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Réforme de la santé: Donald Trump se prépare à un échec

Un échec se profilait vendredi au Congrès américain à l'approche d'un vote emblématique sur l'abrogation d'"Obamacare", la Maison Blanche cherchant à rejeter toute responsabilité dans ce qui serait une lourde défaite politique.

La mine sombre, Sean Spicer, porte-parole de la Maison Blanche, n'a pas explicitement reconnu que le vote se présentait mal, mais a clairement laissé entendre que l'exécutif se préparait à un revers.

Donald Trump "a fait tout ce qui était possible" pour que la loi passe, a-t-il affirmé. Si le compte n'y est pas, pourquoi maintenir le vote ? "Je ne vais pas dévoiler notre stratégie", a-t-il répondu.

Le scrutin des 430 membres de la Chambre des représentants (193 démocrates et 237 républicains) était toujours prévu peu après 19H30 GMT. Mais le nombre de républicains ayant annoncé leur opposition dépasse la trentaine, ce qui assurerait une défaite, la minorité démocrate étant totalement opposée.

Le successeur de Barack Obama joue sa réputation et sa crédibilité, lui qui se targue d'être un négociateur hors pair et qui a parlé directement à pas moins de 120 parlementaires ces derniers jours pour leur vendre le plan républicain d'abrogation et de remplacement d'"Obamacare", la refonte de l'assurance-maladie signée par Barack Obama, il y a sept ans.

Les républicains ont fait voeu de l'abroger dès leur retour au pouvoir, mais la promesse se heurte à la réalité du système de santé, un enchevêtrement d'assurances publiques et privées à l'équilibre instable.

Le président américain, après d'innombrables réunions, avait décidé jeudi soir de mettre fin aux marchandages et lancé un ultimatum à son camp: approuvez la réforme, ou laissez Obamacare en place.

Le pari du milliardaire était que les républicains n'oseraient pas faire échouer la première grande loi du mandat, et se fâcher avec lui. A fortiori après la suspension en justice de son autre grand projet phare, la fermeture des frontières aux ressortissants de certains pays musulmans.

- Moins bien couverts -

Mais M. Trump, selon ses détracteurs, a sous-estimé l'impact réel de la réforme, qui va sabrer les aides publiques aux personnes qui n'ont pas d'assurance santé grâce à leur employeur, et doivent financer elles-mêmes leur couverture.

Quelque 14 millions de personnes devraient sortir du système d'assurance maladie dès l'année prochaine, selon les prévisions. Les coûts individuels vont augmenter, et des services essentiels instaurés par Obamacare, tels que les urgences et les soins grossesse, ne seraient plus obligatoirement couverts. Plusieurs républicains modérés ont donc fait défection.

De l'autre côté du parti, les ultra-conservateurs du "Freedom Caucus" disent que le plan républicain n'est qu'une version édulcorée d'Obamacare, conserve trop de réglementations coûteuses et ne permettra pas de faire baisser les prix.

Pour Nancy Pelosi, la chef de la minorité démocrate, forcer un vote sans être certain du résultat est une "erreur de débutant".

- Trump contre Ryan -

Donald Trump avait laissé la rédaction de la réforme à Paul Ryan, le quadragénaire qui préside la Chambre depuis 2015, et que le camp pro-Trump pourrait désormais accabler.

Des médias conservateurs ont déjà commencé à attaquer le "speaker" pour la défaillance de sa stratégie et le contenu de sa loi, qui frapperait une partie de l'électorat populaire du milliardaire.

Paul Ryan a été longuement reçu jeudi en milieu de journée à la Maison Blanche, pour confirmer de vive voix au président qu'il n'avait pas les voix requises, selon plusieurs médias.

Globalement, la trentaine d'élus rebelles du Freedom Caucus avait témoigné de l'engagement indéniable du président dans la négociation, confirmant indirectement que toute défaite serait à mettre au passif du locataire de la Maison Blanche.

"Ce président a été plus impliqué qu'aucun autre président depuis que je suis devenu parlementaire il y a 15 ans", saluait jeudi Trent Franks, élu de l'Arizona.

Selon un sondage Quinnipiac, 56% des Américains s'opposent aujourd'hui au plan républicain, contre 17% qui l'approuvent et 26% d'indécis.

Si le texte était tout de même adopté vendredi, la chambre haute du Congrès, le Sénat, l'examinera la semaine prochaine. La majorité républicaine y est encore plus fragile, avec 52 sénateurs sur 100, et d'ores et déjà le texte actuel est assuré d'un échec. Il y aura donc de nouveaux amendements et de nouveaux marchandages.

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