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Visé par une enquête, le président chinois d'Interpol démissionne

Interpol a annoncé dimanche soir la démission de son président chinois Meng Hongwei, porté disparu depuis plus de dix jours, peu après que Pékin eut annoncé qu'il faisait l'objet d'une enquête dans son pays, soupçonné d'avoir "violé la loi".

L'épouse du vice-ministre chinois à la Sécurité publique (à la tête d'Interpol depuis novembre 2016), Grace Meng, qui avait signalé sa disparition "inquiétante" à la police française jeudi, a déclaré pour sa part dimanche à des journalistes à Lyon, siège mondial d'Interpol, dans l'est de la France, que son mari, âgé de 64 ans, était "en danger".

"Le secrétariat général d'Interpol à Lyon, en France, a reçu la démission de M. Meng Hongwei en tant que président d'Interpol, avec effet immédiat", a fait savoir l'organisation de coopération policière aux 192 pays membres dans un communiqué posté sur Twitter.

Deux heures plus tôt, la Commission centrale d'inspection disciplinaire du Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir, chargée de la répression de la corruption de fonctionnaires, avait indiqué que Meng Hongwei "est actuellement visé par une enquête car il est soupçonné d'avoir violé la loi", sans autres précisions sur ses griefs.

Dans cette affaire inédite, qui suscite de nombreuses interrogations, la journée a été riche en rebondissements.

- Couteau -

Dans l'après-midi, l'épouse de Meng Hongwei, placée sous protection policière pour avoir reçu des menaces, a fait part de sa vive inquiétude devant la presse en révélant que le dernier message reçu du téléphone de son mari, le 25 septembre alors qu'il était en Chine, ne comportait qu'une émoticône représentant un couteau. "Attends mon appel", lui avait-il indiqué dans un précédent message.

Pour celle qui n'avait plus eu de nouvelles depuis, cela voulait dire que son époux - qui présidait Interpol depuis novembre 2016 - était "en danger". "Je ne suis pas sûre de ce qui lui est arrivé", a-t-elle répondu au sujet d'une éventuelle arrestation, avant d'apprendre qu'une enquête le visait.

Pour elle, le sort réservé à son mari, sous les yeux de l'opinion publique mondiale, relève de la "ruine politique". "Tant que je ne le vois pas en face de moi, en train de me parler, je ne peux pas avoir confiance", a dit celle qui vit à Lyon avec leurs deux enfants. Elle s'est exprimée dos aux caméras, refusant également d'être photographiée de face.

"Cette affaire relève de la justice. Cette affaire concerne la communauté internationale. Cette affaire concerne le peuple de mon pays", a-t-elle dit d'une voix tremblante, étouffant un sanglot. "Bien que je ne puisse pas voir mon mari, nos cœurs sont toujours liés. C'est grâce à cela qu'il tiendra le coup."

- Nombreux précédents -

Samedi, le secrétaire général de l'organisation policière aux 192 pays membres, l'Allemand Jürgen Stock, qui conduit ses opérations au quotidien, avait demandé à la Chine "une clarification" sur la situation de Meng Hongwei.

Une enquête pour disparition a été ouverte en France cette semaine et Paris avait fait part vendredi de son "interrogation" sur la situation de M. Meng, en se disant "préoccupée" par les menaces reçues par son épouse.

Ce n'est pas la première fois que des personnalités de haut rang de la diaspora chinoise, en France ou dans d'autres pays, manquent subitement à l'appel sur fond de campagne anti-corruption menée par Pékin, soupçonnée de servir en même temps de purge politique.

En France, en 2015, l'homme d'affaires Mike Poon, alors au centre du rachat de l'aéroport de Toulouse-Blagnac, avait disparu des radars pendant plusieurs mois, expliquant à son retour avoir été interrogé dans le cadre d'une enquête sur le secteur aéronautique. La même année en Chine, c'est le président du conglomérat Fosun, propriétaire du Club Méditerranée, le milliardaire Guo Guangchang, qui avait disparu de façon énigmatique pendant quelques jours.

Reste que le cas de M. Meng, qui a gravi les échelons de l'appareil sécuritaire chinois au temps où celui-ci était dirigé par un rival de Xi Jinping, est une première au sein de grandes institutions internationales. Ce rival, Zhou Yongkang, purge actuellement une peine de prison à perpétuité après avoir été condamné en 2015 pour corruption, abus de pouvoir et divulgation de "secrets d'État".

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