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Syrie: les rebelles évacuent avec émotion leur avant-dernier bastion dans la Ghouta

En pleurs, des rebelles syriens évacuent dimanche leur enclave ravagée par les bombes dans la Ghouta orientale, cinq semaines après le début d'une offensive meurtrière du régime qui a repris 90% de cet ancien bastion insurgé aux portes de Damas.

Plus de 107.000 habitants des zones rebelles de la Ghouta, vaste plaine agricole à l'est de Damas, ont déjà été forcées à l'exode depuis le lancement, le 18 février, d'une offensive des forces du président syrien Bachar al-Assad.

Ecrasés par un déluge de feu et affaiblis par un siège de cinq ans, les mouvements rebelles acceptent un à un d'abandonner leurs positions dans la Ghouta pour se retirer dans la province d'Idleb (nord-ouest), qui échappe encore au contrôle du régime.

Des dizaines de combattants vêtus de noir mais aussi des civils rassemblent dimanche avec émotion leurs possessions dans des sacs en toile et des valises chargées à ras bord, dans la ville d'Arbine. Ils montent ensuite dans des bus devant les conduire à Idleb, à la suite d'un accord parrainé par la Russie, indéfectible allié du régime syrien.

Les larmes coulent sur les visages de nombre d'entre eux alors qu'ils s'apprêtent à quitter leur région natale, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Nous abandonnons nos foyers, nous n'avons plus d'argent, plus de maison, même plus de vêtements à emporter à cause des bombardements", a témoigné Hamza Abbas, un civil.

"J'ai décidé de partir, car comment accepter de vivre avec ceux qui ont massacré ma famille et mes amis? Qui ont détruit mon avenir? Tué des femmes et des enfants?", poursuit cet homme originaire de la ville de Zamalka mais qui a rejoint Arbine pour évacuer.

Samedi, près de 1.000 combattants du groupe rebelle Faylaq al-Rahmane et leurs familles ont déjà quitté Arbine. Après avoir été fouillés -les combattants devaient abandonner la plus grande partie de leur armement- les évacués ont pris place dans des bus, à bord desquels se trouvait un soldat russe, Moscou supervisant directement l'opération.

Ils sont arrivés dimanche à Qalaat al-Madiq, dans la province centrale de Hama, une escale coutumière sur la route vers Idleb, selon un correspondant de l'AFP.

- Partir ou mourir -

Au total, quelque 7.000 personnes doivent quitter Arbine et les autres localités de ce qui est l'avant-dernière enclave rebelle près de Damas. Cet accord inclut aussi le quartier damascène de Jobar, qui était contrôlé par le groupe islamiste Faylaq al-Rahmane.

A l'issue de cette évacuation de masse, qui pourrait prendre plusieurs jours, les rebelles ne seront plus présents que dans une seule poche, autour de la grande ville de Douma, tenue par le groupe islamiste Jaich al-Islam et où des négociations sont en cours, en vue d'une éventuelle évacuation de combattants.

Le premier accord d'évacuation de rebelles et de civils de la Ghouta a été conclu la semaine dernière pour la poche de Harasta. Environ 4.500 personnes, dont 1.400 combattants du groupe insurgé salafiste Ahrar al-Cham ont été transférés vers Idleb.

Les revendications de ce mouvement n'ont pas été prises en compte: "Tout ce qu'ils ont obtenu, c'est de pouvoir partir sans être tués", a souligné Nawar Oliver, expert au centre de réflexion Omran, basé en Turquie.

Plus de 1.600 civils ont été tués par les bombardements du régime syrien depuis le 18 février, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui a aussi dénombré la mort d'au moins 485 soldats gouvernementaux et de 310 rebelles.

- Reconquête -

En une dizaine de jours, 107.000 civils ont fui les combats dans la Ghouta vers des zones tenues par le régime, via des couloirs mis en place par les autorités syriennes. L'enclave rebelle comptait environ 400.000 habitants avant le début de l'offensive.

Le régime syrien avait fait en début d'année une priorité de la reconquête de la Ghouta orientale, une zone d'où les rebelles tiraient obus et roquettes meurtriers sur Damas. Samedi, un adolescent de 12 ans, a été tué par un de ces tirs, selon l'agence de presse officielle syrienne Sana. La Ghouta avait été l'une des premières régions où se sont déroulées des manifestations contre le régime, en 2011.

"Les habitants de Damas raconteront à leurs enfants pendant les décennies à venir comment vous avez sauvé la ville", avait proclamé mi-mars le président syrien, s'adressant aux troupes impliquées dans l'assaut sur la Ghouta qui se poursuit malgré une résolution de l'ONU appelant à un cessez-le-feu.

La guerre en Syrie, déclenchée en 2011 avec la répression de manifestations en faveur de réformes démocratiques, a fait plus de 350.000 morts et conduit des millions de Syriens à l'exil.

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