Accueil Actu

Violences conjugales: le gouvernement présente son plan en espérant un "électrochoc"

Prise en charge psychologique des agresseurs, introduction de l'emprise dans le code pénal, renforcement du numéro 3919: le gouvernement a clos lundi le "Grenelle contre les violences conjugales" en présentant un plan à forte tonalité juridique, qui a laissé les associations sur leur faim.

Accompagné de plusieurs ministres, le Premier ministre a présenté ou confirmé une trentaine de mesures, dont celles annoncées dès le lancement du "Grenelle contre les violences conjugales", le 3 septembre.

Les financements sont "là", "massifs", a assuré Edouard Philippe dans un discours à Matignon, confirmant le chiffre de 360 millions d'euros dédiés à la lutte contre les violences faites aux femmes "en une année".

Pour marquer cette journée, Emmanuel Macron s'est rendu dans l'après-midi au tribunal de Créteil, près de Paris, où il a pu s'entretenir avec une victime de violences conjugales.

Depuis le début de l'année 2019, au moins 117 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, selon un décompte et une étude au cas par cas menés par l'AFP. Chaque année, plus de 210.000 femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint.

Pour mettre fin à des "dysfonctionnements dont nous n'avons pas jusqu'à aujourd'hui voulu prendre conscience" et à certaines "absurdités juridiques", Edouard Philippe a annoncé des initiatives susceptibles selon lui de "briser la chaîne su silence" et provoquer un "électrochoc" pour endiguer ce fléau.

Il s'agira notamment de "mieux définir dans notre droit ce que recouvre le terme de violences", en créant une "nouvelle circonstance aggravante pour les auteurs de violences dans le cas de harcèlement ayant conduit au suicide", ou encore en inscrivant dans la loi la notion d'"emprise" psychologique.

Pour permettre aux professionnels de santé de signaler plus facilement les "cas d'urgence absolue", les règles régissant le secret médical devraient être aménagées.

Plusieurs de ces mesures seront inscrites dans une proposition de loi que porteront deux députés LREM en janvier. Ce texte entérinera aussi "le principe de la suspension automatique de l'autorité parentale pour le conjoint meurtrier" ou de son "aménagement par le juge pénal" pour "le conjoint violent", mesures annoncées dès l'ouverture du Grenelle.

Dès dimanche, la secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes Marlène Schiappa avait annoncé que le gouvernement allait créer et cofinancer à 50%, dans chaque région, deux centres de prise en charge des hommes auteurs de violences conjugales, afin de faire baisser la récidive.

Par ailleurs, la ligne d'écoute dédiée aux victimes de violences conjugales, le 3919, fonctionnera désormais 24 heures/24 et 7 jours sur 7.

- Tour Eiffel éteinte -

Une dizaine de mesures avaient été annoncées en septembre, dont la création de 1.000 nouvelles places d'hébergement et de logement d'urgence pour les femmes victimes ou la généralisation du dépôt de plainte à l'hôpital. Figuraient également l'identification de "procureurs référents spécialisés" dans tous les tribunaux, et la création d'une "grille d'évaluation" devant permettre aux forces de l'ordre de mieux estimer le danger encouru par les femmes qui se présentent au commissariat ou à la gendarmerie.

Les députés ont par ailleurs adopté mi-octobre une proposition de loi pour mettre en place, début 2020, le bracelet antirapprochement, qui permet de maintenir à distance les conjoints violents.

Ces annonces étaient très attendues par les militantes féministes, confortées par le succès des manifestations de samedi, qui ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes dans toute la France.

"Le gouvernement rate le coche", a réagi Caroline De Haas, du collectif #NousToutes, ajoutant que "la déception est à la hauteur de l'immense mouvement". Pour marquer son mécontentement, le collectif prévoyait "un concert de casseroles" en fin de journée non loin de Matignon.

"Entre mesures déjà existantes mais pas appliquées" et "mesures fortes mais sans budget", le gouvernement "passe à côté de l'urgence de la situation", a déploré l'association Osez le féminisme.

Mêmes critiques dans la classe politique, qu'il s'agisse de LFI, qui dénonce dans un communiqué "beaucoup de com' pour peu d'applications concrètes", du PCF qui parle d'"enfumage", ou du député LR du Lot Aurélie Pradié, qui voit un "écart abyssal entre les annonces et la réalité".

A l'occasion de cette journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et "en hommage aux victimes de féminicides", la Tour Eiffel sera éteinte à minuit, a annoncé la maire de Paris Anne Hidalgo sur Twitter.

jlo-ab-nzg-bfa/cel/

À lire aussi

Sélectionné pour vous