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Pierra Menta: le risque d'avalanche au coeur du dispositif

Six cents concurrents et des milliers de spectateurs à 2500 m d'altitude: la Pierra Menta, c'est le grand show de la montagne, une compétition de ski alpinisme aux limites du risque d'avalanche avec une nouvelle donne: une météo déréglée.

Comme tous les matins sur les quatre jours que dure la Pierra Menta dans le massif du Beaufortin, Thierry Arnou débute sa journée dès 4 heures du matin. Le météorologue et nivologue de Météo-France, détaché pour la course, prend connaissance des prévisions pour le lendemain. A 08h00, il enfile ses skis et ses peaux de phoques (bandes synthétiques qui permettent de grimper avec les skis) pour se rendre sur le terrain avec un pisteur de la station de Arêches-Beaufort.

"On monte sur le parcours du lendemain, on a toujours un jour d'avance. On fait une coupe du manteau neigeux à certains points pour déterminer si c'est instable ou très instable et auquel cas, les organisateurs peuvent modifier le parcours voire l'annuler", explique à l'AFP le prévisionniste.

Sa préoccupation ? Minimiser les risques d'avalanche en préservant l'intérêt de la course. "Il ne s'agit pas pour les concurrents de ne faire que des bords de piste ou rester à très basse altitude", précise-t-il.

- Tempêtes et écarts de température -

Créée en 1985, la Pierra Menta est devenue une course de légende. Disputée sur quatre jours et en binôme, elle propose des parcours dans la montagne pouvant culminer à 2686 m avec le Grand-Mont et offrant un total de 10.000 m de dénivelées positives.

Pour cette 33e édition, les +accros+ de la montagne n'iront pas si haut, ils ne dépasseront pas les 2500 m. La vague de froid survenue il y a 15 jours après une forte période d'enneigement a provoqué des "couches fragiles qui reposent sur des neiges très dures et les 40 cm tombés récemment ne sont pas encore très bien stabilisés", détaille Thierry Arnou.

Le météorologue relève aussi que ces dernières années se produisent beaucoup de tempêtes, dont il a du mal à appréhender la puissance, et qui transportent la neige. "Après il y a les périodes de très fort réchauffement après une vague de froid. Sur la neige vous mettez 40 cm de poudreuse et le lendemain il fait plus 20 degrés et tout de suite ça coule. On n'avait pas ces écarts de températures auparavant. Ce n'est pas évident", s'inquiète-t-il.

Il y a deux semaines, deux skieurs ont été emportés par une coulée sur le domaine hors-piste du Planay, sur la station d'Arêches-Beaufort, et sont toujours portés disparus.

Jeudi, la 2e étape a été modifiée sous la pression des mauvaises conditions météo (un vent soufflant à 80 km/h à 2500 m et de la pluie).

- Jouer la limite -

"Notre crainte est de se faire surprendre, avec des conditions météo qui se dégradent plus vite que ce qui a été prévu. On joue alors la limite comme aujourd'hui (jeudi). Le mauvais temps n'arrivant que pour midi, on se débrouille pour que la course arrive avant midi", souligne le directeur technique Pierre-Yves Krier.

Kier, impliqué dans les 33 éditions de la Pierra Menta, reconnait que cette année n'est pas facile car ils agissent au jour le jour. "Là on est au niveau 3 du risque d'avalanche. C'est le niveau intermédiaire entre des endroits où c'est tout à fait jouable et d'autres où il ne faut absolument pas mettre les pieds".

Sa plus grande crainte reste le public.

"Les coureurs vont dans des endroits balisés et sécurisés, c'est nous qui prenons les risques, on est devant, on balise. Les spectateurs, eux, sont libres et vont parfois dans des endroits où nous on n'a pas voulu aller parce qu'on sait que ça peut craindre. Mercredi, j'ai fait mettre des bénévoles sur certains secteurs pour interdire aux spectateurs d'y aller parce qu'on craignait des avalanches", souligne Krier, qui compose avec 400 bénévoles.

En 32 ans d'existence, la Pierra Menta n'a vécu qu'un épisode d'avalanche, mais tragique. En 1989, un traceur et deux gendarmes ont été emportés par une coulée alors qu'ils sécurisaient le parcours.

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