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Voici l'endroit du monde le plus préservé de toute pollution humaine

A l’extrême sud du Chili, juste avant le Cap Horn et l'Antarctique, il existe un endroit préservé fait de lichens, mousses et autres champignons, aux avant-postes du changement climatique tant sa biodiversité est grande et fragile.

De l'autre côté du canal de Beagle, sur l'île chilienne de Navarino, située plus au sud encore qu’Ushuaïa (Argentine), Puerto Williams s'impose comme la ville la plus australe au monde.

A l'ouest de la bourgade de 2.000 habitants, le parc ethnobotanique d'Omora gère cette aire de sous-bois protégée de 1.000 hectares.

Dans les sous-bois des forêts que la réserve abrite, la variété des lichens, mousses et autres champignons est immense.
"Il y a ici plus de diversité de lichens et de mousses par unité de surface que partout ailleurs dans le monde", assure Ricardo Rozzi, directeur du Centre international du cap Horn à Puerto Williams.

Dans les eaux de la rivière Robalo, qui traverse le parc et qui est parmi les plus limpides au monde, de minuscules organismes jouent le rôle de "sentinelles" du changement climatique.

Un lieu qui "n'a pas d'égal"

L'endroit "n'a pas d'égal" au monde, estime le biologiste de 61 ans, assurant que l'île, où les températures ne dépassent pas habituellement les 5°C, est "particulièrement sensible au changement climatique".

Loupe à la main, les scientifiques scrutent ainsi le sol à la recherche d'indicateurs du changement climatique, qui à ces latitudes (55 degrés sud) se fait sentir de manière exponentielle.

La flore y réagit en recherchant des "températures (plus) basses", explique Ricardo Rozzi, pour qui "un des aspects les plus évidents du changement climatique est l'augmentation de la température". Même avec un changement minime, "ces lichens ne peuvent pas survivre", assure-t-il.

Les chercheurs ont ainsi constaté que la flore s'était déplacée vers des zones de plus haute altitude. "Dans le cas (des mousses), nous avons vu qu'elles se sont déplacées. Avant, on les trouvait entre 50 et 350 m d'altitude. Maintenant, c'est plutôt entre 100 et 400 mètres", illustre-t-il.

Des changements visibles sur une très courte distance

Dans cette région, l'étagement de la végétation en fonction de la température est marquant. La petite montagne Bandera, où prend sa source la rivière Robalo, présente des changements de végétation tous les 200 mètres à partir de 700 mètres d'altitude, avec un changement de température à chaque fois de 1,5 degré.

"On peut observer les changements qui se produisent dans la zone des hautes Andes et dans la zone proche de la mer sur une très courte distance", souligne Tamara Contador, biologiste au Centre international du Cap Horn.

"On observe également comment la température affecte la biodiversité qui se développe" dans la rivière Robalo, poursuit-elle, assurant que ses eaux, parmi "les plus propres de la planète", constituent un indicateur des "changements environnementaux dans le monde".

"À l'échelle mondiale, les écosystèmes polaires et subpolaires sont les plus touchés par le changement climatique. On est à un endroit où le changement climatique affecte la biodiversité beaucoup plus qu'ailleurs", assure la biologiste de 38 ans en analysant à la loupe de tous petits organismes, prélevés à la petite cuillère dans les eaux cristallines de la rivière.

Certains de ces organismes ont changé d'emplacement ou augmenté le nombre de leurs cycles de reproduction, ce qui confirme une altération climatique minime dans la région, mais qui pourrait être beaucoup plus importante ailleurs sur la planète, alerte M. Rozzi.

"Certains insectes qui avaient un cycle annuel de l'oeuf à la larve puis à l'adulte ont deux cycles annuels parce que la température augmente", dit-il.

En étudiant la biodiversité de la région, "on peut éviter de franchir le seuil qui conduira à l'extermination de l'humanité et des autres formes d'êtres vivants", espère le biologiste.

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