mettre au jour les restes d'enfants, inhumés le visage tourné vers l'océan, et de quelque 200 jeunes lamas, eux aussi sacrifiés puis ensevelis tournés vers l'Est, en direction des Andes.

Les enfants étaient inhumés à la verticale, les uns à côté des autres, avec près de chaque corps un vase, un sifflet, des pièces de tissu et de la nourriture.

- Incision dans le sternum -

Le musée sera érigé d'ici six mois, près du lieu de la trouvaille archéologique et pour un budget de plus de 1,5 million d'euros.

"Nous avons le soutien de la ministre de la Culture, Patricia Balbuena", indique M. Ruiz.

Mais les fouilles ne sont pas encore terminées et des restes osseux sont régulièrement trouvés dans la zone, explique à l'AFP Gabriel Prieto, archéologue de l'Université nationale de Trujillo qui a dirigé les recherches avec John Verano, de l'Université de Tulane à la Nouvelle-Orléans (Etats-Unis).

Rien que la première semaine de juin, le chercheur a annoncé la découverte des squelettes de 56 enfants sur le site de Pampa La Cruz, essentiellement dans un terrain vague qui servait de dépôt à ordures.

"Les enfants ont été sacrifiés avec une incision dans le sternum et montrent des côtes disloquées, tout comme" sur l'autre site concerné, celui de Huanchaquito, où les premiers restes avaient été trouvés, souligne M. Prieto. Les spécialistes soupçonnent que les côtes ont peut-être été écartées pour faciliter l'extraction du coeur.

D'ores et déjà, une chose est sûre: "Nous avons affaire au plus grand sacrifice d'enfants au monde", assure l'archéologue.

Dans la civilisation Chimu, les sacrifices humains, destinés à plaire aux dieux, étaient souvent réalisés dans des huacas ("sanctuaires", en langue quechua).

- Les habitants surpris -

Tout près de la zone des dernières découvertes se trouve un quartier d'habitations en briques, et les riverains sont très surpris.

"Moi je vis ici depuis environ dix ans et quand on a construit la maison, on n'a jamais rien trouvé", raconte Maria Guardamino, une habitante.

Les analyses au Carbone 14 réalisées sur les objets trouvés à côté des ossements ont permis de les dater entre les années 1400 et 1450, au moment où la civilisation Chimu commençait à décliner, peu à peu éclipsée par l'expansion de l'empire Inca.

"Pampa La Cruz était un cimetière dédié exclusivement aux enfants sacrifiés, donc nous avons du travail de fouille et de recherche pour les six prochaines années", estime Gabriel Prieto, qui estime qu'au total, sur les deux sites, le nombre de jeunes victimes pourrait dépasser les 400.

Le problème est de continuer à remuer la terre dans une zone d'habitation, souligne-t-il: "Le maire doit trouver un terrain d'entente avec les habitants pour qu'ils s'en aillent et que la zone de travaux soit élargie".

Et si le projet de musée prend du retard, le projet des scientifiques est, une fois terminée l'étude des restes et des objets découverts, de "les enterrer à nouveau, de façon adéquate pour permettre leur conservation et avec la sécurité d'éviter les pillages", explique à l'AFP l'archéologue Ferén Castillo.

"Les restes en bonnes conditions seront transportés à l'université de Trujillo pour les recherches", ajoute-t-il.

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