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Violences envers les Rohingyas - Un juge américain exige de Facebook des données en vue de poursuites internationales

(Belga) La justice américaine a ordonné à Facebook de publier les archives de comptes liés aux exactions de l'armée birmane et de milices bouddhistes contre les Rohingyas, une minorité musulmane persécutée, que le groupe avait fermés.

La Gambie, petit pays majoritairement musulman d'Afrique de l'Ouest à l'initiative d'une procédure contre la Birmanie devant la Cour internationale de justice (CIJ, basée à La Haye), avait saisi en juin 2020 la justice américaine pour obliger le géant de la technologie à partager du contenu anti-Rohingyas qu'il avait supprimé. Le ministère gambien de la Justice s'est félicité jeudi dans un communiqué que la justice américaine ait "fait droit à la quasi-totalité de sa demande". La Gambie est soutenue dans sa démarche par les 57 Etats membres de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) ainsi que par d'autres pays. Dans sa décision mercredi, le juge Zia Faruqui, d'un tribunal de Washington, a critiqué le géant américain des réseaux sociaux pour son refus de publier ces informations en invoquant la loi américaine sur la protection de la vie privée. Le juge a estimé que les messages effacés, provenant de responsables birmans, n'étaient pas concernés par la protection des communications personnelles des usagers. "Verrouiller le contenu demandé serait se priver de l'occasion de comprendre comment la désinformation a lancé le génocide", écrit-il dans sa décision citée par le quotidien The Wall Street Journal, ajoutant que voir Facebook "se draper dans le manteau du droit à la vie privée est empli d'ironie". La plateforme s'est vu reprocher son manque de réactivité contre des appels à la violence, liés aux massacres de Rohingyas en Birmanie en 2017. Qualifiés de "génocide" par des enquêteurs de l'ONU, ils ont provoqué l'exode au Bangladesh de quelque 740.000 Rohingyas. Le nombre exact de Rohingyas tués au cours de ces violences n'est pas connu, mais des ONG estiment qu'il s'élève à plusieurs milliers. Facebook a réagi jeudi en déclarant "examiner la décision" du juge, soulignant avoir volontairement communiqué des documents au Mécanisme d'enquête indépendant sur la Birmanie (IIMM) créé en 2018 par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU. "Nous demeurons atterrés par les atrocités commises contre les Rohingyas en Birmanie et soutenons la justice pour les crimes internationaux", a déclaré la plateforme dans un communiqué. "Nous nous sommes engagés à fournir les informations appropriées et, depuis l'année dernière, nous avons procédé à des communications volontaires et légales à l'IIMM et nous continuerons à le faire au fur et à mesure de l'avancée de la procédure contre la Birmanie". La Cour pénale internationale (CPI, basée à La Haye et qui poursuit des individus) a annoncé en septembre 2018 l'ouverture d'un examen préliminaire concernant l'expulsion présumée des Rohingyas par la Birmanie vers le Bangladesh, première étape d'un processus pouvant aboutir à une enquête formelle du tribunal et, éventuellement, à des accusations. En août 2018, la Mission d'établissement des faits (MEF) de l'ONU sur la Birmanie, créée par le Conseil des droits de l'Homme, avait appelé le Conseil de sécurité à saisir la CPI ou à créer un tribunal international ad hoc. Les enquêteurs de l'ONU avaient alors réclamé des poursuites contre plusieurs responsables militaires birmans pour "génocide", "crimes contre l'humanité" et "crimes de guerre" envers les Rohingyas. Facebook, critiqué par les enquêteurs de l'ONU pour avoir permis la propagation de discours de haine, avait banni le jour même les principaux dirigeants militaires birmans. (Belga)

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