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Armes chimiques en Syrie: mobilisation à Paris, Washington accuse la Russie

Vingt-quatre pays ont lancé mardi à Paris une initiative contre les attaques chimiques en Syrie dont le chef de la diplomatie américaine, Rex Tillerson, a accusé la Russie, alliée de Damas, de porter la responsabilité.

"Encore hier, plus de vingt civils, enfants pour la plupart, ont été victimes d'une attaque présumée au chlore", a déclaré le secrétaire d'Etat américain lors du lancement de ce partenariat international, voulu par la France, pour riposter au récent veto russe à l'ONU sur cette question.

"Quel que soit l'auteur des attaques, la Russie", en tant qu'allié du régime syrien de Bachar al-Assad, "porte, en dernier ressort, la responsabilité pour les victimes de la Ghouta orientale", en Syrie, a-t-il lancé, en rappelant qu'elle avait signé un accord avec les États-Unis en 2013 sur le démantèlement de l'arsenal chimique syrien.

Depuis la tribune de l'ONU à New York, l'ambassadeur russe Vassily Nebenzia a cependant rejeté ces accusations américaines "à l'emporte-pièces", estimant "étrange" que les informations "non confirmées" sur cette nouvelle attaque présumée soient sorties juste avant la réunion de Paris.

Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a lui prévenu "les criminels qui ont pris la responsabilité d'utiliser et de concevoir ces armes barbares" qu'il n'y aurait "pas d'impunité".

La conférence a été suivie d'une réunion à huis clos sur la Syrie entre les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, de la France, de la Grande-Bretagne et de deux pays de la région, Jordanie et Arabie saoudite.

Cette réunion avait pour but de "remettre le processus (de paix) de Genève et les Nations unies dans le jeu" avant le Congrès intersyrien organisé par la Russie le 30 janvier à Sotchi, a-t-on précisé dans l'entourage de Jean-Yves Le Drian.

Les ministres ont tenté de définir "la meilleure manière de soutenir" ce processus onusien en matière de "réforme constitutionnelle et préparatifs en vue de la tenue d'élections", avant une série de réunions sur la Syrie, a ajouté un haut responsable du département d'Etat américain, tout en prévenant que cela prendrait "du temps".

Concrètement, lors de la conférence contre l'impunité de l'utilisation d'armes chimiques, 24 pays se sont engagés à partager des informations et à établir des listes de personnes impliquées dans leur utilisation, en Syrie, où la guerre a fait plus de 340.000 morts depuis 2011, mais aussi ailleurs dans le monde.

Cette initiative intervient après un double veto russe au renouvellement du mandat d'experts internationaux sur l'emploi d'armes chimiques en Syrie.

"Chlore, sarin, gaz moutarde, VX: ces noms de mort sont revenus sur le devant de la scène internationale et avec eux les images terribles des victimes de ces armes de terreur", a énuméré Jean-Yves Le Drian.

- Nouvelle séquence diplomatique -

"La situation actuelle ne peut plus durer", a-t-il martelé, déplorant l'impossibilité "de bâtir un consensus international condamnant la Syrie au Conseil de sécurité et à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC)".

La France a ainsi décrété mardi le gel d'avoirs contre 25 entités et responsables d'entreprises syriens mais aussi français, libanais ou chinois soupçonnés "d'alimenter le programme syrien de conception et réalisation d'armes chimiques".

Aucun responsable du régime n'est en revanche visé. "Nous n'avons pas aujourd'hui d'éléments permettant d'engager cette démarche", concède-t-on de source diplomatique française.

Au moins 130 attaques chimiques ont été perpétrées en Syrie entre 2012 et 2017, selon une évaluation française.

Les enquêteurs de l'ONU et de l'OIAC ont conclu à la responsabilité du régime syrien dans quatre d'entre elles, dont l'une, au sarin, a tué au moins 80 personnes le 4 avril 2017 à Khan Cheikhoun.

La Russie, alliée de Bachar al-Assad, accuse de son côté les enquêteurs de partialité. Le groupe jihadiste État islamique (EI) est aussi soupçonné d'avoir utilisé du gaz moutarde en Syrie et en Irak.

C'est dans ce climat tendu, envenimé par l'offensive de la Turquie dans le nord de la Syrie contre une milice kurde accusée de "terrorisme" alors qu'elle est alliée de Washington dans la lutte contre les jihadistes, que s'ouvre une nouvelle séquence diplomatique sur la crise syrienne.

Les pourparlers sous l'égide des Nations unies, qui piétinent, reprennent jeudi et vendredi, exceptionnellement à Vienne et non Genève. La Russie assure de son côté que le Congrès de Sotchi, qui doit réunir des centaines de Syriens, n'est pas une initiative concurrente.

Les États-Unis ont annoncé le 17 janvier que l'armée américaine resterait en Syrie jusqu'à ce que l'EI soit totalement vaincu mais aussi pour contrer l'influence iranienne et aider à chasser Bachar al-Assad.

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