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Quand les Grecs ne se réclamaient pas encore des rois de Macédoine

Pour la Grèce aujourd'hui, Alexandre le Grand et son père Philippe II, les grands rois de la Macédoine antique, sont un élément majeur du patrimoine historique, mais les anciens Grecs étaient moins enthousiastes.

Les gouvernements d'Athènes et de Skopje essaient actuellement de se mettre d'accord, avec Matthew Nimetz, l'émissaire des Nations-Unis présent dans les deux capitales mardi puis mercredi, sur le futur nom de la Macédoine, non résolu depuis 1991 en raison de l'opposition des Grecs à ce qu'elle s'appelle ainsi.

Un geste de bonne volonté du Premier ministre macédonien Zoran Zaev, la semaine dernière à Davos, a consisté à annoncer que l'aéroport international de Skopje, et la principale autoroute du pays, tous deux appelés "Alexandre le Grand", allaient être débaptisés.

Au IVème siècle avant Jésus-Christ, Philippe II faisait plutôt figure d'ennemi pour les cités grecques qui l'ont combattu pendant dix ans.

Philippe II, général et diplomate habile qui a fait de la Macédoine, aujourd'hui région septentrionale de la Grèce, une superpuissance régionale autour de la ville de Pella, a en effet mené une campagne acharnée contre ces cités grecques, couronnée par sa victoire contre Athènes et Thèbes lors de la bataille de Chéronée (338 avant JC).

C'était alors la première fois que la majorité de la Grèce continentale se retrouvait sous la coupe d'un seul homme, après des décennies de guerres fratricides.

"Philippe était un gouverneur peu scrupuleux qui a réussi à imposer la puissance macédonienne au reste de la Grèce (...) suscitant évidemment beaucoup d'antagonismes contre lui", explique à l'AFP Reinhard Senff, directeur de l'Ecole archéologique allemande d'Athènes.

A l'époque, la majorité des Grecs ne considéraient pas les Macédoniens comme appartenant à la culture hellénique, alors que ces derniers parlaient pourtant grec et adoraient les mêmes dieux.

- Expansion grecque -

Pour le célèbre orateur athénien Démosthène, qui a écrit des discours enflammées contre Philippe II, le roi macédonien était un "barbare".

"Pour Démosthène toute personne qui n'était pas d'accord avec lui était un +barbare+, et même certains de ses amis athéniens étaient +des barbares+ pour lui", tempère Stephen Miller, professeur émérite à l'université de Californie, Berkeley.

Toutefois, les anciens Macédoniens avaient un grand respect pour la culture grecque.

Alexandre admirait notamment l'Iliade d'Homère et son père lui avait donné pour précepteur le célèbre philosophe athénien Aristote.

"La culture hellénique était appréciée et développée à la cour royale macédonienne depuis le Ve siècle avant JC", rappelle M. Senff.

Comme ses ancêtres macédoniens, Philippe avait même participé aux jeux Olympiques antiques, quoiqu'ils soient normalement uniquement réservés aux Grecs.

- Des rois descendant d'Hercule -

Des chevaux de Philippe ont ainsi gagné trois fois de suite à ces Jeux, et plus tard le roi a fait ériger à Olympie (sud de la Grèce) un imposant monument, le Philippeion, dédié à Zeus.

"On peut dire que les origines grecques des rois macédoniens étaient largement acceptées au Ve siècle avant JC", remarque M. Miller, car ils étaient reconnus comme descendants du dieu Hercule, héros de la mythologie grecque.

Il en allait tout autrement de leurs sujets.

"Les Macédoniens n'étaient pas considérés comme Grecs par les Grecs... et d'après ce qu'on sait en remontant à la fin de la période classique (IVe siècle), seule la famille royale était admise à Olympie", rappelle M. Senff, qui dirige les fouilles sur ce site.

Après son père, les conquêtes d'Alexandre ont marqué le zénith de l'influence culturelle et de la puissance grecques en Asie centrale et orientale, et en Afrique du nord.

Pendant trois siècles, lors de la période hellénistique, qui a duré presque jusqu'à l'émergence de l'empire romain, les successeurs d'Alexandre ont continué à dominer les régions où se situent actuellement l'Egypte, la Turquie, la Syrie, l'Afghanistan, la Syrie ou l'Inde.

Puis ce sont les Romains qui ont créé bien plus tard une grande province, appelée Macédoine, qui comprenait des parties de l'Albanie, de la Macédoine et de la Bulgarie actuelles.

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