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Lautfi a créé DomiHome, une appli gratuite qui met en relation patients et infirmiers à domicile: "Je sais que ça répond à un besoin"

Il y a un peu plus d'un an, Lautfi Kraï a lancé DomiHome, une plateforme de mise en relation entre patients et infirmiers à domicile. Un outil qu’il a créé sur base de sa propre expérience et qui, selon lui, manque aujourd’hui.

Infirmier et enseignant en soins infirmiers à l’Institut Dominique Pire à Bruxelles, Lautfi Kraï s’est lancé dans un nouveau projet il y a deux ans : la création d’un site internet et d’une application qu'il a nommés DomiHome. "C’est une plateforme de mise en relation entre patients et infirmiers/infirmières à domicile. Le but est d’améliorer la suite des soins des patients lorsqu’ils quittent l’hôpital, de faciliter leur retour à domicile, sans intermédiaire", nous confie le Bruxellois.

Concrètement, comment cela fonctionne ? "C’est facile et rapide", nous assure Lautfi Kraï. Le patient en recherche d’un infirmier ou d’une infirmière à domicile doit télécharger l’application DomiHome ou se connecter sur le site internet domihome.be.

"Ensuite, il sélectionne un infirmier et complète une demande de soin. Il sera alors appelé par ce dernier pour convenir d’un rendez-vous à son domicile." Il existe également une seconde option, qui ne nécessite pas d’inscription sur le site, la demande de soins instantanée. "Un patient, un proche ou un autre professionnel de la santé, comme par exemple une assistante sociale, peut envoyer une demande de soins instantanée. Nous la traitons et celle-ci est envoyée automatiquement aux infirmières de proximité. Elles pourront accepter la demande de soins et reprendre contact directement avec le patient."

Une plateforme disponible dans plusieurs pays

Lancée officiellement en 2019, DomiHome est disponible en Belgique, en France, au Grand-Duché du Luxembourg, mais aussi en Suisse. Chez nous, la plateforme compte désormais 500 infirmiers et infirmières répartis entre la Wallonie, Bruxelles et la Flandre, soit "tous les professionnels qui sont validés, disponibles et opérationnels", ajoute Lautfi Kraï, expliquant qu’un "tri" venait d’être effectué pour vérifier ces profils. En France, environ 1.000 infirmiers et infirmières sont inscrits. "La plateforme est en français, néerlandais, anglais et allemand et la traduction a été faite par des professionnels" afin de pouvoir la rendre accessible au plus grand nombre.

Bien que présente en Suisse, DomiHome n’y est encore beaucoup utilisée. Mais selon Lautfi Kraï, "une chose très importante, c’est que la problématique se pose dans les différents pays. Que ce soit en Belgique, en France ou en Suisse, il y a des patients qui éprouvent souvent des difficultés à entrer directement en contact avec des infirmières à domicile".

Il est souvent difficile pour le patient de trouver une infirmière à domicile quand il quitte l'hôpital

En effet, c’est pour cette raison que l’infirmier et enseignant a créé cette plateforme. "Mon expérience professionnelle et celle de mes collègues nous ont montré qu’il était souvent difficile pour le patient de trouver une infirmière à domicile quand il quitte l’hôpital." Lautfi a exercé aux Cliniques Universitaires Saint-Luc, mais aussi dans d’autres hôpitaux, et s’est rendu compte qu’une question qui revenait systématiquement de la part de ces patients, c’était : comment trouver une infirmière de proximité rapidement ? "Dans les hôpitaux universitaires, ce sont souvent l’assistante sociale ou l’infirmière de liaison qui vont essayer de gérer le retour à domicile. En milieu hospitalier, il n’existe pas un outil qui permette de répartir les patients qui nécessitent un soin à domicile lorsqu’ils quittent l’hôpital. Or, nous sommes en 2020… Les assistantes sociales et infirmières de liaison n’ont pas de protocole, elles peuvent appeler qui elles veulent et généralement, elles travaillent avec de grandes structures comme les centres de coordination."

DomiHome dans les hôpitaux

Un centre de coordination, selon ACCOORD (Association des Centres de Coordination de Soins et de Services à Domicile), "a pour mission de coordonner les aides et les soins au domicile d’un bénéficiaire afin de permettre à toute personne en perte d’autonomie de rester le plus longtemps à domicile en respectant ses choix dans un souci de pluralisme". Lautfi Kraï nous explique que les infirmières et infirmiers des centres de coordination sont salariés et liés à cette structure. "Et puis, il y a les infirmières et infirmiers indépendants qui exercent à leur propre compte, soit en tant que personne physique, soit en tant que société." Or, pour lui, les hôpitaux font appel aux centres de coordination, aux détriments des indépendants "parce qu’ils ont moins de visibilité alors que je pense qu’il y a du travail pour tous". "L'idéal serait que DomiHome puisse être utilisée d'emblée dans les hôpitaux parce que ça ne peut que faciliter le retour à domicile."

Lautfi Kraï pointe deux problèmes : l’assistante sociale ou infirmière de liaison ne peut pas faire ça avec tous les patients et il y a des services où elles ne sont simplement pas présentes. "Par exemple, la chirurgie ambulatoire. Quand un patient rentre se faire opérer en matinée et qu’il doit quitter l’hôpital dans l’après-midi, il n’a pas le temps de discuter avec une assistante sociale ou une infirmière de liaison. Il est un peu livré à lui-même, comme celui qui passerait par les urgences." Les recherches peuvent alors être longues : "contacter la mutuelle, son médecin traitant, chercher sur internet…" Selon lui, DomiHome permet de "résumer" ces démarches et de "créer un pont entre le patient et les infirmières à domicile".

Une plateforme gratuite pour tous

La plateforme DomiHome est entièrement gratuite, aussi bien pour les patients que pour les infirmiers. Ces derniers s’inscrivent et une fois leur profil validé, ils peuvent commencer à recevoir des demandes de soins. "Les avantages, c’est qu’ils peuvent accepter ou décliner une demande de soin et en même temps, la plateforme augmente leur visibilité et leur permet de gagner du temps." Lorsqu’il s’inscrit, l’infirmier choisit également la zone dans laquelle il se déplace. "Le patient, quand il introduit une demande, va indiquer sa commune et aura automatiquement une liste de prestataires de soins qui va apparaître. C’est à lui de choisir le professionnel qu’il souhaite." La spécialisation de l’infirmer sera également indiquée. "En Belgique, on en compte 4, soins de plaie, diabétologie, soins palliatifs et oncologie."

Une bonne idée... pour le futur ?

Yves Esser, infirmier à domicile à Bruxelles, est inscrit sur la plateforme. Pour lui, c’est surtout dans le futur que cette "idée bien pensée" se développera. "On a encore la population des baby-boomers des années 50 qui ne sont peut-être pas à l’aise avec le numérique. Ma génération, quand on aura besoin d’infirmiers, gérera ça sans problème. Dans le futur, c’est le genre de truc qui va fonctionner", croit-il.

Infirmier indépendant, Yves Esser fait partie d’une petite structure de 4 personnes. C’est lors de la première vague du coronavirus qu’il a découvert DomiHome, via l'un de ses collègues. "Je me suis inscrit et puis, le responsable de DomiHome m’a contacté pour un soin de plaie. La patiente ne parvenait pas à trouver un infirmier ou une infirmière et elle s’est tournée vers cette plateforme." Selon lui, le Belge est "un peu frileux au niveau des changements". "C’est-à-dire que maintenant, c’est surtout via le bouche-à-oreille qu’un infirmier intervient, ou via le médecin, l’assistante sociale ou les mutuelles." DomiHome est donc intéressant pour lui car le patient qui a besoin de soin infirmier peut les "commander comme vous commandez une pizza".

Yves Esser est souvent contacté directement par les hôpitaux. Il a pu cependant faire quelques soins via la plateforme. "Si les hôpitaux utilisaient cette plateforme, ce serait une facilité. Ils ne devraient pas commencer à appeler tel ou tel infirmier pour savoir s’il est disponible. Les soins sont mis sur la plateforme et atterrissent chez les infirmiers qui les prennent ou pas. Dans le futur, c’est le genre de plateforme qui va exploser au niveau des demandes."

Des retours très positifs

Le fondateur de DomiHome est heureux du chemin parcouru en un an. Beaucoup de demandes de soin ont été traitées et de nombreuses mises à jour ont été faites à l’application "pour que les utilisateurs aient une bonne expérience". "Ce qui est incroyable, c’est qu’on a tous les jours des inscriptions de la part des patients et des infirmiers. Nous avons tous les jours des demandes de soins à traiter et nous avons énormément de retours positifs de la part des infirmiers et des patients."

Ils envoient quelqu'un de professionnel, doux et bienveillant

Parmi ces retours positifs, il y a Marie (nom d’emprunt) qui a utilisé DomiHome pour sa grand-mère âgée de 80 ans. Cette dernière a eu des brûlures suite à de la radiothérapie. Marie a donc fait appel à la plateforme pour trouver une infirmière ou un infirmier qui viendrait soigner les plaies de sa grand-mère. Elle la découverte par hasard au cours de ses recherches. "J’ai été vers le site le plus professionnel, où il était possible d’envoyer directement une demande de soins instantanée. Je me suis dit : je vais le faire et ça sortira de ma tête et en fait, j’ai été recontactée 20 minutes plus tard. C’est super rapide." Au téléphone, Marie explique les soins dont sa grand-mère a besoin et dès le lendemain, une infirmière se rend au domicile de cette dernière. "Les soins sont désormais terminés mais si on en a à nouveau besoin, on n’hésitera pas à recontacter DomiHome. Ils font bien leur boulot, ils envoient quelqu’un de professionnel, doux, bienveillant et pas stressant. C’est très important car ma grand-mère est déjà assez stressée avec ce qu’elle vit.

En faisant appel à DomiHome, Marie s'est sentie écoutée. Elle recommande cette plateforme qu'elle estime "accessible et facile" et donc le "personnel est disponible". "C'est aussi un contact humain et il y a de la bienveillance".

Une plateforme créée sur fonds propres

La plateforme DomiHome a été créée sur fonds propres. "Nous souhaitons vraiment bénéficier de subsides pour couvrir les frais de développement et pouvoir impacter au niveau national." Pour lui, c'est aussi l'occasion de mettre en avant un produit "made in Bruxelles". Lautfi Kraï peut compter sur l'aide de quelques volontaires pour l'aider à gérer sa plateforme. "Cela demande beaucoup de travail et d'investissement, mais je sais que DomiHome répond à un besoin." Pour la faire connaître Lautfi Kraï a réalisé un clip, qu'il nous a envoyé via le bouton orange Alertez-Nous. "Nouveau clip vidéo, la 3ème vague", écrivait-il simplement.

"J'ai réalisé un clip car en tant qu'infirmier et responsable de DomiHome, je voulais montrer mon soutien à toutes ces blouses blanches. Je voulais aussi conscientiser les dirigeants et les dirigeants sur les conditions de travail, et ainsi revaloriser le statut de soignants. Pour résumer la chanson et la situation actuelle, je vous renvoie au refrain : "Il faut du flouze pour nos blouses. Plus de moyens pour les infi de demain. Un peu plus de blés pour le secteur de la santé." Depuis de nombreuses années, les conditions de travail pour les hôpitaux et les maisons de repos sont difficiles. Le personnel soignant est éprouvé. Nous en avons pris réellement conscience avec le Covid."

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