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"Gilets jaunes": Matignon admet des "dysfonctionnements" après le saccage des Champs-Elysées

Ereinté par l'opposition, l'exécutif a reconnu des "dysfonctionnements" du dispositif de sécurité face à un nouveau pic de violence samedi à Paris qui renvoie à un niveau de tension connu avant le "grand débat" lancé pour calmer la crise des "gilets jaunes".

Le Premier ministre a identifié des "insuffisances" du maintien de l'ordre "dans son exécution" qui n'ont pas permis d'éviter le saccage d'une partie des Champs-Elysées, vitrine de la France à l'étranger, a dit Matignon, après une réunion convoquée dimanche en présence des ministres de l'Intérieur Christophe Castaner et de la Justice Nicole Belloubet ainsi que le secrétaire d'Etat Laurent Nunez.

En réponse, Edouard Philippe "fera ses propositions d'adaptation au président de la République demain à 11H30 pour renforcer la doctrine d'emploi des forces de l'ordre "et s'assurer à tout moment de la fermeté de son exécution", a indiqué Matignon. Il "rendra publique ces mesures rapidement", a par la suite précisé Matignon dans un communiqué.

Emmanuel Macron, qui a dû écourter son week-end de ski à La Mongie, a demandé des "mesures fortes" samedi soir, estimant que "tous ceux qui étaient là se sont rendus complices".

Les images de pillages et d'incendie du restaurant Fouquet's, de magasins ou d'une succursale bancaire des Champs-Elysées ont tourné en boucle dans les médias. Même si elles tranchaient avec celles des autres défilés globalement très calmes de dizaines de milliers de manifestants "gilets jaunes" ou pour le climat dans la capitale et le reste du pays.

Deux cents personnes ont été placées en garde à vue, dont 15 mineurs, selon le Parquet. Quelque 80 enseignes ont été touchées, dont une vingtaine pillées ou victimes de départs d'incendie, a précisé à l'AFP une association. Quelque 150 mètres cubes de déchets ont dû être ramassés à Paris, selon la mairie.

- "Laxisme sécuritaire" -

De quoi déclencher une volée de bois vert contre l'exécutif, sommé de s'expliquer par l'opposition qui l'accuse de "laxisme sécuritaire" voire de "laisser-faire". D'autant que des "gilets jaunes" avaient annoncé l'acte 18, après quatre mois de mobilisation, comme un "ultimatum" lancé au président.

Christophe Castaner et son homologue pour l'Economie Bruno Le Maire devront s'expliquer mardi devant les commissions des Lois et des Affaires économiques du Sénat sur ces violences et leurs conséquences économiques. M. Le Maire présidera aussi une réunion lundi à Bercy avec des représentants des secteurs d'activités touchés (commerçants, assurances, hôtellerie).

La maire de la capitale Anne Hidalgo a demandé "des explications" et des mesures "pour sortir de ce cauchemar". Le député LR Eric Ciotti a estimé que cette violence arrangeait le gouvernement. La présidente du Rassemblement national, Mme Le Pen a renchéri: "On peut se poser la question".

"Pourquoi les forces de l’ordre ne sont pas intervenues, quelles consignes ont été données ?", a aussi interrogé Xavier Bertrand (ex-LR).

"Le mal-être profond ne se résoudra ni par la répression, ni par l'interdiction de manifester, ni par un appel au calme, mais par de véritables mesures politiques", a relevé Hayk Shahinyan, président fondateur du Mouvement alternatif citoyen (MAC), résumant le sentiment de nombreux "gilets jaunes".

Pour le numéro un du PS Olivier Faure, le gouvernement est entré "dans une logique sécuritaire" qui lui "permet d'esquiver un autre débat, le débat social". Il a aussi ironisé sur les annonces "entre deux verres" du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

Emmanuel Macron n'est pas en reste, éreinté par l'opposition et sur les réseaux sociaux pour s'être affiché sur les pistes de ski de La Mongie vendredi. De "la petite politique politicienne", a rétorqué la ministre des Affaires européennes Nathalie Loiseau.

- "Accélérer la réponse" -

Ces violences, après quatre mois de mobilisation des "gilets jaunes" renvoient aux tensions connues en décembre, alors que le gouvernement espérait sortir de la crise avec le grand débat national pour lequel le président n'a pas hésité à mouiller la chemise, enchaînant les débats-marathons avec des élus et des citoyens.

L'exécutif vante une "réussite" pour le gouvernement, avec plus de 10.300 réunions locales et de 1,4 million de contributions sur le site dédié.

Il s'est donné jusqu'à la mi-avril pour décider ce qu'il comptait faire des très nombreuses propositions qui ont émergé. Mais le gouvernement devra "accélérer certainement la réponse", a avancé sur BFMTV Nadia Bellaoui, l'un des cinq garants du grand débat.

Sept Français sur dix pensent que le grand débat ne permettra pas de sortir de la crise que traverse le pays, selon un sondage récent, alors que Edouard Philippe lui-même a dit craindre des "déceptions", d'après des propos rapportés.

Samedi, au total 32.300 personnes se sont mobilisées dans toute la France selon l'Intérieur, 230.766 selon le décompte des "gilets jaunes" publié sur Facebook. Beauvau avait dénombré 28.600 personnes la semaine précédente, la plus faible mobilisation depuis le début du mouvement le 17 novembre qui avait alors enregistré un "pic" de 282.000 manifestants.

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