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Quatre policiers jugés pour des violences après des plaintes d'adolescents

Leur brigade intervenait dans un quartier parisien contre les "perturbateurs indésirables": quatre policiers ont comparu mercredi en correctionnelle accusés de "violences volontaires" par deux adolescents dans le cadre d'une plainte collective dénonçant notamment des arrestations et contrôles abusifs.

Ils sont quatre, âgés de 33 à 40 ans, et appartiennent à la Brigade de Soutien des Quartiers (BSQ) du XIIème arrondissement, une unité surnommée "Les tigres" car l'écusson de leur uniforme montre un fauve.

"Notre mission, c'est de sécuriser les secteurs sensibles, nous sommes la police de la tranquillité publique", a expliqué l'un d'eux. Ce procès s'inscrit dans un contexte de tension entre jeunes des quartiers et policiers, notamment marqué par l'affaire Théo à Aulnay-sous-Bois.

Deux des prévenus sont poursuivis pour violences par personnes dépositaires de l'autorité publique (PDAP) et deux autres pour violences aggravées par PDAP ayant entraîné une incapacité inférieure à 8 jours.

A quelques mètres d'eux, deux adolescents, un garçon et une fille, mineurs au moment des faits, occupent le banc des parties civiles. Ils les accusent de les avoir giflés ou frappés à coup de poing ou de matraque ou encore aspergés de gaz lacrymogène au commissariat où ils avaient été emmenés pour un contrôle d'identité.

Ces violences ont été retenues par le parquet de Paris dans un ensemble de 44 faits dénoncés le 17 décembre 2015 par 18 mineurs et jeunes adultes dans une plainte collective visant 11 fonctionnaires. Cette plainte dénonçait également des agressions verbales, physiques et sexuelles lors de contrôles d'identité, des arrestations arbitraires et des séquestrations, de la discrimination et des abus d'autorité de policiers.

Les jeunes avaient été encouragés dans leur démarche par les éducateurs d'une association de quartier qui a collecté leurs témoignages depuis 2012.

Mais le manque de témoins, de certificats médicaux et certaines contradictions dans les récits a conduit le ministère public à classer sans suite la plupart des faits dénoncés. Les plaignants ont fait appel mais le parquet général a confirmé l'avis du parquet.

Leurs avocats ont indiqué qu'ils envisageaient désormais poursuivre leur combat judiciaire pour les faits non retenus avec la citation directe des policiers en correctionnelle et une action civile contre l'Etat pour fautes lourdes.

- 'Volonté d'éviction' -

Les faits dénoncés concernent un quartier situé entre la gare de Lyon et la place de la Nation. Des habitants et commerçants s'étaient plaints d'une appropriation de l'espace par une bande de jeunes responsables selon eux de dégradations, vols, rodéos ou trafic de stupéfiants.

Pour y répondre, le commissariat aurait mis en place une stratégie fondée sur des contrôles d'identité et interpellations, certaines notes évoquant une volonté "d'éviction" de certains individus. L'un des policiers a expliqué que les mots "perturbateurs indésirables", relevés sur un registre, faisait partie des termes utilisés par un logiciel d'intervention.

Le procureur François Molins a relevé de graves dysfonctionnements dans les conduites au poste de ces jeunes, objets d'une simple "main courante" et non d'une procédure. Il s'agit d'une infraction, a souligné un avocat de la partie civile.

Dans la première affaire examinée, un adolescent affirme avoir été embarqué sans raison pour un contrôle d'identité. Interrogé par son avocat, il dit avoir été contrôlé pour la première fois à 13 ans et l'être depuis régulièrement 4 à 5 fois par semaine.

Il affirme avoir reçu un coup de tête d'un agent dans la voiture de police où on l'avait menotté puis, arrivé au commissariat, avoir été conduit dans un pièce fermée où il aurait reçu une forte gifle pour avoir répondu qu'il ignorait qui étaient les dealers du quartier. Il raconte avoir ensuite reçu des coups de poing dans les côtes quand ses réponses ne plaisaient pas au policier.

A la barre, le fonctionnaire a contesté ce récit et évoqué une "intervention banale". Il n'a pas en revanche pu expliquer la teneur d'un certificat médical réalisé le même jour faisant état d'un hématome sur la joue du plaignant.

Le procès se poursuit jeudi.

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